Entre un Cannavaro, intraitable capitaine de l’Italie championne du monde, et un Ronaldinho invisible, en passant par un Rooney qui voit rouge et un Zidane qui gâche sa finale, les fortes individualités n’auront pas toutes été logées à la même enseigne au Mondial 2006 de football.
Avec force arabesques et passements de jambes, Ronaldinho, champion du monde en titre et tout frais champion d’Europe avec le FC Barcelone, devait être la vedette du Mondial en Allemagne. Mais il n’en fut rien : noyé dans un "carré magique" – avec Ronaldo, Adriano et Kaka – qui a loupé ses tours, le Brésilien Ballon d’or 2005, 26 ans, est passé à côté. Dans un Mondial où finalement peu d’individualités marquantes auront émergé, c’est finalement un défenseur de 32 ans, l’Italien Fabio Cannavaro qui restera dans les mémoires. Non seulement parce qu’il eut l’honneur de soulever le premier le trophée, mais plus encore parce qu’il fut le moteur et le guide des Azzurri.
Si sa personnalité ne fait pas toujours l’unanimité – entre provocations et soutien au sulfureux Luciano Moggi – le défenseur central a été exemplaire au cours de l’épreuve. Avec le gardien Gianluigi Buffon – ils sont les seuls joueurs italiens à avoir joué l’intégralité des six matches – et le latéral Gianluca Zambrotta, il a parfaitement ordonné une défense de fer (deux buts encaissés: un contre son camp et le penalty de Zidane en finale). Et, plus encore, au milieu de la tempête – affaires de corruption dans le Calcio, tentative de suicide de l’ancien international Gianluca Pessotto, il a su fédérer ses troupes pour mener la Squadra Azzurra à son 4e titre mondial. Finaliste, le Français Zinédine Zidane, 34 ans, aurait lui aussi pu être le héros du Mondial. Monté progressivement en puissance, le Français, huit ans après avoir déjà écœuré le Brésil en finale du Mondial-98, a récidivé en quart de finale à Francfort. Le N.10 réalise alors un des meilleurs matches de sa carrière, affichant une maîtrise technique exceptionnelle et insolente de facilité. Seulement, "Zizou", dans un coup de sang assez incompréhensible (coup de tête dans la poitrine de Materazzi) mais dont il est coutumier – s’est fait exclure en finale. Alors qu’il avait ouvert le score, il a tout gâché, lui qui entendait pourtant en faire le couronnement de sa carrière: il avait annoncé qu’il prendrait sa retraite de joueur après le Mondial. Dans le sillage du capitaine, d’autres Bleus s’étaient sentis pousser des ailes, à l’image de Lilian Thuram, infranchissable face au Portugal en demi-finale, ou du duo de récupérateurs Claude Makelele-Patrick Vieira. Quant à Franck Ribéry, petite merveille d’explosivité, il ne pouvait avoir meilleur apprentissage, aux côtés du maître. Le brassard n’a pas non plus porté chance à l’Anglais David Beckham, éliminé en quarts, et qui a même décidé d’y renoncer. Malgré un pied droit toujours aussi précieux sur les coups de pied arrêtés, il a disputé un tournoi très moyen.
L’attaquant Wayne Rooney, revenu in extremis de blessure pour participer au Mondial, devrait bientôt remplacer ""Becks"" dans le cœur des supporteurs anglais. Mais, en attendant, trop juste physiquement, il n’a pas marqué un but.
Et il restera surtout de lui une image de gamin furieux d’être remplacé contre la Suède, puis exclu contre le Portugal pour avoir marché sur un adversaire. Côté attaquant, plutôt que Michael Ballack, c’est le duo allemand Miroslav Klose-Lukas Podolski qui s’est mis en valeur. Le premier a des chances de terminer meilleur buteur (5 buts), le deuxième, 21 ans, de devenir le prochain grand attaquant de la Mannschaft.
Au cours de "son" Mondial, l’Allemagne a également trouvé en Philippe Lahm, 22 ans, un latéral gauche plein d’avenir, ainsi qu’en Jens Lehmann un gardien plein d’assurance, notamment lors de la séance des tirs au but face à l’Argentine (2 tirs arrêtés). Dans cet exercice, le Portugais Ricardo a été encore plus fort face à l’Angleterre (3 tirs arrêtés ou repoussés). Son jeune coéquipier Cristiano Ronaldo s’est, lui, illustré par des accélérations dévastatrices. Reste désormais à ce dernier à se montrer moins personnel et à prendre exemple sur son capitaine Luis Figo, qui va tirer sa révérence après le match de la 3e place. À défaut d’être allés très loin dans la compétition, d’autres milieux ou attaquants ont pris rendez-vous pour l’avenir, à l’image des Argentins Carlos Tevez, Lionel Messi et Maxi Rodriguez, des Espagnols Cesc Fabregas et Fernando Torres, ainsi que des Néerlandais Arjen Robben et Robin van Persie et du Suisse Tranquillo Barnetta. Un jour, peut-être, l’un d’entre eux rejoindra le Brésilien Ronaldo dans l’histoire. En marquant 3 buts en Allemagne, il est devenu le meilleur buteur de l’épreuve (15 buts), dépassant l’Allemand Gerd Muller (14). Cela n’a toutefois pas suffi à la Seleçao pour s’en sortir. Signe d’ailleurs que rien n’allait vraiment comme d’habitude chez les Brésiliens, c’est un milieu défensif, Zé Roberto, qui aura été leur meilleur joueur au Mondial-2006.