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Le Maroc sort de sa réserve

Les autorités marocaines sortent enfin de la réserve qu’elles ont observée sur l’affaire de l’îlot Leïla, dit Persil qui a fait subitement monter d’un cran la tension depuis jeudi 11 juillet entre le Maroc et l’Espagne.
C’est le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération qui est monté au créneau lundi 15 juillet lors d’une conférence de presse au siège de son ministère à Rabat. Mohamed Benaïssa donne d’emblée le ton et lève toute ambiguïté à ce sujet : “Cet îlot ne figure sur aucune carte de l’Espagne. C’est un bout de terre bel et bien marocain depuis sa libération par le Maroc en 1956“. Il ajoute, ferme : “Il est vrai que Madrid a incorporé en 1986 cet îlot dans le nouveau statut de Sebta. Mais le Maroc avait protesté à l’époque“. En effet, après l’éclatement de la crise, les autorités espagnoles n’ont pas fait état de leur souveraineté sur cet îlot. Elles ont juste déclaré que le Maroc a violé le statu quo. Mais lequel ? Ou Leïla appartient au Maroc et auquel cas il a le droit d’en disposer y compris d’y envoyer ses troupes comme il l’a fait ou elle ne lui appartient pas auquel cas le Maroc serait coupable de violation de la souveraineté espagnole sur cet arpent de terre. Tout en réaffirmant la volonté de «dialogue» de son pays, Mohamed Benaïssa a estimé que l’îlot de Leila «ne fait pas partie du contentieux territorial subsistant entre le Maroc et l’Espagne au sujet des enclaves qui demeurent sous occupation espagnole sur le côte nord du Maroc».
Le ministre a ajouté que l’histoire «démontre la marocanité de cet îlot», un «rocher aride et inhabitable», indiquant que depuis 1956, date de sa «libération» lors de la fin du protectorat espagnol sur la zone, les forces de sécurité marocaines y ont été déployées «chaque fois qu’il a été nécessaire». D’une superficie de quelque 14 hectares, située à 14 km à l’est de Tanger, l’île du Presil a été de tout temps exploitée par une population marocaine de Jbel Moussa où elle fait de l’élevage de caprins. Les Espagnols n’y ont jamais mis les pieds. Par contre, Persil, de par sa situation, revêt un caractère stratégique. C’est pour cela que des éléments de la sécurité marocaine l’ont investi jeudi dernier.
“Les mesures de surveillance dépliées par le Royaume entrent dans le cadre de l’exercice de la souveraineté de l’État marocain“, estime Mohamed Benaïssa.“Persil est un point de passage pour le trafic de cigarettes et des candidats à l’émigration clandestine“, explique de son côté un haut fonctionnaire de la diplomatie marocaine. Demeure cependant une question sans réponse : pourquoi les autorités marocaines ont-elles débarqué dans cet îlot à la veille des festivités du mariage royal ? Pourquoi ce débarquement n’a-t-il pas eu lieu par exemple une semaine ou un mois plus tôt ? Une chose est sûre : l’incident a perturbé un peu le climat au Maroc à un moment de la grande fête. La réaction espagnole à l’initiative marocaine est pour le moins disproportionnée : un déploiement de force (sous-marins, hélicoptères, frégates) le long des cotes de Sebta et Mélilia, que le gouvernement espagnol a justifié par une volonté de rassurer les populations des deux enclaves marocaines ! À croire que les Maroc allait faire la guerre à son voisin… Madrid veut faire d’un petit rocher une montagne… Et l’Union Européenne qui soutient l’Espagne dans son attitude belliqueuse… Depuis que cette affaire a éclaté, il n y a pas eu de contact diplomatique de haut niveau entre les deux parties pour calmer les esprits et désamorcer la crise. M. Benaïssa nous a déclaré que la question de l’îlot n’a rien à voir avec l’affaire de Sebta et Mélilia.
Selon lui, ce sont deux dossiers différents. Autrement dit, l’îlot de Leïla ne fait pas partie du contentieux territorial subsistant entre les deux pays sur les deux présides en question“. “Si les Marocains ont investi Persil, ils pourraient très bien envahir Sebta et Mélilia“, pensent les autorités espagnoles. C’est ce qui s’appelle faire feu de tout bois sur fond de mauvaise foi et de procès d’intention. Dès qu’il s’agit de son voisin, le gouvernement Aznar aime décidément jouer à se faire peur…

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