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La migration : Une question de politiques étrangère et interne

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Le Royaume du Maroc, situé au Nord-Ouest de l’Afrique, dispose de plusieurs frontières, terrestres et maritimes, ce qui l’oblige à inscrire la question de la migration parmi ses priorités stratégiques.

Délimité au Nord par le détroit de Gibraltar et la mer Méditerranée, au Sud par la Mauritanie, à l’Est par l’Algérie et à l’Ouest par l’océan Atlantique, il doit également être en mesure de gérer sa côte, laquelle s’étend sur près de 3.500 kilomètres.
Le Maroc est aussi bien un pays de passage qu’une terre d’accueil et de destination pour divers types d’immigrations, permanentes ou limitées dans le temps, d’origines géographiques variées, principalement d’Afrique et à moindre mesure d’autres continents.

Pour des millions d’immigrants, enfants et adolescents, en provenance d’Afrique de l’Ouest et du Nord, le Maroc est l’étape finale, avant d’arriver au Vieux Continent.
Avec un droit international qui s’avère modérément développé pour assurer à l’ensemble des personnes en déplacement le respect de leurs droits fondamentaux, conjugué à une certaine incohérence dans l’approche globale de traitement des questions liées aux flux migratoires, nombreux Etats se retrouvent confrontés à des défis, quand il s’agit de gestion des déplacements de populations ou de groupes d’individus, sachant, tout de même, que la migration peut également offrir de nombreuses opportunités pour le pays d’accueil.

La migration, une épine dans le pied

La question migratoire devient, graduellement, une problématique à la fois de politique étrangère et de politique interne, surtout vis-à-vis d’une classe de jeunes marocains et africains, fougueusement déterminés à immigrer, illégalement, en Europe, mettant souvent leurs vies en péril. Il en est aussi des menaces, de portées nationale et transnationale, auxquelles fait face le pays, en matière de lutte contre l’immigration clandestine. Ce qui incite le Maroc à élargir son champ de coopération bilatérale et multilatérale et d’affiner, régulièrement, ses dispositifs légal et sécuritaire, afin d’être le mieux outillé pour neutraliser des réseaux mafieux de passeurs et de trafiquants, voire parfois des partisans de groupuscules terroristes, dans l’objectif de commettre des actions malveillantes en territoires marocain et/ou européen.
Un autre défi à soulever : il s’agit des exigences en matière de prévention de l’immigration irrégulière, de contrôle aux frontières et de la réduction des flux qui devraient être, harmonieusement, conciliées avec celles de l’accès au territoire des demandeurs d’asile, qu’il ne paraît pas souhaitable de contraindre à de hasardeux périples, ou de la prise en compte du cas particulier des mineurs isolés et des femmes enceintes.
Bien que bon nombre d’Etats, d’organisations internationales (Organisation internationale pour les migrations, Comité d’aide au développement de l’OCDE, Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, Organisation internationale du travail, Union africaine, Union européenne, etc.), d’ONG et d’Associations s’acharnent pour protéger et intégrer les migrants sur le terrain, le dénouement de l’équation migratoire demeure aléatoire, n’apportant que des solutions momentanées, parfois même très controversées.
In fine, il ne s’agit pas d’allouer d’importants moyens financiers à cette question, mais plutôt de s’attaquer aux causes profondes de la migration irrégulière et aux déplacements forcés.

Le Maroc, un allié stratégique de l’Europe

Le Maroc, grâce à la vision clairvoyante de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste, est reconnu pour son leadership mondial et africain, ainsi que par son engagement indéfectible dans les questions migratoires.
Même si certains médias étrangers avaient, brutalement et injustement, accusé, en mai 2021 et en mars 2022, le laisser-aller volontaire des contrôles frontaliers nationaux, ayant facilité le passage de masses importantes de migrants, atteignant à la nage ou escaladant les hautes clôtures frontalières, pour rejoindre les enclaves marocaines de Sebta et Melilia, la vérité finit toujours par triompher.
Verdict : le gouvernement espagnol, suivi par l’Union européenne (UE), n’ont pas manqué de souligner, officiellement, chacun à son tour, que le Maroc est un allié stratégique clef de Madrid et de Bruxelles, dans la lutte contre l’immigration illégale, allant même l’inviter à élargir, davantage, sa coopération, en matière de lutte contre l’immigration irrégulière, par voies terrestre et maritime.
Ainsi :
– Le 8 février 2022, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a effectué une visite officielle au Royaume, en vue de relancer le partenariat stratégique UE-Maroc, déstabilisé par plusieurs malentendus, dont celui lié à la question migratoire. Ci-après quelques extraits de son intervention lors d’un point de presse conjoint avec Aziz Akhannouch :
«Le Maroc est un pays avec lequel nous avons construit un partenariat stratégique, étroit et solide… Je réaffirme notre volonté de continuer à approfondir nos relations en tant que voisins, en tant que partenaires et en tant qu’amis».
– Le 10 mars 2022, le commissaire à l’élargissement et à la politique européenne de voisinage au sein de l’UE, Oliver Varhelyi, a précisé, lors d’un entretien avec Nasser Bourita, que «la migration irrégulière est une source d’instabilité et de vulnérabilité pour la région», tout en saluant «le travail dur mais persistant» du Maroc contre ce phénomène.
– Le 30 mars 2022, le chef du gouvernement ibérique, Pedro Sanchez, a affirmé devant le Congrès espagnol des députés que «les relations qui correspondent à deux pays voisins ont une importance stratégique dans les domaines du contrôle migratoire, des relations économiques et commerciales et de la lutte contre le terrorisme».
Des aveux qui en disent long et qui sont entérinés par la visite historique de M. Sanchez, le 7 avril 2022, au Maroc.
Dans une autre perspective, il est à noter que le Maroc a accueilli, le 25 mars 2022, la première réunion ministérielle des pays champions de la mise en œuvre du Pacte mondial sur les migrations, un événement au courant duquel tous les pays participants ont salué le rôle primordial de l’Auguste Souverain, en tant que véritable leader africain sur la migration.
Un événement qui a abouti à la conclusion d’un accord stratégique sur le programme dénommé «Link Up Africa», une initiative unique qui favorise la coopération triangulaire entre le Royaume du Maroc, l’Afrique et l’Union européenne, dont l’objectif principal est de faciliter aux jeunes africains l’accès à la formation et à l’emploi dans leur propre pays. N’oublions pas non plus que le Pacte mondial sur les migrations de Marrakech, fondé sur le droit international des droits de l’Homme et préparé sous les auspices de l’ONU, a été adopté le 10 décembre 2018, lors d’une conférence intergouvernementale sur la migration en terre marocaine et dont le principal objectif est de couvrir toutes les dimensions des migrations internationales.
Aussi et dans le cadre de la vision stratégique et prospective de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu le glorifie, un Observatoire africain des migrations, organe de l’Union africaine (UA), dont le siège est à Rabat, est actif, depuis le 18 décembre 2020 et un rapport de SM le Roi sur le suivi de son opérationnalisation a été présenté par Nasser Bourita, le 6 février 2022 à Addis-Abeba, lors du 35ème Sommet de cette enceinte continentale. En résumé, le Royaume du Maroc est une terre de paix, de conciliation et de clémence qui sauvegarde, noblement, les droits des migrants et des réfugiés. Pour dire toute l’importance que SM le Roi accorde à la question migratoire.

Les migrations : Une voie d’opportunités

Il est important de rappeler que des migrants africains qualifiés transitent, de plus en plus souvent, par les pays du Maghreb, dont le Royaume devient un terrain privilégié, compte tenu de sa stabilité politique et sécuritaire, mais aussi de son émergence industrielle, allant même motiver certains d’entre eux à renoncer à leurs projets migratoires vers l’Europe, pour s’y installer définitivement et ainsi participer au développement de son tissu économique.
De même, pour les investisseurs étrangers qui viennent s’établir au Maroc ou des occidentaux qui décident de s’y expatrier. Ce qui peut être considéré comme un grand atout pour la promotion économique, technologique et culturelle du pays. S’y ajoutent également certaines formes de mobilité religieuse qui rapprochent le Maroc d’un grand nombre d’Etats, particulièrement, d’Afrique de l’Ouest, à travers des visites régulières de pèlerins et par un marché de tourisme religieux en floraison. Dans cette perspective, le Forum international d’examen des migrations qui se tiendra, le mois prochain (10-13 mai 2022), à New York serait une aubaine pour le Royaume du Maroc, pour partager les énormes progrès réalisés dans la mise en œuvre du Pacte mondial de Marrakech et démontrer, à la communauté internationale, les opportunités dont il a, brillamment, su tirer profit.

Par Yassir Lahrach (*)

Docteur en droit/Expert en intelligence économique
Analyste en stratégie internationale/Auteur du concept d’intelligence diplomatique

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