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Khalid Darnaoud, sculpteur et designer: Le Giacometti marocain

© D.R

A 43 ans, Khalid Darnaoud n’en est plus à sa première création artistique.

Khalid-DarnaoudNé à Casablanca, sa trajectoire initiale était autre. Alors que tous les membres de  la famille lui souhaitaient une carrière de juriste, le jeune homme se sentait animé d’une fibre artistique sans fin. Happé par la réalité, il devait mettre la main à la pâte comme les autres membres de sa famille pour contribuer au foyer. Et pour faire plaisir à ses parents, il entreprit avec brio des études de droit.
Devenir juge ou avocat, c’était bien le rêve de ses parents.  Ayant décroché la licence en droit arabe au grand bonheur de ses parents, Khalid passa le concours pour emprunter la voie royale des études juridiques et devenir avocat ou juge. Mais au fond de lui, il savait qu’il n’était pas dans son élément. Ses sens finirent par avoir raison de lui.

La fibre artistique finit par le rattraper. Ses tentatives au début timides dans la peinture ou la création lui envoyaient des signaux clairs sur ses aspirations et le choix de sa trajectoire future. Le regard profond, Khalid sait aujourd’hui qu’il a besoin d’espace, de liberté d’expression pour s’épanouir et se régénérer.

Sculpture-bis-bis La carrière d’avocat était déjà loin derrière lui et son regard de guerrier laissait transparaître cette fierté du sculpteur qui ne veut plus avoir à rendre compte à qui que ce soit.  Le doute persistant, la reconnaissance devait justifier les choix de l’artiste. Chose faite quand la première sculpture de Khalid, baptisée Cercle de vie, se vendit en un temps record et à un prix auquel il ne s’attendait pas du tout. Dès lors, un appétit indéfinissable s’empara de l’artiste qui alimenta son imagination et sa créativité. Au Maroc ou à l’étranger, Khalid devenait le Giacometti marocain. Une comparaison très honorifique pour Khalid qui préfère avancer en toute humilité, selon son propre style. «C’est un grand honneur pour moi que mon travail soit comparé visuellement  à celui de mon artiste sculpteur préféré Giacometti mais chacun de nous a son propre style. Le sien est plus compliqué et plus beau. Moi je travaille directement mes œuvres sur le fer.

Mon travail repose sur un assemblage de tiges de fer que je soude pour créer les mouvements et les expressions, après vient l’étape de remplissage et c’est des milliers et des milliers de points de soudeur pour couvrir le tout», explique, humblement, Khalid Darnaoud.
Sa première réalisation représente l’une des plus belles réalisations aux yeux de l’artiste.

Sculptures-Darnaoud-3 Il s’agirait de la première œuvre, née dans un moment difficile dans la vie de Khalid. Réservé et pudique sur son propre vécu, les portes intérieures de l’âme de Khalid resteront closes à ce niveau. La créativité fertile laissera entrevoir une partie néanmoins de la personnalité de l’artiste. Une commande de 40 sculptures pour le compte de la galerie H du Groupe Holmarcom en attestera par la suite. Lui, qui a été mis en concurrence avec quatre autres, a été choisi. Une fierté qu’il ne cachera pas mais qu’il ne criera pas non plus sur les toits. Ses réponses demeureront dosées et réfléchies, presque autocensurées par cette voie antérieure qui force le respect.

Sculpteur et designer bel et bien confirmé, son installation à Marrakech ne représente qu’une étape dans sa trajectoire.
Il faut dire que ses aspirations ont été imbibées par les quatre coins du Maroc. Khalid a démarré, en effet, son périple au Nord du pays et sa prochaine étape est prévue à Essaouira. Installé depuis 3 ans à Marrakech, il faut dire que la ville ocre l’a beaucoup inspiré. «C’est une ville qui bouge tout en préservant son identité. J’y ai  rencontré des personnes de qualité qui m’ont appris beaucoup de choses». D’autres horizons se sont ouverts entre-temps et Khalid compte bien, avec ses amis résidant à Marseille, monter une exposition collective en France. Un autre projet en binôme avec un artiste photographe étranger est en cours. Khalid se gardera de donner plus d’indications sur sa réelle contribution dans ce prochain événement artistique. Ce qui est sûr c’est qu’il ne s’agira pas de sculpture.

Il faut dire que l’artiste a développé d’autres styles et s’est essayé au design, à l’aménagement et la décoration d’intérieur. Discret et fier, Khalid nous confiera que ses œuvres se vendent et qu’il n’a pas à se plaindre à ce niveau.

Dans un environnement national, où le marché de l’art n’est pas régulé et ne répond à aucune norme clairement définie par les autorités de tutelle, l’artiste se gardera bien de se plaindre ou de jouer à la victime d’une société pas forcément tournée vers l’art.

Au contraire, Khalid affiche cet optimisme entretenu par une fierté innée où l’ego ne laissera jamais montrer une quelconque blessure. Sa philosophie d’ailleurs est de ne pas vieillir intérieurement ou du moins de le faire positivement. «Il est grand temps d’investir dans la richesse humaine». En idéaliste, son message est clair. Khalid compte bien le prouver en créant une association dans sa ville natale, en l’occurrence Casablanca, où il apprendrait aux jeunes de son quartier à sculpter et à se réaliser dans toute autre forme de style.
Une bonne manière en somme de prouver son engagement à valoriser l’Autre.

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