Petit bonjour

La seule manière de tenir le Prince — de le maintenir sous influence — est de lui faire peur. Depuis Machiavel, homme politique et écrivain florentin, et son ouvrage de référence sur la question, Le Prince, la technique est connue. Il n’y a pas mieux que de bonnes vieilles émeutes, par exemple, pour consolider des positions, créer de nouvelles parts de marché de pouvoir, redistribuer les cartes, etc. Quand le Prince a peur, il délègue, il adoube, il installe, il promeut, il rappelle à ses côtés. Bref, il lâche du lest. Les cercles de pouvoir sont habitués à ce genre de procédés sauf qu’aujourd’hui, ils font plus dans la dentelle que dans la toile de jute kaki. Ils brodent, les constructions sont plus sophistiquées, plus dangereuses, aussi. Ils laissent faire, ils n’anticipent pas, ils suscitent en sous main, ils incitent, ils tirent les ficelles, ils excitent et le résultat est le même. Le plus notable c’est qu’aujourd’hui, la panoplie — le piano — pour faire vivre cette stratégie de harcèlement est plus étendue que par le passé. La démocratisation a multiplié les canaux. Et la liberté d’expression a libéré les énergies. Les candidats à l’accomplissement, coûte que coûte, du devoir d’informer, à l’exercice généreux de la conscience professionnelle sont si nombreux et les prestations de service si structurées que l’offre dépasse largement la demande. Si dans le passé, en France, on a pu parler de «coup d’Etat permanent», au Maroc, aujourd’hui, on peut, probablement, parler de «complot quotidien».