Le nouveau texte, qui place la famille « sous la responsabilité conjointe des deux époux », pose notamment de sévères conditions à la polygamie et à la répudiation et porte à 18 ans au lieu de 15 l’âge légal du mariage des femmes.
« La loi seule ne peut pas suffire. Il faut maintenant assurer son suivi, en aidant la population à se l’approprier et en mettant en place un observatoire qui surveillera l’application du nouveau code », a déclaré à l’AFP, Nezha Guessous, qui a participé à la commission royale chargée de préparer la réforme du code du statut personnel (Moudawana).
« Les femmes doivent être informées de leurs nouveaux droits. C’est pourquoi il faut mener des campagnes de sensibilisation, aussi bien dans les médias que dans les écoles, » estime, de son côté, Amina Lamrini, présidente de l’Association démocratique des femmes du Maroc. Les deux chaînes de télévision marocaines, toutes deux publiques, ont commencé à diffuser un spot de sensibilisation sur le texte de loi adopté à l’unanimité par les deux Chambres du Parlement marocain, sur proposition du Roi Mohammed VI. Pour Mme Lamrini, comme pour la plupart des associations féministes, le nouveau code constitue une avancée vers l’affranchissement des femmes marocaines.
Nadia Yassine, représentante de la principale association islamiste marocaine, Al Adl Wal Ihssane (Justice et bienfaisance), ne partage pas ce point de vue. Le nouveau texte est « un code démagogique déconnecté de la réalité marocaine », a-t-elle déclaré à l’AFP. La responsable islamiste estime que la nouvelle loi manque d’accompagnement. « La liberté, ça se finance! », proclame-t-elle, à propos notamment du droit au divorce accordé aux femmes. « Il faut que l’Etat mette en place une caisse pour assurer l’avenir financier de la femme, qui trouvera difficilement du travail à cause du chômage », explique-t-elle.
Un Conseil national de la femme devrait être créé pour assister la femme divorcée, estime Latifa Jbabdi, à la tête de l’Union de l’action féminine. Cette militante propose d’optimiser l’impact de la réforme en assurant l’alphabétisation des femmes et « l’organisation de leur autonomie financière. » Latifa Jbabdi revendique en outre la création d’une structure d’observation de l’application du code. « Cette instance relèverait tous les écarts à la loi, notamment ceux commis par les magistrats », explique-t-elle. Pour les militantes féministes, la formation des magistrats représente un défi important en vue de l’application du nouveau code. « Ils doivent s’imprégner de la philosophie de la réforme. Il faut uniformiser leur interprétation du texte », estime Latifa Jbabdi.
Quelque 320 magistrats spécialisés dans les affaires de la famille sont en cours de formation. Une première promotion de 80 juges spécialisés devraient prendre leurs fonctions, dès le 16 février. Le nouveau Code de la famille consacre l’égalité entre l’homme et la femme au Maroc, alors que l’ancien code maintenait les Marocaines, selon les organisations féministes, dans un statut de « mineures ».
• Caroline Taïx (AFP)