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Corse : Les Marocains fuient le racisme

Cet exode a commencé il y a environ cinq ans et semble s’être accéléré au cours des derniers mois. Près de trois cents familles ont quitté l’ÃŽle pour s’installer dans ce département, dont une centaine à Nîmes, selon des estimations des services sociaux.
Beaucoup d’entre eux ont rejoint des proches dans deux cités dont les 18.000 habitants sont, pour les deux tiers, originaires du Maghreb. « Ces gens sont à la fois effondrés et soulagés. On leur conseille de porter plainte, mais ils craignent des représailles.
La loi du silence continue », explique à l’AFP Ali Karim, responsable de l’association locale « Amitié franco-marocaine ». Arrivé en Corse à l’âge de 10 ans en 1979, Sidi, un boulanger d’origine berbère, raconte, sous couvert de l’anonymat, le « calvaire infernal » qui l’a récemment conduit à s’exiler: « Tant que je n’étais qu’un petit employé, ça pouvait aller. Mais quand j’ai voulu monter ma propre affaire pour vendre des gâteaux orientaux, les ennuis ont commencé ». « Des gens, dit-il, m’ont agressé en me disant de partir si je tenais à la vie », confie ce père de famille, qui a gardé comme seul « souvenir » une carte de l’ÃŽle en coquillage fabriquée par son fils. Rhanite Jilali, un chauffeur de 49 ans, a vécu un parcours similaire, deux ans plus tôt, alors qu’il travaillait dans les champs, près de Bastia. « On n’a pas le droit d’avoir une belle maison, une belle voiture. Pour eux, on est comme des sauvages. Dans certains cafés, ils ne nous servent pas », témoigne cet homme originaire de Marrakech, dont tous les enfants, de 3 à 15 ans, sont nés en Corse. Quand le fils a succédé au père, le nouveau patron l’a chassé « à coups de pieds », affirme-t-il, sans illusion sur son recours à la justice pour licenciement abusif: « Là-bas, la loi, c’est les coups de pistolet. Nous n’avons aucun droit. Les policiers, les gendarmes ne font rien pour nous ». Dans l’immeuble où il vit, son voisin Mohamed El Brika, 50 ans, est arrivé à Nîmes voici une semaine, en provenance d’Ajaccio, dans le nord de la Corse. Sa famille l’avait à peine rejoint, en 2003, qu’il a fallu déménager dans l’urgence. « Après une bagarre entre mon fils et des Corses, quatre personnes sont venues avec des couteaux menacer ma femme. Puis, mon fils a été jeté en prison.
Là, c’était trop », dit ce maçon dont le travail n’a été déclaré que dix ans sur les trente passés sur l’ÃŽle. Sa fille de 21 ans, Naoual, admet avoir du mal à oublier les inscriptions « Arabi Fora » (« Arabes Dehors ») peintes sur les murs. « Même les enfants à l’école se font insulter », murmure-t-elle. Aucune plainte n’étant parvenue au tribunal de Nîmes, le procureur de la République, Robert Gelli, a exhorté les immigrés à déposer plainte ou effectuer un simple signalement pour déclencher une action publique. « Ils ne doivent pas avoir peur mais se manifester auprès de la police », a-t-il indiqué, estimant qu’un éventuel regroupement des plaintes pourrait atténuer les réticences. Trente actes racistes violents ont été recensés en Corse contre des Maghrébins ou des Français issus de l’immigration maghrébine au premier semestre 2004, soit le tiers des actes de ce type commis en France.
Selon l’Institut national français de statistiques (Insee), la Corse compterait environ 26.000 personnes immigrées, essentiellement des Marocains, soit 10% des quelque 260.000 habitants.

• Philippe Zygel AFP

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