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Malika El Younsi : Les débats antagonistes entre femmes et hommes sont stériles

© D.R

ALM : Est-il difficile de s’assumer en tant que femme au Maroc ?
Malika El Younsi : Tout dépend du milieu et du contexte dans lesquels la femme a été élevée. La femme manque beaucoup de courage pour se détacher des stéréotypes. Personnellement, j’ai grandi dans une famille qui a toujours considéré les études comme la clé principale pour tout épanouissement de la femme. L’indépendance matérielle est également très importante. Même d’un point psychologique, la société fait qu’une femme se sent amoindrie si elle n’a pas un homme à ses côtés. C’est cette vision aberrante que porte la société sur la femme qui m’exaspère. L’homme n’y est pour rien.

Femme et homme sont-ils forcément rivaux ?
La femme est aussi forte que l’homme et l’homme est aussi faible que la femme. Je ne me suis jamais inscrite dans un climat conflictuel avec l’homme, c’est la structure de la société, qui est patriarcale, et toute une série d’évènements historiques qui ont fait qu’aujourd’hui l’homme a une place et la femme en a une autre. L’homme n’est pas mon ennemi. Il est mon père, mon frère, mon conjoint… et c’est celui qui m’a donné les moyens d’être ce que je suis.
Je ne suis pas du tout féministe et j’estime que tous les débats antagonistes entre femmes et hommes sont stériles. Ils ne servent aucunement la cause de la femme.
Que pensez-vous du «féminisme islamiste»? Y a-t-il moyen de combiner religion et féminisme ?
La religion n’est pas rigide. C’est l’interprétation qu’on en fait comme étant un instrument politique qui fait qu’au lieu de se donner une idéologie, on se donne des règles qui servent un jeu purement politique. La femme religieuse est aussi libre et épanouie que toute autre femme. C’est une femme intellectuelle, militante et ouverte sur le monde. A l’opposé de cela, il y a des femmes qui peut-être du fait qu’elles vivent dans des situations sociales très délicates, sont plus sujettes à ce modelage religieux dont se servent les politiques et ces pseudo-musulmans qui prêchent la polygamie et l’asservissement de la femme.

Les textes de loi jouent-ils en faveur de cette cause ?
La dernière Moudawana a essayé d’introduire, timidement, une certaine égalité entre la femme et l’homme. Le problème qui se pose aujourd’hui, c’est qu’on continue à lire les nouveaux textes avec l’esprit des anciens. Dans le domaine de la banque, la place continue à demander à toute femme voulant ouvrir un compte à son enfant une autorisation du père ou sinon un document attestant qu’elle est veuve. J’étais parmi les premiers à renverser cette règle parce que j’ai lu cette Moudawana dans l’esprit du législateur. En l’«absence» du père, la femme a le droit d’ouvrir un compte pour son fils et rien ne l’en empêche. Cette lecture, très simple, s’est heureusement généralisée sur la place.

Qu’en est-il des acquis professionnels de la femme marocaine?
Je peux vous garantir que la femme est très courtisée aujourd’hui. Le taux de recrutement des femmes est nettement supérieur à celui des hommes. Ce n’est point un privilège, c’est un acquis. Si ces femmes ont fait preuve de perfectionnisme, c’est essentiellement dû au fait qu’elles sont nées pour prouver qu’elles existent et elles ont dû se battre pour en arriver là. D’ailleurs je suis reconnaissante à l’homme sur ce point parce que c’est en entrant dans un challenge avec lui que des femmes puisent cette motivation permanente de donner le meilleur d’elles-mêmes.

Pourquoi donc l’évolution professionnelle de la femme se fait-elle plus lentement que celle d’un homme?
En recrutant une femme, on étudie son itinéraire dès le départ et on commence à calculer ce nombre de handicaps qui feraient qu’elle n’évoluera pas de la même manière qu’un profil homme.
On voit en elle un profil pas très mobile. C’est une femme qui va se marier, qui aura des enfants et donc des congés de maladie assez répétitifs. Ceci va créer des interruption au niveau du travail. C’est une sorte de ségrégation que les femmes subissent dans le monde entier.

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