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Tunisie : Un mois après la chute de Ben Ali

© D.R

Un mois après la chute du «dictateur» Ben Ali, les Tunisiens restent émerveillés par leur audace qui a lancé un souffle dans le monde arabe, profitant de leur liberté nouvelle mais impatients face à un gouvernement dépassé et toujours inquiets de voir leur révolution confisquée. 18h00, Tunis, vendredi 14 janvier. Après 23 ans de pouvoir sans partage, près d’un mois de contestation populaire, plus de 200 morts, le président Zine El Abidine Ben Ali, 74 ans, fuit son pays. Il devient le premier dirigeant d’un pays arabe à quitter le pouvoir sous la pression de la rue. Un mois plus tard, les Tunisiens parlent d’une «émotion folle». «La révolution est faite dans les têtes et les esprits. On a découvert un peuple libre, débarrassé des entraves qui en faisaient un peuple opprimé», dit l’opposant historique Moncef Marzouki. Dans la rue de la Tunisie du jasmin, désormais on parle à des inconnus, on n’évite plus les policiers, on revendique et on conteste. «Le plus important, c’est que je n’ai plus peur», dit Azyz Amany, blogueur de 27 ans. Après les premiers jours de chaos, que les sbires de Ben Ali ont été accusés d’avoir provoqués, et les pillages contre les biens des Trabelsi, famille honnie de la Première Dame, Leïla, pour avoir fait main basse sur les richesses du pays, la guerre civile n’a pas eu lieu et la transition s’est mise en marche. Une transition bégayante et incertaine mais une transition.
Inimaginable il y a seulement quatre semaines dans ce petit pays de 10 millions d’habitants muselés par une police omniprésente, le gouvernement de transition a annoncé des élections libres dans six mois, proclamé la liberté d’informer, adopté un projet de loi d’amnistie, autorisé l’opposition interdite, lancé des purges à la tête de la police, des administrations, suspendu l’ex-parti au pouvoir le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), fait saborder le Parlement. «Le point positif c’est qu’il n’y a pas de régression dans les libertés et on a un gouvernement qui a clairement déclaré vouloir préparer des élections démocratiques», souligne un diplomate occidental. «Mais on n’a pas encore une stabilité totale. Et aussi, se pose la question de savoir qui prend vraiment les décisions». Depuis qu’il a pris la transition en main, le Premier ministre Mohamed Ghannouchi, à la tête du gouvernement depuis 1999, multiplie hésitations, erreurs de jugement, retours en arrière qui lui valent d’être suspecté de ne pas vouloir totalement rompre avec l’ancien régime. Premier gouvernement essentiellement composé d’ex-caciques remanié sous la pression de la rue, nomination de nouveaux gouverneurs apparentés au RCD poussés au départ par les opposants : «Il n’y a pas de volonté politique claire de trancher avec le passé. Les décisions du gouvernement sont arrivées avec un décalage qui atteint sa légitimité et entraîne une crise de confiance», estime l’opposant Mustapha Ben Jaafar, leader du Forum démocratique pour le travail et la liberté (FDTL). Avec des cadres de l’ex-RCD qui noyautent administration et police, les opposants craignent une confiscation de leur révolution et réclament des contre-pouvoirs. «Les vieux caciques sont dans l’arrière-cour», prévient M. Marzouki. Et en province, les troubles persistent, du saccage de la sous-préfecture de Kasserine (centre) aux heurts meurtriers début février à Kef (nord-ouest) après une manifestation contre le chef de la police. Signe de l’inquiétude, l’armée a rappelé ses réservistes. Impatients aussi, les Tunisiens demandent tout, tout de suite, à un gouvernement dépassé. L’explosion sociale n’est jamais loin. Du nord au sud, les manifestations sont quotidiennes pour demander un emploi, un meilleur salaire, un toit. «La lutte continue et il ne faut pas oublier les miséreux qui ont été le moteur de la Révolution», prévient Azyz Amany. Car tout le monde ici se souvient que tout est parti, le 17 décembre, de l’acte isolé et désespéré du jeune chômeur Mohamed Bouazizi qui s’est immolé par le feu.

  Deborah Pasmantier (AFP)

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