ALM : Comment est née l’idée de composer ces belles chansons imprégnées de l’univers des grands philosophes et poètes soufis ?
Abdelwahab Doukkali : Quelques mois avant le festival des musiques sacrées de Fès, j’ai été contacté par le wali du Grand Casablanca, M. Kabbaj qui m’a sollicité de préparer un concert pour cette grande occasion. Je ne voulais pas présenter, comme font la majorité des artistes invités, un ancien répertoire qui n’a rien à voir avec le concept du festival, à savoir le sacré. Je voulais offrir une œuvre exceptionnelle et qui traduit fidèlement l’âme du festival.
Que vous a apporté cette nouvelle aventure artistique?
Cette aventure m’a apporté un énorme enrichissement, un nouveau savoir qui s’ancre dans notre société arabo-musulmane, puise dans la philosophie soufie et repose sur des valeurs de paix, d’humilité et d’amour. J’ai retrouvé les grandes valeurs de notre civilisation arabo-musulmane. C’était une rencontre heureuse avec des philosophes et poètes à travers des ouvrages de qualité.
Combien de temps cette aventure a-t-elle duré ?
Une quarantaine de jours, pour sélectionner les vers qui allaient être la trame de mes compositions. Et il m’a fallu huit mois pour composer mon œuvre. Quand vous prenez un imam Chafiï par exemple, c’est énorme comme création poétique, Omar Al Khiyyame , c’est plus de l80 quatrains…
Il fallait que je choisisse les poèmes tout en respectant l’esprit des poètes, les rimes et le contexte dans lequel ont été écrits les poèmes.
En composant ces douze chansons, aviez-vous en esprit les 12 siècles de la fondation de Fès ?
C’est étrange. Au début j’avais prévu 13 chansons. C’est par superstition que j’ai laissé tombé ce chiffre impair pour le pair. Ce qui est étrange, c’est que j’ai fait 12 chansons, j’ai donné mon concert le 12 juin et ça a coïncidé avec les 12 siècles de la fondation de la ville de Fès. Si vous multipliez 12 par trois, ça vous donne 36 et 3+6 vous fait 9. J’ai fui le nombre impair, pour me retrouver sans m’en rendre compte en plein dedans. Je suis né le 2 janvier 1941, deux plus un du mois de janvier, ça fait trois et 1+9, ça fait 10 et 3, ça fait 13 et 1+3 ça fait 4+ 5 ça fait 9. Depuis je me dis que le chiffre 9 va être mon porte bonheur. (Rires).
Etes-vous satisfait de votre œuvre ?
Je suis très minutieux et très exigant et je remercie Dieu de m’avoir aidé à présenter une musique qui a interpellé mon public.
Qu’est-ce que ça vous fait de recevoir les clés de la ville de Fès?
Je n’oublierais jamais ce moment. C’est un souvenir qui restera gravé dans ma mémoire. Ce qui me désole, c’est l’absence des journalistes internationaux pendant les conférences données par les artistes marocains.
Quelle est la place du soufisme dans la société d’aujourd’hui?
Dans un monde régie par la soif de l’argent, du profit et du pouvoir, nous avons tellement besoin de cette culture et de ce savoir qui repose sur les valeurs du partage, du dialogue, de la compréhension, de la spiritualité, de la sérénité…
Abdelwahab Doukkali en quelques lignes
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