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Déficit en logements: Une baisse en trompe-l’œil

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Plus de 725.000 logements sociaux ont été conventionnés entre l’Etat et les professionnels sur les 5 dernières années. Mais à examiner le nombre d’unités qui sont effectivement arrivées sur le marché sur la période on est bien loin du compte.

Lorsque le ministère de l’habitat a dévoilé, il y a quelques jours, son bilan pour la période 2012 à 2016, une grande réalisation a été mise en avant: la réduction de moitié du déficit en logements sur la période. Celui-ci passe ainsi de 840.000 à 400.000 unités attendues pour la fin d’année. Avec cela, Nabil Benabdellah tient une des grandes promesses formulées au début de son mandat.

Seulement, parallèlement à son objectif de réduction du déficit, le ministère avait aussi déterminé des cadences de production annuelle à atteindre pour chaque segment de logements (habitat à 140.000 DH, à 250.000 DH…), permettant, au delà de la réduction du besoin global en habitats, de répondre convenablement aux besoins des différentes catégories de la demande. Et lorsque l’on analyse les réalisations du ministère sous cet angle, il apparaît que l’on est loin des objectifs.

Lorsqu’il a pris les rênes de l’Habitat, le ministre avait d’abord estimé qu’il fallait produire 80.000 logements sociaux annuellement, soit théoriquement 400.000 unités entre 2012 et 2016 pour couvrir tout le besoin sur le segment. Avec l’engouement qu’a suscité le logement à 250.000 DH de la part des promoteurs, depuis son lancement, l’on pourrait penser que les objectifs ont largement été dépassés. Effectivement, plus de 725.000 logements sociaux ont été conventionnés entre l’Etat et les professionnels sur les 5 dernières années. Mais à examiner le nombre d’unités qui sont effectivement arrivées sur le marché sur la période on est bien loin du compte. Au lieu de l’objectif annuel de 80.000 unités, le rythme affiché sur les dernières années n’a jamais dépassé les 60.000 logements produits. On en est même resté très loin la plupart du temps. En tout, l’objectif quinquennal n’a été rempli qu’à moitié avec un peu plus de 200.000 habitats achevés depuis 2012. Le plus préoccupant est que même avec cette cadence en dessous de l’objectif, les promoteurs sont aujourd’hui nombreux à accumuler des stocks d’invendus à travers tout le territoire national. Ce qui porte à croire que la production a été mal orientée sur le plan géographique et que l’on a construit là où il n’y avait pas nécessairement un besoin. Il demeure dans tout cela que des ménages réellement demandeurs de logements à 250.000 DH ne trouveront pas chaussure à leur pied en l’état actuel des choses.

Le retard accumulé en matière de logements pour la classe moyenne est encore plus marqué. L’Habitat avait calculé en 2012 que 20.000 unités de ce type étaient nécessaires annuellement pour accompagner le besoin exprimé sur le segment, soit 100.000 à achever entre 2012 et 2016. Au lieu de cela, le dispositif étatique du logement pour la classe moyenne, qui n’a démarré effectivement qu’en 2013, n’a encore induit aucune production, seules ont été signées des conventions à ce jour. Dans le lot, l’aménageur public Al Omrane s’engage à réaliser 3.680 unités et les promoteurs privés réunis au sein de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (Fnpi) ont signé un contrat-cadre pour réaliser 20.000 unités.

Mais il est très peu probable que ces derniers passent à l’action car ils ont conditionné leur engagement par la mise en place d’avantages pour le dispositif, concernant notamment la verticalité. Or ces dispositions ne semblent toujours pas être à l’ordre du jour. Bien sûr, il reste la production de logements intermédiaires réalisée en dehors du dispositif étatique pour la classe moyenne, mais même en prenant en considération ces achèvements on reste très en dessous des objectifs. Sans compter que les prix pratiqués pour ces unités ne correspondent pas toujours au pouvoir d’achat de la demande.

Si l’on s’intéresse enfin au logement à 140.000 DH, le département de tutelle tablait sur une cadence de production annuelle de 9.000 unités, soit en théorie un total de 45.000 unités qui devaient arriver sur le marché sur les 5 dernières années. Le bilan du ministère présenté ces derniers jours fait état d’une production de 35.508 logements, mais il s’agit là des achèvements comptabilisés depuis 2008.

Si l’on ne prend en considération que la production pour la période 2012 à 2016, l’on dépasse difficilement les 15.000 unités effectivement produites, selon les chiffres officiels. Ce sont donc plus de 30.000 habitats qui manquent à l’appel par rapport aux plans initiaux du ministère. Certes, le département de Nabil Benabdellah a trouvé la parade pour compenser cette production en dessous des attentes. Le logement à 140.000 DH étant en majeure partie destiné à reloger des bidonvillois dans le cadre du programme «Villes sans bidonvilles», l’on s’est assuré de continuer à répondre aux attentes de cette population en mettant à sa disposition des lots.

La production de ce type d’unités essentiellement par l’aménageur public Al Omrane, a en effet tourné à plein régime sur les dernières années (21.600 lots produits en 2012, 21.500 en 2013, 23.000 en 2014…). Mais ils sont plusieurs aujourd’hui à se demander si l’on peut persister dans cette voie dans un contexte de rationalisation de la dépense publique et de raréfaction du foncier.

En somme, si l’Habitat a fait baisser le déficit en logements entre 2012 et 2016, la consistance de la production sur la période laisse penser que l’on n’a pas pour autant convenablement répondu aux besoins de tous les segments de la demande.

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Certains segments de la demande n’ont même pas été couverts

Si le ministère de l’habitat n’est pas parvenu à tenir ses objectifs de production sur certains dispositifs de logements, d’autres types de produits, promis au début du mandat de Nabil Benabdellah, n’ont même pas pu voir le jour. Il en est ainsi du programme d’habitat destiné aux jeunes et aux jeunes ménages. Bien que la demande pour ce type de logements soit réelle, le ministère n’est pas allé au bout de sa démarche pour faire adopter un dispositif qui en favorise la production. Il en est de même pour le développement de l’offre en matière d’habitat locatif. Le département de tutelle a certes révisé la loi 67-12 organisant les rapports contractuels entre les bailleurs et les locataires des locaux à usage d’habitation pour équilibrer les rapports entre parties et favoriser la mise en location par les propriétaires de biens. Aussi, un dispositif pour le locatif social a été adopté depuis la loi de Finances 2013 avec un loyer encadré et des incitations pour les investisseurs dans ce type de produit. Mais de l’avis des professionnels, ces mesures restent insuffisantes pour réellement libérer le potentiel du marché locatif. Notons d’ailleurs que le locatif social n’a à ce jour attiré aucun investisseur.

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Par: Reda Harmak

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