Economie

Le plaidoyer de Mohamed Karia

ALM : L’Assamat a tenu à la fin du mois de mai son assemblée générale à Casablanca. À cette occasion, vous avez évoqué nombre de problèmes liés au fonctionnement des ports au Maroc, notamment celui de Casablanca…
Mohamed Karia : Depuis quelques années, les différentes instances intéressées par l’industrie portuaire n’ont cessé d’examiner les problèmes du port de Casablanca qui commencèrent à se manifester vers 1970, et malheureusement les diverses mesures et solutions proposées n’ont jamais abouti. Comme vous le savez, les ports sont le premier instrument au service du commerce extérieur du pays, leur rôle est important en raison de l’impact des coûts de transport par voie de mer pour une valeur de plus de 2.000 milliards de centimes de fret maritime. Ce coût très élevé se décompose comme suit : coût du navire, coût d’amortissement du port, coûts de prestations fournies au navire, amortissement des installations fixées au port et coûts des prestations fournies à la marchandise.
Vous militez donc pour une réduction des coûts…
Pas seulement. La réforme que nous proposons est globale. Cela dit, il est vrai qu’une exploitation rationnelle des postes peut entraîner une baisse considérable du coût global du transport maritime. Les études faites dans ce domaine par la CNUCED, le BCEOM, les Armements Nationaux, les Agents Maritimes n’ont pas été suivies d’effet. Par ailleurs, l’industrie portuaire ayant un caractère particulier, liée à l’activité des navires, il est important pour un port de pouvoir accueillir les navires dès leur présentation et leur assurer un séjour aussi bref que possible. Cela suppose une infrastructure appropriée aux trafics nationaux, des moyens et des organismes d’intervention efficaces pour assurer les mouvements de navires et la manutention des marchandises. Ces conditions n’étant pas remplies dans nos ports à cause d’un système bureaucratique paralysant et d’un esprit de travail administratif incompatible avec les exigences du trafic maritime, il en résulte une mauvaise productivité portuaire, un surenchérissement du prix de transport et du stockage des marchandises et de nombreux dommages occasionnés à celles-ci.
Comment dépasser cette situation préjudiciable à vos yeux à l’activité des navires ?
Il y a lieu de reconsidérer l’ensemble organisationnel portuaire, de créer des autonomies portuaires sous contrôle de l’État et de décentraliser au maximum la gestion des aires de stockage et des moyens de manutention mobiles. À mon avis, il serait judicieux de séparer le port en deux secteurs : l’infrastructure portuaire avec ses accès, son plan d’eau, sa profondeur, ses quais d’accostage, ses installations de chargement et de déchargement et les moyens mobiles d’organisation de la manutention portuaire depuis les navires jusqu’à la sortie du port (cavaliers gerbeurs, chariots élévateurs, remorques, tracteurs, divers matériels de manutention). C’est sur la base de ces deux fonctions que devrait être établie une nouvelle organisation.
Le ministère de l’Equipement est-il sensible à vos revendications ?
Il ne suffit pas d’être sensible aux revendications, encore faut-il les matérialiser. Suite aux grèves des dockers de l’ODEP, dont l’une a duré plus de 14 jours début 1999, la Direction du port a présenté des propositions d’organisation concernant en partie l’industrie portuaire et les entreprises de stevedoring opérant dans les différents ports et notamment le port de Casablanca où les sociétés privées de manutention furent diabolisées en leur attribuant toutes les défaillances d’exploitation portuaire.
Le texte qui a été présenté aux manutentionnaires prévoit une répartition de la masse des dockers (800 personnes) entre les différentes sociétés prétendant que cette manière de faire introduirait donc plus de discipline et responsabiliserait davantage les dirigeants des sociétés de stevedoring. Le texte stipule, entre autres, que pour faire passer cette réforme, ces manutentionnaires doivent garantir l’emploi à l’ensemble de la masse pendant une période de deux années.
Pour la profession, cette nouvelle organisation ne changerait rien à la situation actuelle et l’ensemble des manutentionnaires aurait souhaité que la réforme soit en accord avec la réglementation qui veut que chaque société ayant son propre personnel ne serait nullement touchée par les problèmes des autres sociétés qui seraient appelées à fermer leur porte pour des raisons de perte de trafic ou de sureffectif.
La situation, aujourd’hui, se complique, d’une manière vertigineuse, avec comme conséquence fâcheuse les pertes de trafic au profit de la concurrence espagnole et italienne.
À votre avis, la performance de l’armement national passerait par la privatisation complète de certains services comme la manutention, l’aconage, et le magasinage, détenus par l’ODEP…
Absolument. D’ailleurs, j’avais présenté le projet de loi complet dans ce sens lors de mon passage au Parlement. Avec cette réforme, je suis sûr que nos ports retrouveraient leur fonctionnalité et leur performance qui caractérisent les ports du monde entier.
Où en est cette proposition de loi?
Elle est toujours dans les cartons du Parlement.

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