La privatisation de Gaz de France, dont les députés ont commencé à débattre jeudi, est destinée à préparer son mariage avec Suez, une union née dans un esprit de "patriotisme économique", qui donnerait naissance au premier groupe gazier européen et au 5ème producteur d’électricité. Ce projet de fusion, annoncé en février par le gouvernement comme un moyen de contrer une éventuelle OPA du groupe énergétique italien Enel sur Suez, a d’abord illustré la volonté de "patriotisme économique" prônée par Paris depuis 2005 pour contrer les achats hostiles de fleurons industriels français. Enel n’a pas mis sa menace à exécution, mais a redit récemment son intérêt pour des actifs que l’une ou l’autre entreprise pourrait céder. «Enel n’a pas disparu», affirmait en juillet le P-DG de Suez, Gérard Mestrallet. Alors que l’Italie avait très mal accueilli le projet au début de l’année, le Premier ministre Dominique de Villepin et son homologue italien Romano Prodi ont annoncé vendredi à Rome un renforcement de leur coopération dans le domaine énergétique. Les promoteurs de la fusion brandissent moins souvent le risque Enel mais font valoir la nécessité d’une telle union dans un contexte européen de l’énergie en pleine concentration, en citant notamment l’accord conclu en août entre le géant russe Gazprom et l’algérien Sonatrach. C’est aussi l’argument utilisé par le gouvernement pour justifier la privatisation devant les députés, qui n’auront pas à se prononcer directement sur la fusion. Que ce soit avec Suez ou un autre groupe, GDF ne peut pas "rester isolé", affirme le ministre de l’Economie, Thierry Breton. Les patrons des deux groupes, Gérard Mestrallet (Suez) et Jean-François Cirelli (GDF), assurent que leur projet était préparé de longue date et mettent en avant leur complémentarité, Suez apportant son expérience dans l’électricité et la gestion de l’eau, GDF son savoir-faire dans toute la chaîne gazière.
• Anne Renaut (AFP)