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L’Algérie est-elle dans le coup ?

© D.R

L’attaque de la garnison militaire de Lemghey, située  à 450 kilomètres au Nord de Zouératt, dans une zone qu’écument inlassablement les principaux groupes armés de la région, intervient en plein processus de rapprochement entre Nouakchott et Rabat.
Le ministre marocain des Affaires étrangères, Mohamed Benaïssa, aura été d’ailleurs l’un des premiers officiels à fouler le sol mauritanien, porteur d’une lettre de condoléances de SM le Roi au gouvernement et au peuple mauritaniens.
Les bonnes relations entre les deux chefs d’Etat ainsi que le niveau des relations politiques s’accompagnent sur un autre registre, d’une détérioration visible, à partir de 1999, des rapports sur l’axe Alger-Nouakchott. Le président Abdelaziz Bouteflika aurait fait attendre plus qu’il n’en faut un haut émissaire porteur d’une lettre du président mauritanien. Bref, ce coup de froid se serait aggravé depuis deux ans. Personne n’a oublié la série de tentatives de coups d’Etat en Mauritanie, entre août 2003 et septembre 2004. Pendant quatorze mois, le pays allait vivre au rythme des «Cavaliers du Changement», un groupe de militaires mécontents dont certains membres ratissent avec aisance les larges de bandes de terre séparant la Mauritanie de l’Algérie, soutenus sans doute par les groupes armés qui prospèrent dans la région.
L’attaque de Lemghey n’est pas sans rappeler ces circonstances. Qui a intérêt à destabiliser la Mauritanie?  
Pour les analystes, ces intenses activités diplomatiques entre la Mauritanie et le Maroc dérangent le puissant voisin algérien et ses protégés du Plisario. Ceux-ci sont d’ailleurs très actifs dans la région de Zouératt (théâtre de l’attaque), qu’ils connaissent bien, puisque c’est là qu’ils écoulent une partie de l’aide humanitaire des camps de Tindouf. C’est surtout par cette région du Nord mauritanien que les bandes séparatistes attaquaient la Mauritanie entre 1975 et 1979. D’où pour la plupart des observateurs, la retenue dans l’attribution de l’attaque de Lemghey au GSPC.
Soucieux de son équilibre géostratégique, le gouvernement mauritanien a d’ailleurs tardé avant de désigner du doigt cet étrange GSPC.
Une décision prise 48 heures après les événements et qui découle autant  des premiers témoignages recueillis après l’attaque que des  considérations géopolitiques.
«Le GSPC est un meurtrier trop parfait», commente un observateur averti de la scène régionale.
Aussi, les  deux revendications successives du GSPC via internet n’ont convaincu ni les observateurs internationaux ni les services secrets des  pays de la zone. Pour cause, le Groupe salafiste pour la Prédication et le combat est inactif depuis 2004, avec la mort de son chef, Nabil Sahraoui, tué par l’armée algérienne en petite Kabylie, suivi de celle du numéro deux Amari Saïfi dit Abderrezak le Para, capturé par des rebelles tchadiens en 2004 dans le Tibesti, puis extradé vers l’Algérie.
Des pertes sèches qui ont contraint ce groupe à se reconvertir dans la contrebande des cigarettes, de l’essence et des armes,  sous la houlette de son nouveau leader, MokhtarBelmokhtar dit Belaouar (le Borgne). Dans la vaste appendice des petits no man’s land formés entre l’Algérie, le Mali et la Mauritanie, ce personnage surnommé aussi le «Parrain Marlboro», flirte avec certains milieux tribaux et surtout avec les séparatistes du Polisario dont il a été pendant longtemps l’un des fournisseurs attitrés.
Si Belmokhtar est l’ami des polisariens, ses prédécesseurs à la tête du GSPC sont en général d’anciens gradés de l’armée algérienne avec laquelle une certaine alliance objective a toujours été maintenue. La preuve, en 2003, alors que le gouvernement algérien faisait antichambre à Washington pour obtenir la levée de l’embargo sur les armes , un ancien officier des forces spéciales de l’armée algérienne, officiellement et comme l’écrit “le Monde Diplomatique”,  passé à la guérilla du GSPC, donne au régime de Bouteflika un cadeau sur un plateau d’or. Cet homme s’appelle Abderrazak le Para, ancien officier des forces spéciales de l’armée algérienne, et ancien chef des gardes du corps de l’ancien ministre algérien de la défense, Khaled Nezzar, entre 1990 et 1993.
À la veille de l’arrivée des négociateurs américains, une attaque d’un convoi militaire par le GSPC fait une quarantaine de morts. La presse algéroise commente l’événement en l’attribuant à un nouveau «Ben Laden du désert». Suffisant pour que les américains signent l’allègement de l’embargo.
Deux mois plus tard, alors que Alger cherchait une aide logistique et financière de Washington, nouveau coup de force de Para : entre le 22 et le 23 mars, trente deux touristes européens sont enlevés dans le désert algérien. Nul jusque-là ne saura comment l’Armée algérienne a obtenu leur libéralisation des mains du GSPC sans avoir tiré un seul coup de feu. L’hebdomadaire Paris Match n’hésitera pas à dire que le Para aurait été chargé d’implanter Al Qaida dans le Sahara : Objectif, obtenir ce précieux soutien de Washington.
Aujourd’hui, il s’agit sans doute, derrière cette attaque attribuée au GSPC, de rappeler Nouakchott à l’ordre.

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