Société

Comment les Musulmans ont fêté l’Aïd Al Adha à Montréal: Jamais sans mon mouton!

© D.R

La fièvre du mouton est contagieuse et dépasse nos frontières. Nouvellement installée dans la province du Québec, j’étais curieuse à l’approche de l’Aïd Al Adha de voir comment la communauté musulmane fête cette tradition religieuse dans cet environnement interculturel où il y a place à tout. Aussi si l’abattage à domicile est interdit, des abattoirs privés ouvrent leurs portes trois jours durant à la communauté musulmane et organisent des abattages.

Certains, plusieurs semaines à l’avance, lancent des offres en ligne. Il faut dire que pour les producteurs d’agneaux du Québec cela représente environ 4% de leurs ventes annuelles de plus de 65.000 agneaux lourds. Le jour de l’Aïd, j’ai décidé d’aller voir cela sur le terrain dès les premières heures de la matinée. Mon choix se porta sur un abattoir dans la région de Montérégie à une cinquantaine de kilomètres environ au sud-ouest de Montréal.   

                                                       

9 heures du matin, le champ transformé en parking à proximité d’un abattoir est bondé de voitures.  Difficile de trouver une place. Un sexagénaire, turban sur la tête, joue le rôle de gardien de voitures et tente de placer tout le monde. C’est un peu le cafouillis. Pas de file, chacun tente de stationner comme il peut sur le site bordé de champs et traversé par une route étroite. Dès ma descente de voiture, je fus frappée par les odeurs des déchets organiques de moutons. Sous une pluie fine, des familles entières se dirigeaient vers l’entrée de l’abattoir.

A l’intérieur, femmes et hommes de tout âge et enfants attendaient au milieu d’un hangar dont la toiture avait visiblement besoin d’être réparée. Des gouttes d’eau tombaient du plafond. Le sol mouillé et souillé de sang signifiait que l’abattage avait déjà commencé. Mais l’état des lieux préoccupait peu les visiteurs du jour. Ceux qui venaient d’arriver après avoir obtenu un ticket attendaient en groupe l’appel de leur numéro pour choisir leur mouton et assister à son sacrifice.

Les premiers arrivés étaient déjà de l’autre côté de la chaîne. Là aussi un groupe de personnes regardait les bouchers dépecer les moutons, les vider avant de les découper pour les livrer au client au prix de 15,40 dollars Kg. Mais le rythme était vraisemblablement très lent. A 9 h 45 mn, à peine une vingtaine de moutons étaient sacrifiés et livrés alors que près de 300 tickets avaient déjà été distribués. «En arrivant dans la nuit aux alentours de minuit j’ai été classé 35ème dans la liste. Mais ce matin à 10 h je n’ai pas encore eu mon mouton», raconte Abdallah, un Algérien.

Normal, l’abattage n’avait commencé que tout juste deux heures avant. Visiblement, les centaines de personnes venues sacrifier le mouton allaient passer la fête sur les lieux avant de repartir tard dans la nuit avec la bête en pièces détachées. Pour répondre à la demande, l’abattoir allait trois jours durant être consacré uniquement à l’opération d’abattage pour la communauté musulmane.

Pour éviter les longues heures d’attente au sein des abattoirs autorisés, certains optent pour l’abattage clandestin ailleurs.  Un sondage réalisé sur l’opération révèle  que «lorsque le sacrifice a lieu, il se déroule la moitié du temps dans un abattoir, contre 44% à la ferme et 7% à la maison». Les éleveurs d’agneaux du Québec semblent cependant, face aux amendes dissuasives et les condamnations ces dernières années, être devenus plus frileux à l’idée d’ouvrir leurs fermes pour la fête musulmane du sacrifice. 

Un éleveur d’ovins, ayant permis à plusieurs reprises à des musulmans d’égorger des agneaux chez lui, a écopé d’une amende de 8.000 $ pour avoir ainsi exploité un abattoir clandestin. Le Québec compte entre 200.00 et 250.000 musulmans, et nombre d’entre eux perpétuent le rite. Des mesures en amont à travers un meilleur accompagnement et soutien ainsi qu’une multiplication des infrastructures pour l’opération d’abattage éviteraient qu’elle se déroule souvent en cachette et dans une certaine anarchie.

Montréal
Malika Alami

 

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