Société

Dossier : Cadrage : Réinventer l’État

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L’affaire de la hausse du ticket du bus (de 0,50 centimes) à Casablanca, décidée le 1er octobre par les transporteurs privés a donné lieu à un spectacle pour le moins irresponsable. Les autorités de la ville ont dénoncé cette décision comme étant prise de manière unilatérale par les intéressés. Faux, rétorquent ces derniers par la voix du président de la section du transport urbain lors d’une conférence de presse. À y regarder de plus près, les arguments avancés ne sont pas irrecevables au regard des augmentations qu’a connues certains postes de dépenses : gasoil, pneumatique, smig, pièces de rechange, assurances. Il faut bien que ces hausses soient répercutées sur le tarif du trajet.
Certes, les responsables de la ville ont le beau rôle en mettant face-à-face les clients avec les concessionnaires privés dans une vision des choses par trop manichéenne. Nous sommes les bons soucieux du pouvoir d’achat des citoyens et eux les méchants qui ne pensent qu’à leurs intérêts propres. Le problème est trop complexe pour se poser en ces termes réducteurs. On peut certes arguer que le confort qui laisse beaucoup à désirer des autobus des entreprises privées de transport ne justifie pas une telle augmentation. Mais les pouvoirs publics, c’est leur rôle, n’ont qu’à imposer à ces dernières de se conformer aux normes de sécurité et de commodité nécessaires dans le cadre d’un cahier des charges engageant l’ensemble des parties. Dans la situation actuelle marquée par un laxisme chronique, c’est l’usager qu’on fait rouler.
Il est vrai qu’un ticket à 3,50 Dhs est trop cher pour les abonnés au transport en commun qui se recrutent pour la plupart parmi la classe défavorisée et la communauté laborieuse. S’il est acquis que les entreprises privées ne font pas de la charité, c’est aux autorités de faire en sorte que le prix du ticket soit abordable par un système de subvention comme cela se fait ailleurs. Assurer un transport urbain de qualité et moins cher, au même titre que l’enseignement et la santé, fait partie des missions régaliennes de l’État.
Chez nous, c’est l’inverse qui s’est produit. L’État marocain a non seulement délaissé ces secteurs vitaux en les maintenant dans une situation de semi-faillite, mais il s’est mis en tête de se désengager de certains d’entre eux comme on se débarrasserait d’une patate chaude. Le cas du transport est à cet égard significatif. Comment dans ces conditions favoriser la culture civique chez la population alors que la majorité écrasante ne reçoit presque rien en retour de son gouvernement ? Elle doit payer de sa poche le prix fort pour la scolarisation des enfants, pour obtenir des soins médicaux dignes de ce nom, pour se procurer un logement décent ou pour l’usage du train et le bus. Autrement dit, quels sont les sacrifices consentis réellement par l’État pour le soutien des couches qui en ont vraiment besoin ? Les gouvernants sont invités à revoir leur politique de concession des services publics où au nom de la protection du pouvoir d’achat des gouvernés ils doivent au contraire renforcer leur présence au lieu d’en démissionner. Il ne faut pas que la mauvaise gestion et la gabegie qui ont miné pendant des décennies certaines régies servent d’alibi à leur transfert au secteur privé. Il y a vraiment urgence à réinventer l’État.

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