Société

Dr Abderrazak Moussaïd : «12% des hommes présentent une dysfonction érectile de façon permanente»

© D.R


ALM : Comment peut-on définir l’impuissance sexuelle chez l’homme et quels sont ses symptômes ?
Dr Abderrazak Moussaïd : Le terme d’impuissance sexuelle est obsolète, car il est péjoratif et maximaliste. On parle actuellement de «dysfonction érectile». Cette pathologie est définie par «l’incapacité persistante d’un homme à obtenir ou maintenir une érection pénienne suffisante pour permettre une relation sexuelle satisfaisante». La tendance actuelle est de bien différencier les dysfonctions érectiles minimes (souvent transitoires, reflet d’une modification de l’humeur ou d’un épisode dépressif passager), des dysfonctions érectiles significatives cliniquement, c’est-à-dire les dysfonctions érectiles modérées (parfois très gênantes et source d’une souffrance importante) et sévères. Cependant, il faut différencier la dysfonction érectile des autres dysfonctions sexuelles très souvent intriquées : comme la baisse du désir, l’éjaculation précoce, des difficultés orgasmiques.

Existe-t-il des statistiques mesurant l’ampleur de ce phénomène dans notre société ?
Au Maroc, les dernières statistiques qui datent du début des années 2000, montrent que les pannes sexuelles surviennent chez 55% des hommes et 10 à12% présentent une dysfonction érectile de façon permanente. Des études internationales sont très disparates et montrent que la dysfonction érectile survient entre 11 à 80% selon quelle soit modérée, sévère ou transitoire.

Quel est l’impact de ce problème sur la vie d’un couple ?
L’homme atteint de cette pathologie va se sentir replier sur lui- même, déprimé et commence à éviter les relations sexuelles mais lorsqu’il sera obligé d’accomplir le devoir conjugal, il va faire de l’érection un objectif qui sera difficile à atteindre. Quant à la femme, tantôt elle réagit positivement en aidant son époux à surmonter son handicap, tantôt elle réagit négativement en accusant son mari d’avoir des relations conjugales. Cette attitude va générer en lui une angoisse de l’échec qui déclenche un mécanisme contraire à l’érection.

Quels sont les traitements appropriés pour faire face à ce problème?
Les traitements sont multiples et variés. La prise en charge sexologique prend l’homme dans sa globalité. C’est-à-dire que le traitement est en même temps psychothérapique et médicamenteux. Le traitement psychothérapique consiste à éviter les situations anxiogènes par une thérapie cognitive et comportementale. Le traitement pharmacologique repose sur un arsenal thérapeutique bien varié: vasodilatateurs: Yohimbine, inhibiteurs des PDE5= pilules bleus et dérivés, associés à des tranquillisants ou antidépresseurs à petites doses, injections intra-caverneuses de produits érectogènes, pompes à érection allant jusqu’à la mise en place de prothèses péniennes quand il y a échec du traitement oral. Ce qu’il faut retenir, c’est que le traitement pharmacologique est prescrit dans un cadre thérapeutique bien précis qui comprend une phase de traitement, suivie par une phase de consolidation, puis enfin la phase de sevrage c’est-à-dire là où le médecin peut arrêter les médicaments (si il n’y a pas de causes organiques évidentes) sans qu’il ait rechute.


 Les causes des dysfonctions érectiles
Selon Dr Moussaïd Abderrazak, les causes de la dysfonction érectile dans notre pays ne diffèrent en rien de celles qui existent ailleurs. Il y a une vingtaine d’années, la seule certitude était que la dysfonction érectile augmente significativement avec l’âge. Sa fréquence et ses facteurs de risque étaient mal connus, d’où un classement simpliste en causes organiques et/ou psychogènes. Aujourd’hui, les causes sont nombreuses. Il convient de relever tout d’abord les facteurs de risques médicaux parmi lesquels figurent les problèmes vasculaires.
Le diabète est de loin la cause la plus fréquente de la dysfonction érectile, il multiplie par trois le risque de la survenue de cette pathologie. Il y a également les troubles du métabolisme lipidiques. L’augmentation du cholestérol et des triglycérides favorisent la survenue de ce trouble. Le tabagisme, l’obésité et la sédentarité sont aussi des facteurs de risques vasculaires. Il faut aussi noter les risques non vasculaires. Les causes endocriniennes sont dominées par la baisse de la testostérone (hypogonadisme) et l’augmentation de la prolactine qui ne représentent que 3 à 6% des étiologies. L’hypogonadisme peut être la cause ou la conséquence de la dysfonction érectile. La pathologie obstructive du bas appareil urinaire comme l’hypertrophie bénigne de la prostate est aussi un facteur de risque. L’insuffisance rénale chronique augmente le risque des troubles de l’érection, car des malades sont hypertendus et diabétiques. Les troubles du sommeil sont aussi incriminés dans la survenue de cette pathologie. Les traumatismes : trauma-crâniens, médullaires. La dysfonction érectile post-traumatique est marquée par un retentissement psychologique majoré par des séquelles fonctionnelles (mécaniques ou douloureuses) et environnementales (problème de travail, argent, assurance). Les troubles neurologiques (dégénératives, inflammatoires, toxiques, médicamenteuses) peuvent entraîner une dysfonction. Pour ce qui est des troubles psychologiques ou psychiatriques : la dysfonction érectile survient plus facilement chez les sujets anxieux, angoissés, dépressifs, stressés ou ayant des troubles de la personnalité. Les problèmes existentiels et environnementaux (conjugaux, familiaux, financiers, professionnels), une ignorance de la sexualité et des antécédents d’abus sexuels dans l’enfance, sont tous des facteurs prédisposants. La plupart des troubles psychiatriques s’accompagnent de dysfonction érectile.Par ailleurs, de nombreux médicaments sont incriminés dans la survenue de la dysfonction érectile tels que les antihypertenseurs, les médicaments contre le cholestérol, les neuroleptiques, les hormones ( anti-androgènes, les anabolisants…).
A côté des risques médicaux, il existe plusieurs facteurs non médicaux. L’âge, les maladies associées et leurs traitements, les modifications hormonales et environnementales, le mode de vie sont autant de paramètres qui modifient la capacité érectile. Mais avec l’âge, le désir et la demande sexuelle évoluent aussi vers une sexualité moins performante et plus tendre.

Articles similaires

Société

Education: 60.000 coins de lecture seront installés dans les écoles primaires

Les élèves du primaire auront accès à une bibliothèque de classe avec...

Société

HCR : 18.241 réfugiés et demandeurs d’asile au Maroc à fin mars 2024

Leur nombre a légèrement régressé par rapport au mois de février

SociétéUne

L’UM6P présente au sommet présidentiel de l’Alliance U7+  

L’Université Mohammed VI Polytechnique a pris part, les 11 et 12 avril...

Société

Ait Taleb présente un plan d’action pour la prévention des maladies non transmissibles

85 % des décès sont attribuables à ces maladies