Société

Un coup de bâton fatal

© D.R

À son trente-sixième printemps, Hafida croyait toujours en l’amour de son époux, bien que des dizaines d’années soient passées depuis leur première rencontre. Elle se souvenait, certainement, de ce jour, lorsqu’elle a été croisée par Ahmed. Il remarquait son passage presque quotidien, près de chez lui à Khemisset. Elle n’a jamais prêté attention à ses regards qui ciblaient son corps, jusqu’au jour où il s’est présenté devant elle pour lui demander à lui parler. De quoi ? Elle croyait au départ qu’il est seulement l’un de ces jeunes garçons, chômeurs, qui se sont habitués à croiser les jeunes filles et à leur chuchoter des mots mielleux pour passer quelques bons moments. “Laisse-moi tranquille“, lui a-t-elle répliqué. Il lui a demandé juste une minute pour lui exprimer ce qu’il pensait d’elle. Et en une minute, il lui a exprimé tout ce qu’il voulait lui dire. “Je t’aime et je veux te demander au mariage“. C’est la seule phrase qu’il lui avait dit sans un mot de plus. Perplexe, elle s’est tenue sur place pour quelques secondes avant de partir sans répondre.
Le lendemain, Ahmed l’a croisée une fois encore pour lui demander de lui permettre d’aller chez sa famille. Sa réponse était un sourire. Le surlendemain, il s’est présenté devant elle une troisième fois pour lui affirmer que ses parents rendront visite le vendredi aux siens pour la demander au mariage. Et sa famille l’a accepté comme mari et ils ont fixé la date de la nuit de noces.
En quelques mois, Hafida et Ahmed se sont retrouvés sous le même toit au quartier Essaâda. Ils combattaient pour affronter les épreuves de la vie, notamment que leur foyer s’est égayé d’un premier enfant. Puis un deuxième et un troisième. La vie est devenu de plus en plus pénible surtout en dépenses.
Personne ne conçoit ce que lui dissimule le destin. Ahmed n’imaginait pas que sa vie sera pleine de problèmes en quelques mois, surtout après le quatrième accouchement de Hafida en décembre 2003. En effet, cette dernière n’a jamais consulté un médecin et n’a fréquenté l’hôpital de la ville que lorsqu’elle voulait accoucher ou pour faire les vaccinations à ses enfants. Mais quand elle s’y est rendue la dernière fois, le médecin lui avait affirmé qu’elle était atteinte d’anémie.
Au fil des mois, elle ne pouvait plus travailler. Elle est restée chez elle, à côté de ses quatre enfants. Ahmed n’a plus d’aide aux dépenses quotidiennes. En plus, les frais des médicaments pour sa femme sont devenus un fardeau insupportable. Une situation délicate qui l’a jeté dans le monde de l’alcool. Lorsqu’il empochait une somme d’argent, il achète une bouteille ou deux de vin rouge et se réfugie dans un coin d’une ruelle pour s’enivrer.
Vers la fin de mai dernier, quand il a terminé la deuxième bouteille, il est rentré chez lui. Comme à l’accoutumée, il a trouvé sa femme et ses quatre enfants en son attente. “Vous n’avez pas encore dormi ?“, leur a-t-il demandé alors qu’il titubait. Sa femme ne lui a pas répondu, elle s’est contentée de le dévisager. Et il s’est retourné vers elle pour lui demander pourquoi elle ne lui répondait pas. Aussitôt, elle a commencé à lui reprocher d’avoir gaspillé de l’argent pour s’enivrer, alors qu’ils en avaient besoin. Hors de lui, il a commencé à l’insulter, à lui dire que c’était la facture des médicaments qui prenait le plus de dépenses. Perdant tout contrôle de ses nerfs, elle l’a injurié et l’a qualifié de soûlard. À ce moment, Ahmed a tourné à droite, saisi un bâton qui se trouvait par hasard près de lui et lui a asséné un seul coup au niveau de la tête. Hafida s’est effondrée et a rendu l’âme quelques secondes plus tard. Et comme s’il n’était plus ivre, Ahmed a tenu sa tête entre les mains et a crié au point que ses voisins l’ont rejoint pour savoir ce qui se passait. Quelques temps après, il leur a tourné le dos, les larmes aux yeux et s’est dirigé de son plein grès vers le commissariat de police. Il leur a relaté en détail son histoire avec Hafida et ses quatre enfants qui sont devenus en un clin d’oeil des orphelins.

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