Entre floraison d’informations égyptiennes confuses et multiplication de revendications douteuses, l’enquête sur les attentats de Charm el-Cheikh s’annonce d’être très dure.
Mardi, les autorités égyptiennes ont lavé de tout soupçon six pakistanais. Leurs photos et identités avaient été diffusées la veille, les désignant comme d’évidents suspects.
«Les informations, selon lesquelles ils seraient recherchés en liaison avec l’enquête, sont dénuées de tout fondement», a déclaré le général Mohamed Chaâraoui, le patron des enquêteurs, au quotidien gouvernemental «al-Ahram». Il a, par ailleurs, déclaré que la police n’avait pas été l’origine de la distribution des photos. Il n’a cependant pas donné d’explications concernant l’apparition de ces clichés dans les médias égyptiens et internationaux. L’ambassadeur égyptien à Islamabad, Hussein Haridy, a également publié un démenti, en guise d’excuse auprès du gouvernement pakistanais, ulcéré d’une nouvelle mise en cause après les attentats du 7 juillet à Londres. Divulguée de "sources policières" égyptiennes, la piste "pakistanaise" est donc mort-née. Et par la même occasion, l’hypothèse redoutable pour le régime du Raïs que l’Egypte soit devenue la cible de la nébuleuse al-Qaïda. «Si l’Egypte entre clairement dans le viseur d’al-Qaïda, dont un tiers des cadres sont Egyptiens, cela signifie que la chute de ce régime jugé impie devient sa priorité politique», a estimé un diplomate européen de haut rang. En Egypte, la communication est un sujet extrêmement sensible. Surtout pour des sujets comme les attentats. La communication est aussi tout sauf transparente. En effet, les informations sur l’enquête de Charm el-Cheikh semblent particulièrement confuses. « Il semble que le gouvernement n’ait pas de pistes sérieuses d’où son embarras », a indiqué à l’AFP Diaa Rachwan, spécialiste de l’islamisme au Centre d’études politiques et stratégiques de al-Ahram. Après qu’il eut été fait état, lundi, de sources policières, de la traque ponctuée de tirs, de "deux suspects pakistanais" dans deux villages du Sinaï, le ministère de l’intérieur a dit mardi qu’il s’agissait de la recherche pour interrogatoire d’un bédouin ayant eu, peut-être, partie liée au maquillage d’une voiture utilisée par un des kamikazes.
Une envoyée spéciale de l’AFP ayant sillonné lundi cette région montagneuse proche de Charm el-Cheikh n’avait pu être témoin ni recueillir de témoignages sur une vaste opération de la police contre des suspects. Le bilan des victimes des attentats, le pire carnage perpétré par des terroristes, qu’ait connu l’Egypte depuis des décennies, est aussi très confus. D’un nombre de 88 morts de sources hospitalières, le bilan fourni par le ministère du tourisme a été ainsi abaissé à 64, pour remonter mardi à 67 morts. Le nombre d’étrangers décédés s’éléve à 16, contre 7 auparavant, mais aucune liste précise n’a été établie à ce jour. Une série de revendications contradictoires ont elles aussi compliqué les choses. Après une première revendication d’un groupe lié à Al-Qaïda, un groupe inconnu disant s’appeler "les Moujahidine d’Egypte" a lui aussi rapidement endossé la responsabilité des attaques.
Un troisième groupe islamiste, également inconnu, "Le Groupe de l’Unicité et du Jihad en Egypte" a revendiqué les attaques sur l’Internet. Cette dernière revendication survenue mardi a rendu les observateurs encore plus perplexes.
Dans son communiqué, ce groupe présente les attentats meurtriers comme "une vengeance pour nos frères en Irak, en Afghanistan et en réponse à la guerre contre le terrorisme". "C’est aussi en allégeance aux chefs des moujahidine au sein du réseau Al-Qaïda, cheikh Oussama ben Laden, et cheikh Ayman Al-Zawahiri, que Dieu les garde", ajoute le communiqué dont l’authenticité ne peut être établie.