Il est presque midi. Les parents viennent récupérer leurs enfants à leur sortie d’école. Les fonctionnaires, eux, s’arrangent du mieux qu’ils peuvent pour être là. «Mon mari et moi, nous travaillons toute la journée avec une demi-heure de pause à l’heure du déjeuner. Je me suis arrangée avec ma direction pour pouvoir récupérer ma fille à midi. Son école (privée) ne fait pas d’horaire continu et ne dispose pas de cantine. En plus, pour garder nos enfants entre 12h et 14h, il faut payer la permanence », confie cette jeune maman. En effet, les écoles privées n’adoptent pas toutes l’horaire continu. Il y a celles qui disposent de cantine, qui proposent des menus variés et équilibrés, et celles qui ne se sentent pas concernées par ce changement d’horaire. Résultat : c’est aux parents de se débrouiller.
Nombreuses sont les familles qui souffrent de cette incompatibilité des horaires. Les enfants des écoles publiques sont certainement les plus concernés. Si personne ne vient les chercher, ils restent à l’école. Ou plus précisément aux abords de cette dernière. Ils mangent dans la rue leurs sandwichs froids, souvent préparés la veille. Chose tout à fait inadmissible pour des petits qui n’ont jamais mangé dehors et seuls. Ils ont beaucoup de mal à s’adapter à cette nouvelle situation et surtout beaucoup de gêne à casser la croûte sous le regard des passants. La situation est encore plus inquiétante parce que c’est de la santé des enfants qu’il s’agit aussi. Manger quotidiennement des sandwichs froids est mauvais pour leur santé. Les enfants en bas âge, c’est connu, ont besoin d’une alimentation saine et équilibrée. Ils ont aussi besoin de manger dans un environnement propre et non pas n’importe où, dans une atmosphère polluée chargée de diverses nuisances sonores. « Depuis l’application de l’horaire continu, mes parents ne rentrent plus manger à la maison à midi. Je me retrouve alors obligé de manger dans la rue. Heureusement, je ne suis pas le seul à le faire. Certains de mes amis y sont contraints aussi. Mais le plus désagréable dans cette affaire, c’est de ne pas pouvoir se sustenter dans un espace correct et adapté », raconte le petit Fahd, navré.
Dans les quartiers populaires, la question de l’horaire continu ne cause pas beaucoup de problèmes. Les parents et les enfants se sont vite adaptés. «Rares sont les enfants qui restent manger dehors. Pour la simple raison qu’il y a toujours une tante, une cousine, un grand frère ou une voisine qui prend en charge l’enfant à l’heure du déjeuner. D’autant plus que les mamans sont pour la plupart des femmes au foyer», précise Mme Kebboua, institutrice dans une école primaire publique à Casablanca. Néanmoins, parents, enfants et instituteurs n’arrivent toujours pas à retrouver leur équilibre habituel dans l’horaire continu. Pour atténuer ce déséquilibre, certaines écoles publiques proposent l’application d’un horaire adapté : un premier groupe d’élèves poursuivrait alors ses cours de 8h à 13h, et un deuxième groupe de 13h30 à 17h30. Précisons que ceci n’est pour l’instant qu’une simple proposition.
Ainsi, cinq mois après l’application de l’horaire continu, le problème est toujours posé et risque de le rester, au moins jusqu’à la fin de cette année scolaire.