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Aja :  Steely Dan
Dans l’histoire, Walter Becker et Donald Fagen de Steely Dan ont le dernier mot sur ce disque, le joyau de leur formidable pop 70’s. Déjà dans les charts cinq ans auparavant avec un "rock" sinueux aux touches jazz, les visions acerbes et anti- héroïques du duo avaient été acclamées par la critique pour leur identité et leurs excellents riffs de guitare. Puis les deux compositeurs ont rapidement dissous le groupe d’origine pour utiliser le studio comme laboratoire avec différents line-ups. Aja poussait plus loin l’exploration des modèles de jazz sophistiqués et la qualité de l’interprétation. Steely Dan était en permanence à la recherche d’harmonies suaves, de structures de chansons complexes et d’interprétations précises. Le temps contredit leurs détracteurs de l’époque. Ces sept chansons restent truffées de surprises, d’interprétations à couper le souffle avec l’appel à des jazzmen de premier plan, comme Wayne Shorter pour un solo époustouflant sur la chanson titre. Avec du jazz romantique sur "Deacon Blues", l’homérique "Home At Last", le swing de "Peg" et l’érotisme de science-fiction de "Josie", Aja est un classique de la pop moderne et un des meilleurs disques de fusion que personne ait jamais pensé à classer dans cette catégorie.

Thelonious of modern music : Genius of modern music
Les premiers enregistrements que Thelonious Monk réalisa sous son nom, des faces historiques qui fascinèrent plusieurs générations de jazzmen. Bien qu’attentif à tous les détails de sa musique, Monk n’expliquait rien et ne préparait nullement ses séances. Ses musiciens découvraient sur place les thèmes étranges aux nombreuses dissonances et aux accords bizarres que l’excentrique pianiste répétait chez lui, dans la minuscule cuisine où il avait installé son piano. Livrés à eux-mêmes, les souffleurs qu’il réunit en studio en 1947 manquent un peu de rigueur, la mise en place des morceaux reste approximative, mais Monk, très concentré, dispose d’une section rythmique parfaitement capable de le suivre. En trio, le 24 octobre, il confie à la cire "Ruby My Dear", "Well You Needn’t", "Off Minor" et "Introspection", des pièces essentielles de son répertoire. Un mois plus tard, il grave enfin sa propre version de "’Round Midnight", sa plus célèbre composition. Monk sort de l’ombre et avec lui le jazz moderne apparaît au grand jour.

Anouar Brahem : Mantis
Ceux qui appréciaient principalement le groove 70’s du trompettiste Erik Truffaz, ses sons de piano électrique, ses rythmes drum’n’bass et la tchatche de Nya, en seront pour leurs frais et feront bien de se reporter directement à "Magrouni" ou "The Point", histoire de ne pas être trop désemparés ! Car Truffaz, et il a bien raison de n’en faire qu’à sa tête, évolue et change de registre, quitte à renoncer ici au succès que lui garantissait pourtant sa parenté musicale avec Miles. L’homme se sent d’humeur mélancolique et va pêcher en partie son inspiration, pour ce qui est de son jeu, du côté de Chet Baker, préférant, tout au moins temporairement, la coolitude des ballades aux tempos montés sur ressorts. Force est de reconnaître que ce virage lui sied et enrichit une palette qu’on devinait large. Pour l’aider dans son entreprise, s’y colle une équipe de fines gâchettes parmi lesquelles fidèles et nouveaux venus : à la batterie, Philippe Garcia, à la basse, Michel Benita et à la guitare, remplaçant les claviers, l’excellent Manu Codjia. La surprise vient également du côté des invités. Le passionnant Anouar Brahem au oud et le chanteur arabe Mounir Troudi apportent une touche orientale fort bien venue. Une réussite en tous points.

Weather report : Mysterious traveller
Enregistré en 1974, Mysterious Traveller marque l’arrivée du bassiste électrique Alphonso Johnson au sein de Weather Report. Repéré par Wayne Shorter alors qu’il jouait encore dans le grand orchestre de Chuck Mangione, c’est son jeu en grande partie basé sur un sens exacerbé du groove qui retient son attention au point d’en faire le successeur du virtuose Miroslav Vitous.
Ce disque, les leaders Wayne Shorter et Joe Zawinul souhaitaient qu’il évoque l’atmosphère de la toile d’Helmut K. Wimmer qui orne la pochette et représente un paysage nocturne serein sur lequel se lèvent les premières lueurs de l’aube. Ainsi, "Nubian Sundance" qui ouvre le disque, inspiré par l’Égypte antique, campe l’atmosphère avec des motifs percussifs entêtants mis en place par Skip Hadden et Ismael Wilburn. Des claviers (Fender Rhodes, ARP 2600) zèbrent l’espace sonore, annonçant le lyrisme incandescent des morceaux suivants, jusqu’à l’apothéose du groove lancinant de "Cucumber Slumber" coécrit par Alphonso Johnson qui accomplit des prouesses grâce à la wah-wah. L’alchimie, totale, prolonge celle des précédents albums, Sweetnighter et I Sing The Body Electric, consacrant la formation comme une des plus intéressantes du jazz rock avec les "ateliers" de Miles.

Guru : Jazzmatazz
1993 : après trois albums avec DJ Premier, le rappeur Guru s’aventure en solo pour un concept album réunissant des musiciens de jazz et des chanteuses de soul. Partant du constat que la grande majorité des Noirs américains évoluent au sein d’une cellule familiale éclatée, le MC de Gang Starr décide d’utiliser sa notoriété pour réveiller les consciences de ses frères et soeurs de couleur sur ce sujet. Il convie Roy Ayers, Donald Byrd, Lonnie Liston Smith, Ronny Jordan, Courtney Pine et quelques autres jazzmen ainsi que Carleen Anderson, N’Dea Davenport et DC Lee côté chant à s’épancher sur ses programmations hip-hop. Sans oublier la participation de MC Solaar sur "Le Bien, le Mal". Et le résultat est aussi suave qu’on pourrait l’imaginer, d’où le succès international rencontré par ce premier volet du projet Jazzmatazz.

Donald Byrd : Byrd in Paris
Grâce à la collection Jazz In Paris, un collector originellement réalisé par le label Brunswick enregistré dans la capitale par le trompettiste Donald Byrd, est à nouveau disponible. Capté en public en 1958 à l’Olympia, ce quintette brille, entre autres choses, par l’interprétation enlevée qu’il offre de "Dear Old Stockholm". Fluide et lyrique, Byrd y joue avec élégance, dans un style hard bop sans agressivité auquel répond Bobby Jaspar, dont le phrasé, au saxophone ténor, s’avère ici plus extraverti que celui du leader. Par contre à la flûte, c’est une impression de sérénité qui domine comme sur "Flute Blues".

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