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Des hommes autour du Prophète : Salman Al-Farisy (Fin)

J’ai quelque chose, un présent, et je veux t’honorer." Puis, je le déposai devant lui. Il dit à ses compagnons: "Mangez au nom de Dieu." (Cette fois,) il mangea avec eux.
Je me dis alors: "Par Dieu! voilà la deuxième chose. Il mange le présent."
Sur ce, je me retirai. Je restai le temps que Dieu voulut puis je revins pour le voir. Je le trouvai à al-Baqï. Il était à un enterrement. Il était entouré de ses compagnons. Il portait deux capes, dont l’une était sur son dos. Je le salua puis je m’écartai pour voir le haut de son dos. Il sut que je voulais cela. Il dégagea le vêtement, pour laisser voir sa nuque, et voilà le signe entre ses épaules! le sceau de la prophétie comme il avait été décrit par mon compagnon.
Je me penchai sur lui, pour l’embrasser et pleurer. Puis, l’Envoyé (ç) m’invita. Je m’assis devant lui et je lui racontai mon histoire comme je la raconte maintenant.
Après quoi, je me soumis à Dieu. L’asservissement m’empêcha de prendre part à la bataille de Badr et celle de Uhud.
Puis, un certain jour, l’Envoyé (ç) me dit: "Fais un écrit avec ton maître, en vue de ta libération." Je fis avec lui cet écrit. Puis, l’Envoyé (ç) ordonna aux compagnons de m’aider. Alors, Dieu libéra ma nuque, si bien que je vis maintenant libre et musulman. En outre, j’ai pris part avec l’Envoyé (ç) au siège du Fossé, et aussi à toutes les batailles.»
Avec de telles paroles limpides, Salman al-Farisy a parlé de ses pérégrinations à la recherche de la vérité qui le mettra en rapport avec Dieu et lui définira son rôle dans cette vie.
Quel grand homme était cet homme! Quelle supériorité avait acquise son âme, pour imposer sa volonté à toutes les difficultés! Quelle ferveur permanente pour la vérité! si bien qu’il a quitté librement le luxe et l’opulence de son père, pour se jeter dans l’inconnu et ses imprévus, pour aller d’un pays à un autre, en quête de la vérité. Sa pugnacité, ses sacrifices en vue de la guidance ont désarmé tous les obstacles, même celui de l’asservissement. C’est pourquoi Dieu l’a rétribué d’une large rétribution: il a rencontré le Vrai, son chemin a croisé celui de l’Envoyé (ç), il a vécu longtemps pour voir l’étendard de Dieu flotter sur nombre de pays. Cet homme de cette trempe, possédant une telle sincérité, à quoi s’attend-on de lui? Son islam était l’islam des dévoués qui se prémunissent. Dans sa continence, sa perspicacité, sa tempérance, il ressemblait à Omar b. al-Khattab. Une fois, il est resté des jours avec Abou ad-Darda dans une seule demeure. Remarquant qu’Abou ad-Darda faisait des prières de nuit et un jeûne surérogatoire le jour sans discontinuer, Salman a jugé que c’était là des actions d’adoration exagérées. Il a essayé de le convaincre. Abou ad-Darda a dit: «M’empêcherais-tu de jeûner pour mon Maître, de prier pour lui?" Salman lui a alors rétorqué : «Tes yeux ont un droit sur toi, et ta famille a aussi un droit ; jeûne et déjeune, prie et dors.»
L’Envoyé (ç), quand cela est parvenu â lui, a dit : «Salman a été comblé de science.»
En outre, lors du siège du Fossé, quand les Ançar et les Muhajir se sont dit les uns aux autres: «Salman fait partie de nous!», l’Envoyé (ç) leur a dit: «Salman fait partie de nous, nous la Maisonnée.» Salman est effectivement méritant de cet honneur.
Quant à Ali Abou Talib, il le surnommait Luqmân le sage. A la mort de Salman, Ali Abou Talib a dit:
«Celui-là est un homme
Qui fait partie de nous
Et il est pour nous
Nous la Maisonnée
Qui avez-vous
Qui soit comme
Luqmân le sage?
II a été doté de la science première et de la science dernière. Il a récité le Livre premier et le Livre dernier. Il était un océan (de savoir) qui ne tarissait pas.»
Salman avait une place très particulière dans le cœur des compagnons de l’Envoyé (ç). Sous le khalifat de Omar, il est venu à Médine en visite. Omar l’a accueilli avec tous les égards. Il avait réuni ses compagnons et leur avait dit: «Sortons accueillir Salman!» Et tous allèrent l’accueillir à l’entrée de Médine.
Depuis qu’il a rencontré l’Envoyé (ç) Salman mena une vie de musulman libre, de combattant. Il traversa le khalifat d’Abou Bakr, de Omar. Mais dans celui de Othman, il fut rappelé à Dieu. Durant toutes ces années, l’Islam se répandait, ses étendards flottaient dans les divers horizons, et les biens affluaient à Médine, où on les distribuait régulièrement aux gens. Les postes de responsabilité se démultipliaient. Et Salman, où était-il dans tout cela? De quoi s’occupait-il en cette époque de richesses?
Regardez là! regardez bien! Voyez-vous là-bas, à l’ombre, ce noble vieillard en train de tresser les feuilles de palmier, pour en faire des ustensiles? C’est Salman.
Regardez-le bien. Vous le voyez habillé d’un vêtement court, si court qu’il lui arrivait aux genoux.
Pourtant, le don qu’il touchait était considérable. Entre 4000 et 6000 dirhams par an. Il distribuait tout, sans garder le moindre sou, en disant: «J’achète avec un dirham des feuilles de palmier et je les travaille, puis je les vends à 3 dirhams. Je garde un dirham pour d’autres feuilles, je dépense un autre pour ma famille, et je donne le troisième en aumône.»
Certains d’entre nous, quand ils entendent parler de la continence des compagnons, disent que cela était en rapport avec les conditions naturelles de la presqu’île arabique, où l’Arabe trouve son plaisir dans la simplicité. Mais, là, nous sommes devant un homme originaire de Perse, qui était un pays de richesses et de faste, un homme qui n’était pas un pauvre. Pourquoi Salman refusait-il alors la fortune et la vie raffinée? Pourquoi insistait-il à se suffire d’un seul dirham quotidien qu’il gagnait â la sueur de son front?
Pourquoi refusait-il le poste d’émir? Il disait: "Si tu peux manger de la poussière, pour ne pas être un émir de deux personnes, fais-le!»
Pourquoi rejetait-il les postes de responsabilité, sauf celui d’être chef d’une colonne partant au combat sur le chemin de Dieu? Et pourquoi n’acceptait-il pas sa part de don qui lui était pourtant licite?
Hichâm b. ‘Hassan rapporte d’al-Hassan: «Le don à Salman était de 5000. Et puis, il était à la tête de 30000 hommes, il faisait son discours couvert d’une (simple) cape, dont la moitié lui servait de couche et l’autre de vêtement. Quand sa part de don lui parvenait, il la donnait. Il mangeait du travail de ses mains.»
Pourquoi Salman agissait-il ainsi? Qu’on écoute sa réponse qu’il avait donnée avant de mourir. Sur son lit de mort, il avait pleuré devant Saâd b. Waqaç qui lui rendait visite.
«Qu’est-ce ui te fait pleurer, ô Abou Abdallah? Pourtant, l’Envoyé mourut en étant satisfait de toi, lui dit Saâd. – Par Dieu! dit Salman, je ne suis pas affligé par la mort et je ne suis pas attaché à l’ici-bas. Mais l’Envoyé nous a confié une charge, quand il a dit : "Que l’un de vous ait dans l’ici-bas une part semblable aux victuailles du voyageur." Alors que moi je suis entouré de tant de choses. – O Abou Abdallah! dit Saâd, en ne remarquant autour de lui qu’une écuelle et un petit récipient, recommande-nous quelque chose que nous garderons de toi. – O Saâd, rappelle Dieu quand, dans ton souci, tu t’apprêtes (â agir), quand tu t’apprêtes à prendre une décision et quand tu t’apprêtes à distribuer avec ta main."
Voilà l’homme. Il a respecté scrupuleusement la recommandation de l’Envoyé (ç), en ayant une simple écuelle dans laquelle il mangeait, ainsi qu’un récipient avec lequel il buvait et faisait ses ablutions. Et pourtant, il avait eu les larmes aux yeux. A l’époque où il était émir d’al-Madaïn, rien n’avait changé dans sa personnalité. Il avait continué à vivre de la confection des feuilles de palmier. Un jour, alors qu’il était dans la rue, il vit un homme arriver de Damas avec une charge de figues et de dattes. Ce dernier, étant fatigué par le poids, cherchait des yeux un pauvre porteur. Dès que ses yeux tombèrent sur Salman, il l’appela. Salman prit la charge et s’en alla avec l’étranger.
Sur le chemin, quand tous deux passèrent près d’un groupe d’hommes, Salman leur lança le salut et eux lui répondirent debout: «Salut sur l’émir.»
L’homme se dit aussitôt: «Quel émir désignent-ils?» Son étonnement s’accrut encore quand il vit quelques-uns accourir et dire à Salman: «O Emir, laisse! on va porter cela.»
L’homme sut alors qu’il avait eu affaire à l’émir de la ville. Il essaya de ne pas laisser la charge sur les épaules de Salman. Mais Salman refusa de la tête, en disant: «Non, jusqu’à te faire parvenir à ta destination.»
Un jour, on lui posa la question: «Qu’est-ce qui te fait-répugner le poste d’émir.» Il répondit: «C’est la saveur de son sein quand on le prend et l’aigreur de son sevrage.»
Un autre jour, son compagnon entra et le trouva en train de pétrir la pâte. Il lui dit: «Où est la servante?» Salman lui répondit: «Nous l’avons envoyée pour une affaire. Alors, nous avons détesté de lui réunir deux travaux à la fois.»
Le jour de sa mort, au matin, Salman appela sa femme, et lui dit: «Apporte-moi la chose que je t’avais donnée à cacher.»
Elle alla vite l’apporter. C’était une bourse contenant du musc qu’il avait eu le jour de la conquête de Jalwala. Il l’avait gardée pour s’en parfumer à sa mort. Il demanda encore à sa femme de lui apporter un récipient d’eau, où il éparpilla le musc. Il le fit fondre avec sa main puis dit à son épouse : «Arrose avec cela mon pourtour. Des créés de Dieu sont maintenant présents. Ils ne mangent pas la nourriture, ils aiment plutôt le bon parfum». Quand elle termina d’arroser, Salman lui demanda une dernière fois de le laisser seul après avoir fermé la porte. Elle fit cela. Et quand elle revint après un moment, elle le trouva sans âme. Son âme avait quitté son corps et cet ici-bas, pour aller rejoindre le sublime synode. Salman al-Farisy était allé là-bas rejoindre l’Envoyé (ç) et ses campagnons

«Des hommes autour du Prophète»
Khalid Mohammad Khalid
Traduction : Abdou Harakat
Ed. Dar Al-Kotob Al-Ilmiyah
Beyrouth, 2001 – 224 pages

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