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L’affaire Matoub (2)

© D.R

C’est la seule façon d’arriver à nos objectifs, mais il faut absolument éliminer par la même occasion, les secteurs du conservatisme au sein des appareils de l’Etat, le pouvoir sera rendu ensuite aux civils. Et à Touati de conclure : «Nous sommes prêts de toute façon, on attendait juste que les conditions soient réunies, nous avons la conviction qu’un Etat républicain verra le jour incessamment dans notre pays. Le colonel Merzak répète que le commandement de l’armée n’est pas pour la loi d’arabisation, mais ce n’est pas à l’institution militaire de s’y opposer de façon visible ; la contestation doit venir des politiques et de la rue plus précisément. Il rappelle même la formidable mobilisation des Kabyles en 1994 pendant la grève et lors de l’enlèvement de Matoub.
«La mobilisation des Kabyles, c’est mon affaire», dit Aït Hammouda en guise de promesse. Le colonel Merzak donne rendez-vous à ce dernier le lendemain dans les bureaux des services, au siège du MDN, et la réunion a ainsi pris fin après un échange de salutations. Voilà ce qu’on appelle dans le jargon des services secrets «la mise en condition» ou la préparation psychologique du sujet. En fait, la guerre entre la présidence et les généraux de l’état-major de l’armée battait son plein et ces mêmes généraux voulaient profiter de l’erreur que Zeroual allait commettre en appliquant la loi de généralisation de l’arabisation. En réalité, les généraux de l’armée projetaient un coup d’Etat et pour arriver à leurs fins, tous les moyens allaient être utilisés. Cette réunion qui a été organisée par les services secrets (la DRS) avec la bénédiction des autres généraux a été bien sûr enregistrée et réécoutée par la suite par Mohamed Lamari, Toufik, Smain Lamari, Touati et le colonel Merzak, et pendant cette réunion des "chefs" de graves décisions ont été prises. L’enregistrement audio de la rencontre a été classé "Très secret" par un procès verbal avec la transcription intégrale et archivé esous la référence: PVRQ/12/5/8/MDN/DRS. Nous l’avons reproduit fidèlement en guise d’introduction à "l’affaire Matoub", pour comprendre que l’assassinat de Matoub ne doit rien au hasard mais qu’il a été savamment orchestré par le cabinet noir.
Le choix de la cible
Après la rencontre avec les généraux, les chefs du RCD étaient sûrs que l’heure du changement et de la rupture avait sonné, et ont ainsi imaginé et étudié pour la circonstance plusieurs plans d’actions afin de contribuer à leur façon et de manière active à cette micro-révolution. Parmi les plans évoqués, la désobéissance civile et la grève illimitée. Les deux options ont été rejetées après une discussion houleuse à cause du haut risque de l’échec, surtout que le FIS avait laissé des plumes en utilisant ces mêmes options auparavant, alors qu’il était bien implanté au niveau national. Plus important encore, le FFS n’aurait jamais marché dans une telle aventure nécessitant une mobilisation semblable à celle du printemps berbère. Aït Hammouda a proposé à Saïd Saâdi d’occuper le champ médiatique en Algérie d’abord, en faisant remarquer que les milieux proches du RCD dans la capitale française prendraient le relais ensuite; «la mobilisation on verra plus tard» disait-il. "Avait-il une idée derrière la tête? Il parlait en tous les cas avec une assurance qui a dérouté tout le monde", affirme une personne présente dans la réunion. Aït Hammouda était certain que la région kabyle serait le tombeau du projet Ouyahia et du pouvoir de Zeroual. Cette assurance, Aït Hammouda la détenait de sa rencontre avec le colonel Merzak, au siège du ministère de la Défense et c’est durant cette réunion que le sort de certains éléments gênants pour le tandem de l’état-major s’est décidé. Aït Hammouda savait que Matoub voulait visiter Tizi Ouzou depuis un bout de temps, et n’a pas hésité à l’appeler pour demander soi disant de ses nouvelles, durant la conversation Matoub a demandé des nouvelles de la région, et c’est à ce moment que Ait Hammouda a commencé à se vanter du bon travail qu’il a entrepris avec ses amis et du bon résultat qu’ils ont obtenu; la région était devenue selon lui plus sûre qu’Alger. Presque instinctivement Matoub a exprimé son désir de rentrer mais il était hésitant à cause de ses appréhensions envers le pouvoir suite à la sortie de son nouvel album où il parodiait l’hymne national. Ait Hammouda ne s’est pas ménagé pour convaincre Matoub qu’il n’avait absolument rien à craindre, même de la part des autorités. Ait Hamouda a même promis à Matoub une protection rapprochée digne d’un chef d’état, depuis sa descente d’avion jusqu’au jour de son départ. Face à ces promesses, Matoub avait déclaré que suite à cela sa visite à Tizi Ouzou ne saurait tarder. C’est le chef d’antenne de la DRS à Paris, le colonel Smain Seghir de son vrai nom Ali Benguedda (très intime à Smain Lamari qui l’a nommé à ce poste après le décès du lieutenant-colonel Souames Mahmoud (alias colonel Habib), qui a annoncé à Toufik et Smain Lamari l’imminence du voyage de Matoub à Alger avant même que Matoub ne prenne son billet d’avion. Matoub savait que de nouvelles menaces ont été proférées contre lui par le groupe armé auteur de son enlèvement du 25 septembre 1994, surtout après la sortie de son livre; il faut dire que ce kidnapping n’avait rien d’un coup monté par les officines de Smain, mais bel et bien une opération organisée par un groupe islamiste de la région même de Tizi Ouzou, sa libération par contre s’est faite grâce à l’intervention d’une taupe (un des agents de la DRS travaillant sous couvert avec les islamistes dans le maquis) et qui a empêché son exécution depuis le sommet du commandement du GIA sous prétexte que l’assassinat de Matoub ferait baisser la popularité du GIA dans la région.

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