Editorial

La sournoiserie du pouvoir

© D.R

Soit nous sommes un pays démocratique avec un État de droit bien ancré auquel cas, la législation antiterroriste, en étude actuellement, est une grave régression. Il faut donc se mobiliser contre elle.
Soit nous sommes une démocratie aléatoire avec des instituons balbutiantes et non crédibles, alors le texte en préparation est une avancée de taille car c’est la première fois dans notre pays que l’on essaie de codifier, un tant soit peu, l’arbitraire absolu.
Quels sont à votre avis les droits constitutionnels d’un disparu non retrouvé ? De quel recours dispose quelqu’un qui est mort dans un lieu de détention illégal et clandestin ? Quelles sont les garanties dont dispose un prévenu dont la garde-à-vue n’est pas déclarée? Vous voyez bien que l’on revient de loin et que le chemin à parcourir reste long. C’est une vraie marche.
Essentiellement, ces deux réflexions et les questions qui vont avec sont nées après des essais difficiles et laborieux de plusieurs semaines de comprendre ce qui se passe avec cette satanée loi antiterroriste. Ces réflexions sont manifestement insuffisantes. C’est pour cela que l’on va parler d’un autre sujet plus consensuel en attendant une meilleure inspiration.
Un démocrate sincère qui s’oppose à la loi antiterroriste doit-il, nécessairement, minimiser le risque terroriste qu’encourt notre pays pour développer son argumentaire légitime? Doit-il aussi nier l’existence, comme cela a été fait légèrement, d’une cellule d’Al Qaïda et se perdre dans des conjectures fumeuses sur le machiavélisme du pouvoir? À la faveur d’une position de principe, faut-il affirmer que notre arsenal juridique et, notamment, notre Code de procédure pénale est suffisant et complet pour faire face à ce nouveau risque qui a provoqué une mobilisation mondiale aboutissant partout à de nouveaux dispositifs judiciaires ?
Peut-être que le « pouvoir » actuel chez nous – comme ils disent – , c’est-à-dire nos institutions, n’a pas suffisamment d’attributs démocratiques, solides et consistants, susceptibles de nous éviter de voir derrière chaque tentative légitime de réforme, notamment dans le domaine judiciaire, une volonté sournoise de réduire les libertés publiques. Une sorte de crise de confiance «structurelle» qui fait que l’État, dans la culture analytique dominante à propension nihiliste, ne bénéficie jamais de la présomption d’innocence. C’est un paradoxe bien de chez nous et bien de notre temps qui n’exonère ni les uns ni les autres d’efforts intellectuels supplémentaires.

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