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Cette loi reste perfectible

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Quelle est votre appréciation générale sur la réforme du code de procédure pénale qui est entrée en vigueur au début du mois?
Me Abdelfettah Zahrach : Il faut rappeler que cette réforme répond à une nécessité sociale. L’ensemble des acteurs politiques, les avocats ainsi que les organisations de défense des droits de l’homme ont milité pour que le code de procédure pénale soit conforme aux conventions internationales. Sur ce point, précisons que ces conventions ont quasiment toutes été ratifiées par le gouvernement marocain. En outre, cette réforme découle du fait que la construction de l’Etat de droit est inséparable de la réforme des textes régissant la procédure pénale. Il n’est plus possible que la loi marocaine ne respecte pas les droits de l’Homme tels qu’ils sont internationalement reconnus.
Quelles sont les nouveautés de cette révision?
Lors de notre travail sur le terrain, nous avons rencontré plusieurs problèmes dus à certaines dispositions légales mais également à la réalité sociale du Maroc. En fait, la révision du code de procédure pénale a été motivée par l’adaptation de notre loi aux règles de droit international et à la réalité socio-politique du pays. C’est ainsi que le code prévoit de nouveaux types de crimes, comme les crimes scientifiques et technologiques qui ont fait l’objet d’une longue discussion au sein du Parlement. C’est le cas également des règles applicables aux mineurs ou le renforcement des droits de la défense. Sur ce point, l’avocat a le droit d’assister aux interrogatoires de la police judiciaire dès le renouvellement de la durée de la garde-à-vue.
Est-ce que toutes les réformes apportées sont positives, selon-vous?
Il y a beaucoup de points positifs dans cette réforme. Le fait que nous ayons pu maintenir un certain nombre d’acquis c’est déjà bien. Je pense notamment au droit à la défense ou à l’obligation pour la police judiciaire d’informer la famille du détenu dès son arrestation. Mais il y a également l’instauration d’un contrôle de l’action de la police judiciaire. Ce contrôle est assuré par le ministère public. Ce dernier a vu son rôle se renforcer davantage dans cette réforme. Il peut ainsi intervenir au cours de la procédure pénale pour amorcer un processus de réconciliation entre les parties, par exemple. C’est un élément assez positif à mon sens.
Qu’en est-il des inconvénients?
Dans le code de procédure pénale, d’un côté nous avons un renforcement du rôle de la défense dans la procédure notamment par la présence de l’avocat lors des interrogatoires menés par la police judiciaire, et d’un autre côté, la possibilité donnée au parquet de retarder la rencontre entre le prévenu et son avocat. C’est là une contradiction flagrante au sein de ce code. Le parquet a, certes, un rôle de contrôle de l’action de la police judiciaire, mais ce rôle, dans l’ensemble, demeure beaucoup plus d’accusation. En outre, certaines dispositions du nouveau code sont totalement inconstitutionnelles. C’est ainsi que les écoutes téléphoniques sont légalisées désormais. Même chose pour l’interception des correspondances ou l’interdiction de circuler librement. Ces dispositions marquent une certaine régression en matière de droits de l’homme.
Mais ces dispositions sont dictées par des nécessités de sécurité et d’ordre public. Les attentats du 16 mai l’ont bien montré.
En fait, c’est tout le débat qui a prévalu lors de l’élaboration et l’adoption de la loi antiterroriste. Sommes-nous capables de concilier le respect des droits de l’homme et les impératifs de sécurité? Une chose est sûre, l’Etat de droit ne peut-être construit en bafouant les droits les plus élémentaires des justiciables. C’est d’ailleurs, ce qu’affirment les conventions internationales signées par le Maroc.

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