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Des couacs visibles

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Si un journaliste effronté ose demain interpeller le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner sur une possible dégradation de ses relations avec le président Nicolas Sarkozy, il aura certainement droit à cette posture indignée que souligne le mouvement brusque d’une chevelure  trop dense pour l’âge du capitaine et d’une voix happée et usée par une longue carrière politique. Kouchner niera certainement toutes divergences entre lui et l’homme qui l’a fait grand ministre de la République. Les reconnaître publiquement équivaut à une rupture de contrat et à une démission immédiate. Et pourtant tout indique que la grande lune de miel débutée par la magie de l’ouverture à la sauce Sarkozy est en train de s’essouffler. La chronique mondiale s’est faite l’écho ces derniers jours  de la mémorable engueulade que Sarkozy avait administrée à son ministre des Affaires étrangères dans les couloirs de l’Assemblée générale des Nations unies. Kouchner avait devancé par une pensée très «colombe», une posture très «faucon» que Sarkozy s’apprêtait à adopter sur le dossier iranien devant le gotha international réuni à New York. L’engueulade était si vive, si peu contrôlée, et si entraînante que la directrice de l’information de France Télévision Arlette Chabot n’a pas résisté au plaisir de placer un bon mot «Cela ferait un bon débat sur France 2», avait-elle osé dans un trait d’humour qui se voulait convivial. Mal lui en a pris. La foudre présidentielle s’est retournée contre elle dans une mémorable charge qui continue à faire débat bien loin du  la Hudson River. Même si nombreux sont ceux qui continuent à gloser sur les critiques acerbes adressées par Sarkozy à Arlette Chabot, rares sont ceux qui ont oublié l’élément déclencheur de l’ire présidentielle : Kouchner sur un sujet aussi sensible que l’Iran, à un moment crucial où il n’était pas le bienvenu pour la diplomatie française d’afficher la moindre dissonance. Ce tumultueux épisode américain dans les relations entre Kouchner et Sarkozy venait de clore une autre parenthèse dans laquelle les équipes travaillant pour les deux hommes se sont affrontées de manière feutrée. Ce fut autour  de l’élection du directeur général de l’UNESCO. Et là où les équipes de l’Elysée avaient montré une préférence diplomatique manifeste pour le candidat égyptien Farouk Hosni, l’entourage de Kouchner s’est montré sensible aux campagnes qui visaient à lui  barrer la route, notamment celle menée avec fougue par l’écrivain Bernard Henri-Lévy et l’ancien ministre Simone Veil.  L’échec de Hosni a mis en évidence un dangereux dysfonctionnement au sein de la parole diplomatique française, traditionnellement configurée en priorité par le président de la République. L’opposition, si prompte à gratter sur les blessures, s’est empressée, pour bien montrer et souligner les divergences entre le Quai d’ Orsay  et l’Elysée, de qualifier l’échec de Hosni comme «un camouflet» personnel de Sarkozy. Mis dans une réelle perspective politique, ces événements ont de fortes chances de creuser une mésentente entre les deux hommes. Surtout que le gouvernement vit des jours tendus bourrés de folles rumeurs, à la veille d’un grand remaniement prévu au lendemain  des élections régionales de mars prochain. Kouchner que Sarkozy avait l’habitude de  présenter comme une des plus précieuses prises de guerre à la gauche, n’est plus assuré de conserver ni son magnétisme ni sa valeur politique. La question qui s’impose aux esprits est la suivante : le divorce entre les deux hommes serait-il aussi foudroyant que leur histoire d’amour a été subite ? Les bonnes âmes pourront toujours se consoler sur une durée jugée longue au-delà du raisonnable de leur compagnonnage. Les véritables occasions de se séparer n’ont pas manqué. Seul un réalisme à la limite du cynisme les a épargné. Mais comme les meilleures idylles ont fatalement une fin, celle que Sarkozy et Kouchner ont écrites commence sérieusement à pâlir.

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