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L’opération russe teste les limites d’un élargissement de l’Otan

© D.R

Les opérations militaires russes en Géorgie ont mis en question l’élargissement de l’Otan vers l’Est ces dix dernières années, et devraient relancer le débat sur le projet américain d’installer des missiles en Europe orientale, estiment des analystes. Les forces américaines de l’Otan ont assisté en voisins à l’invasion par l’armée russe des régions séparatistes géorgiennes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie, au lendemain d’une offensive militaire de la Géorgie en Ossétie. Entraînée par les Etats-Unis, l’armée géorgienne a été défaite, mettant en évidence les limites d’un «parapluie» occidental. «L’enseignement (du conflit russo-géorgien) est que les gens qui réclament l’entrée de pays dans l’Otan doivent comprendre que si l’on n’est pas prêt à les soutenir avec de vraies mesures de sécurité, on peut leur causer du tort», affirme un ancien ambassadeur des Etats-Unis à l’Otan, Robert Hunter. «Je pense qu’entre autres, il s’agit d’un choc pour ces gens qui pensaient que l’on pouvait parler d’élargissement de l’Otan sans (en envisager) les conséquences possibles», selon Hunter. Le sommet de Bucarest en avril a constitué un tournant: sans lancer formellement de processus de rapprochement, l’Otan avait affirmé que la Géorgie et l’Ukraine «deviendraient membres» à terme de l’Alliance, une formulation de compromis.
Mais cette reconnaissance pourrait avoir conduit le président géorgien Mikheïl Saakachvili à s’enhardir face à Moscou, et a provoqué la colère des Russes.
Vladimir Poutine, alors président et aujourd’hui Premier ministre russe, avait quitté le sommet «avec le sentiment que l’Alliance lui avait coupé l’herbe sous le pied», explique Julianne Smith, du Center for Strategic and International Studies de Washington.
«Sans aucun doute, ils (les Russes) ont eu l’impression qu’il leur fallait montrer à l’Occident à quel point il était ridicule, de leur point de vue, de s’engager à protéger la frontière géorgienne», dit cette experte, selon qui Moscou s’est dit: «Nous devons montrer à l’Otan dans quoi ils s’engagent».
L’usage de la force par la Russie en Géorgie a surpris à l’Ouest, où l’on avait vu Moscou accepter, même avec réticence, l’élargissement de l’Otan à d’anciens pays du pacte de Varsovie et aux pays baltes ces dernières années. Comme au poker, Moscou «a demandé à voir, et nous avons dû nous coucher», commente Hunter. «Nous devons nous coucher parce qu’en aucun cas nous ne pouvons suivre les Russes là-bas » en Géorgie, dit-il. « Conserver des relations avec les Russes sur le long terme est très important pour nous, comme il est important qu’ils comprennent que pour cela, ils ne peuvent pas s’en prendre à leurs petits voisins», souligne l’ancien diplomate.
Pour Mme Smith, l’opération russe, sans signer l’arrêt de mort de l’élargissement de l’Otan, pourrait « faire caler le processus », et le prochain président des Etats-Unis «aura pour tâche de montrer aux Russes que leur expédition en Géorgie n’aura pas eu ce résultat» lors du sommet des 60 ans de l’Alliance anti-soviétique l’année prochaine. Mais des fissures pourraient aussi se faire jour au sein de l’Otan, face à la volonté américaine d’installer un système de défense anti-missiles en Europe de l’Est, et de transformer l’organisation en acteur sur des opérations hors du continent, comme c’est déjà le cas en Afghanistan. «Des pays comme l’Allemagne et la France pourraient dire que nous ne devrions pas nous lancer dans une défense anti-missiles parce que cela va énerver encore plus» les Russes, avance Mme Smith. Mais «la Pologne et la République tchèque ou d’autres vont dire: au contraire, équipons-nous d’une défense anti-missile le plus vite possible, parce que (les Russes) nous talonnent et que nous ne savons pas quand ils vont s’en prendre à nous», conclut-elle.


• Jim Mannion (AFP)

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