Politique

Milouda Hazib: «Nous sommes très loin d’arriver un jour au scrutin binominal»

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ALM : Aujourd’hui, des députées réclament la parité pour les élections communales. Une commission parlementaire aurait même été créée dans ce sens. Comment voyez-vous cela et qu’est-ce qui pourrait bloquer cette requête ?
 

Milouda Hazib : La parité a clairement été inscrite dans la Constitution de 2011. Des lois organiques et des mécanismes pouvant l’appliquer réellement devaient être clairement établis depuis. Or, jusqu’à aujourd’hui, ce n’est toujours pas le cas. Le problème majeur qui se pose c’est le manque de volonté, que ce soit chez les partis politiques ou même au niveau du gouvernement. Quelques partis justifient le manque de représentativité féminine par une absence de participation de ces femmes. «On n’en trouve pas», disent-ils. Laissez-moi vous dire que nos campagnes et nos villes regorgent de femmes compétentes et engagées. Elles sont partout mais ce sont les hommes qui en restent peu convaincus. S’ajoute à cela une volonté qui se limite au verbe quand il est question de mise en œuvre de la Constitution. Malheureusement, quand on parle «parité» aujourd’hui, certains partis jugent que les «listes additionnelles» demeurent la meilleure solution. Lesquelles listes sont une insulte aux femmes. Il ne s’agit là de rien d’autre qu’un égoïsme politique chez des hommes confortablement habitués au pouvoir. Tout cela fait que la femme soit à l’ombre de l’activité politique et décisionnelle.

Quel regard portez-vous sur cette politique de quota (12% pour les communales, ndlr) et comment les partis politiques prennent-ils cette question sur le terrain?

Ce quota doit être supprimé. En plus de la discrimination flagrante dont font preuve quelques partis en proposant des listes de femmes basées sur des affinités ou liens familiaux, il y a lieu de revoir ce quota et d’ouvrir les portes pour les vraies compétences.
A ce rythme, nous finirons par instaurer un modèle parlementaire héréditaire. Il faut savoir que le système de quota a été mis en place uniquement pour une étape de transition. Histoire de prouver aux Marocains que nos femmes sont compétentes et capables d’être aux commandes. J’estime que notre société n’a cessé d’en avoir la preuve depuis 2002. Il est donc temps d’arrêter ce quota et d’ouvrir également les portes de la représentation devant les jeunes pour les listes principales.

Qu’en est-il de votre parti ? Comment se présente cette notion de parité chez vous?

Au sein du Conseil national du parti, nous avons pris la ferme décision d’appliquer la parité lors de la présentation des listes pour les communales. Aucune liste ne sera validée si cela n’est pas pris en considération. Il en est de même pour toutes les structures nationales et régionales du parti.

Finira-t-on un jour par avoir un modèle de scrutin binominal comme c’est le cas en France par exemple?

(Soupirs) Tant qu’il existe des partis qui instrumentalisent les électeurs avec de l’argent, tant que le «marché» de voix des citoyens n’est pas verrouillé et que ces citoyens acceptent de se faire corrompre, je dirais que nous sommes très loin d’arriver un jour au scrutin binominal.

En parlant d’argent, certaines voix appellent à ce que la subvention étatique des campagnes électorales des femmes soit supérieure à celle des hommes. Comment vous positionnez-vous par rapport à cela?

Les femmes auraient moins de moyens ? Ceci est possible mais je ne serais pas d’accord avec cette proposition.
Ce qui pourrait être vraiment en faveur du principe de parité serait le fait d’accorder des subventions supplémentaires pour les partis qui proposent un plus grand nombre de femmes.
Dans ce sens, le rôle de l’Etat pourrait être majeur.

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