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Khalid Bouazzaoui, l’éternel féru de l’art de la Aïta

© D.R

Le 27 avril 1967, naquit celui qui allait être l’un des jeunes et grands maîtres de la Aïta. Et tel père tel fils, Khalid allait choisir la même carrière que son père Cheikh Bouazzaoui, le musicien et l’artiste passionné de l’art millénaire de la Aïta.
C’est l’histoire d’une véritable hantise. «Très jeune, je me sentais habité voire même hanté par «l’esprit» de la Aïta. J’ai quitté l’école pour suivre l’appel de mon coeur». confie Khalid Bouazzaoui. Et c’est en effet à l’âge de 14 ans qu’il allait quitter le nid familial pour s’installer à Casablanca. On le surnommait «Maréchal Kibbou S’ghir» (le jeune Maréchal Kibbou), car il avait la même allure, possédait la même virtuosité que cet originaire des territoires des Oulad Hriz, feu le Maréchal Mohamed Kibbou. «Pour le violon, je suis autodidacte. J’ai appris à manipuler cet instrument grâce à l’écoute mais surtout l’amour de l’art. Mon père était un grand violoniste de l’art de la Aïta. J’étais imbibé, plus, habité par la musique et les chants de cette musique. Elle coule dans mes veines. Je suis épris de cet art comme on s’éprend de la liberté», déclare Khalid.
C’est le conte d’une grande furia! Et quand on grandit au sein d’une famille d’artistes, fervents défenseurs d’un patrimoine ancré dans l’histoire des Marocains, on comprend parfaitement pourquoi Khalid Bouazzaoui qualifie sa passion de hantise.
C’est à l’émission «Mouzika» animée par Jaqueline dans les années 80, où il allait décrocher le Grand prix en interprétant la célèbre chanson «Daba Y’ji Ya Lahbiba» (Il viendra oh ma bien aimée), que le grand public le découvrit et où il allait s’inscrire sur la liste des grands maîtres interprètes de l’art de la Aïta. «J’ai grandi au sein d’une famille d’artistes. J’attendais que mon père sorte et je me faufilais dans sa chambre afin de jouer du violon. J’ai acquis l’amour de la Aïta grâce à mon père. Un jour, pendant une répétition, je me suis surpris en train de lui dire que ce n’était pas de cette manière qu’il fallait jouer un des morceaux de la Aïta «L’kafra gh’dartini» (Mécréante tu m’a trahit). Mon père me demanda de jouer le morceau. Terrorisé j’exécute mais de manière impeccable. Il me serra dans ses bras en disant à ma mère, nous avons un surdoué à la maison!», se remémore avec beaucoup d’émotions Khalid.
Il faut vraiment avoir une mémoire d’éléphant pour parvenir à apprendre autant de chansons, de textes et de mélodies de la Aïta. Khalid en a une mais des plus robustes.
«J’apprenais en écoutant quotidiennement sur un tourne disque, les grands chyoukh de l’époque. J’écoutais également « Al Arjouniates». Je dois ma réussite à mon père et mes frères qui m’accompagnent depuis toujours», affirme Khalid Bouazzaoui.
Son maître et père cheikh Bouazzaoui. avait une troupe composée de quatre chikhat : Hajja Fatma bent Meriem, Rabha, Arbia, Saâdia.
Issus d’une famille de 9 enfants, les Oulad Bouazzaoui font le bonheur aujourd’hui de tous ceux qui respectent l’authenticité. Quand il évoque le passé glorieux de la Aïta, Khalid parle de cette époque où les gens savouraient paisiblement le «Tarab». «La Aïta se jouait avec un violon, des petits tam-tam ou des boîtes d’allumettes. La musique devait être douce pour céder la place à la voix de la «chikha» qui était une sorte de cantatrice. Le nouveau chez nous c’est le luth et les “Taqassim”», précise l’artiste. Nul besoin de faire la comparaison avec ce que l’on rencontre aujourd’hui sur la scène de la musique populaire. «C’est un bruitage qui nuit plus qu’il serve la chanson populaire», certifie Khalid Bouazzaoui. Il est de ces rencontres qui vous marquent à jamais. C’est d’abord une première rencontre avec le maître de la chanson populaire de la région du Nord; Mohamed Chekara, vient ensuite celle avec Toulali, Bajeddoub…
«J’avais 14 ans, j’animais des soirées avec Khaddouj Z’roukiyya, Zahra Bent El Fassiya celle qui accompagnait le Maréchal kibbou, toujours vivante, Zahra Chkitou de la troupe de Bouchaïb El Bidaoui. Chekara avait assisté à l’une de ces soirées où j’avais été très applaudi. Il me rejoint dans la loge et me demande de rejouer les mêmes «taqassim». Il voulait savoir si j’avais été dans un conservatoire. Je lui ai dit que c’était mon père qui m’avait initié. Il m’a chaleureusement félicité et m’a prédis un bel avenir», se rappelle Khalid. Nostalgie oblige. Les années passèrent et il décida de rentrer à El Gara pour suivre une carrière en compagnie de ses trois frères. Et c’est la naissance du plus célèbre groupe de la musique Aïta, les Oulad Bouazzaoui. (Les fils de Bouazzaoui). Et depuis, bercés par la beauté des paroles et de la musique de la Aïta , Oulad Bouazzaoui tentent de préserver ce riche patrimoine qui narra la liberté, l’amour, la paix, la célébration de la moisson… en attendant que cet art millénaire soit propulsé au devant de la scène, encouragé et véritablement préservé.
Espérant que les Bouazzaoui ne soient pas les derniers des Mohicans de la Aïta.

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