Economie

Entretien : El Malki : «notre risque-pays s’améliore»

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ALM : Dans quel cadre avez-vous écrit votre livre sur le risque-pays du Maroc ?
Tarik El Malki : Ce livre intervient dans un contexte particulier. Le travail a été mené dans un centre canadien. L’idée était de mettre en comparaison trois régions émergentes ; à savoir, l’Asie du Sud-Est (Vietnam), le Moyen–Orient (Liban), l’Afrique du Nord (Maroc) et l’Afrique de l’Ouest (Sénégal). Chacun des pays sélectionnés dans ces différentes régions a fait l’objet d’une étude similaire sur le risque-pays. L’objectif était  de voir dans le contexte d’un pays émergent qui a connu une évolution politique significative, si le risque-pays avait évolué.

Justement, quel est l’intérêt de mesurer le risque-pays ?
Dans la décision traditionnelle d’investir, un opérateur évalue le rendement comparativement au risque-pays. Il s’agit d’une part de maximiser son rendement et d’autre part de diminuer son risque. Quand on parle d’un projet international, il y a le risque-pays. A partir d’un  certain nombre d’indicateurs, l’entrepreneur juge si ce pays est opportun ou pas. On distingue trois étapes dans la prise de décision d’investir à l’international.Cette décision est spécifique à l’entreprise. Dans une deuxième étape il y a le pays ciblé. Là entre en jeu le facteur risque-pays (risque politique, risque de change…). Il y a ensuite le mode d’entrée (risque contractuel).

Quelle a été la méthodologie utilisée dans votre travail d’enquête ?
Nos travaux visaient à estimer le risque-pays du Maroc à travers une appréciation de la perception des entrepreneurs implantés dans le pays au moyen d’un questionnaire. Celui-ci visait à déterminer le profil des entrepreneurs implantés au Maroc et leur comportement, leur perception des risques suivant leurs pays d’origines et leur emplacement. Et, en dernier lieu, le questionnaire devait établir comment le mode d’investissement a été choisi. En tout, nous avons sondé 167 entreprises sur l’axe Casablanca-Kénitra et dans le sud. L’échantillon se voulait complet avec une représentation de tous les pays d’où émanent les investissements étrangers. L’enquête s’est déroulée entre l’été 2004 et l’été 2005.

Comment ces investisseurs étrangers perçoivent-ils le Maroc ?
Nous avons déterminé à partir des réponses, cinq grands facteurs positifs. Il y a lieu de noter d’abord que la perception des conditions politiques est positive. C’est-à-dire pour ces entreprises le risque politique du Maroc est évalué de manière positive dans le sens d’une légitimation des institutions politiques. Le deuxième point positif, c’est par rapport au marché de la main-d’œuvre. Depuis quelques années, les opérateurs étrangers ont l’impression que le gouvernement met l’accent là où il faut, sur l’éducation et la formation. Le troisième élément positif est l’évolution de la protection des droits d’auteur et de la propriété intellectuelle. Le Maroc a fait des progrès à ce niveau. Il y a aussi une notable amélioration du risque de change et du transfert.

Par transfert, vous entendez rapatriement de bénéfices ?
Exact. Les entreprises étrangères ont toute latitude de rapatrier leurs bénéfices. Et là à, mon avis, il y a un problème dans ce sens où c’est tout l’argent en général qui est rapatrié. Quand on sait qu’une partie de l’investissement est levée au Maroc auprès des banques marocaines, on se rend compte qu’il y a un dysfonctionnement majeur, une situation à clarifier.

Au terme de l’étude, quelles sont vos recommandations ?
L’intérêt de cette recherche c’est de démontrer que le Maroc ne peut plus baser sa politique d’attraction des investissements sur la privatisation. Cette étude permet de mieux segmenter le marché de l’investissement étranger et de le décliner en fonction des régions et des implantations.

Les points à améliorer

Les entreprises étrangères implantées au Maroc relèvent quelques faiblesses dans l’évaluation du risque-pays. Les performances sociales passent pour le maillon faible. Sachant que l’enquête s’est déroulée au tout début de l’année 2005, cette appréciation a sûrement évolué auprès des investisseurs, relève M. Malki. L’arrivée entre-temps du Code de travail contribue aussi dans l’appréciation des investisseurs. Sur le plan économique, l’absence d’une visibilité à long terme en dépit des différentes politiques sectorielles est relevée par les opérateurs étrangers. Le retard pris par le démarrage effectif de l’Agence de la concurrence est également souligné. Le coût logistique est indirectement évoqué, les entreprises étrangères jugeant que les infrastructures du  pays n’étaient pas entièrement aux normes en 2005. Décriée aussi, la fiscalité au niveau de l’IS (Impôt sur la société). De plus, les coûts de la masse salariale sont lourds pour une entreprise qui s’implante.

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