Chroniques

Hors-jeu : Un entraineur BCBG

Deux hommes, la cinquantaine bien entamée, attablés dans un café de Casablanca, devisent à propos du sport national. Ils n’ont pas l’air de trop s’y connaître, ce qui ne les empêchait pas de discuter ferme de la sélection nationale et de la polémique soulevée par presse interposée à propos de l’éventuel changement de l’entraîneur des Lions de l’Atlas, Baddou Zaki. La presse nationale, et même internationale (France-football et l’Equipe) ont longuement dissertée sur cette affaire, ces dernières semaines. Celui qui refuse catégoriquement une telle perspective et défend Zaki, est modestement habillé par rapport à son interlocuteur. Il porte un bonnet traditionnel et sirote bruyamment son thé à la menthe après chaque phrase prononcée. Il base son raisonnement sur le fait que le coach national ne peut être sujet à reproche, du moment que son parcours avec les Lions de l’Atlas, notamment pour ce qui est des matchs de qualifications pour la phase finale de la CAN 2004, s’est déroulé sans accroc. Pas une seule défaite, un seul match nul acquis à l’extérieur du pays, aucun but encaissé et dix buts marqués. Pour, le monsieur en question, la formation mise en place par les soins de Baddou Zaki en dit long sur le flair et le savoir- faire de ce dernier. Il faudrait, par conséquent, que les choses continuent de la sorte, au moins jusqu’à la fin de l’édition 2004 de la CAN. Ce défenseur de l’entraîneur local ne voit aucune raison valable pour que les responsables de la Fédération courent après un entraîneur étranger, qui plus est, coûterait cher à leur budget déjà chiche. Tout engagement de la part de ce dernier ne dépasserait pas le stade des articles du contrat établi dans ce sens. En d’autres termes, l’entraîneur national est tenu en plus des termes juridiques du contrat, par l’engagement patriotique envers ses concitoyens qui le rencontrent dans la rue et qui risquent de se retourner contre lui s’il manquait à son devoir national. À l’opposé, son compagnon à la crinière grisonnante et la chevalière impressionnante par son rubis bleu, voit les choses d’une tout autre façon. Calme et souriant, il tient nonchalamment son cigare cubain entre l’index et le majeur et aspirait la fumée avec volupté. Son café express fini visiblement depuis un moment, il s’adresse à son ami en lui expliquant que la nécessité oblige parfois les décideurs à se passer d’un raisonnement logique. À voix basse, il chuchota à son interlocuteur que notre pays vise sérieusement l’organisation de la coupe du Monde 2010. De ce fait, notre sélection est une face importante du « visage » de notre football. Or, pour faire face aux médias étrangers, il faudrait parler couramment plusieurs langues étrangères et avoir un nom qui sonne et raisonne. Un coach étranger dispose également d’un autre atout : il impressionne les joueurs en s’adressant à eux dans une langue qui n’est pas la leur. De cette façon, personne ne pourrait répliquer ou discuter ses décisions de peur d’être traité d’analphabète. C’est un plus que d’avoir un nom familier aux médias étrangers et aux décideurs de la FIFA. L’homme à la vision moderniste qui, plus est, se veut réaliste essaye de faire comprendre à son ami au bonnet que les choses le dépassent, lui et le public jugé inculte. Rajustant son bonnet, le défenseur de Zaki se lève et quitte son interlocuteur sans prononcer le moindre mot.

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