Chroniques

Label marocanité : Parlons marocanité

© D.R

En devisant avec des amis américains, j’ai revendiqué, sans complexe, ma double appartenance au Maroc et à la France. Plus facétieux, j’ai affirmé en tant qu’américains, ils n’ont pas d’histoire. Tout juste une mémoire. Et que je plongeais, quant à moi, ma double identité dans deux pays qui ont une longue tradition historique.
On prétend impossible d’appartenir à deux ou plusieurs nations à la fois. Le cas marocain, avec son émigration, est la preuve du contraire. Combien sont les nouveaux Belges, Hollandais, Français, Espagnols…qui se sentent profondément marocains tout en adhérant aux valeurs et aux traits communs de leurs sociétés respectives. Les extrêmes droites de ces pays aiment à qualifier cette double appartenance de double allégeance. Dans le même temps, c’est, généralement, dans ces identités plurielles, où les attachements nationaux s’entremêlent, qu’on trouve les éléments les plus énergiques et les plus féconds en matière de dynamique sociale.
Sur la nation française, c’est très difficile de ne pas en dire. Ecoutons celui qui fut, parmi les illustres, le plus éloquent sur le sujet, Ernest Renan : «L’homme n’est esclave ni de sa race ni de sa langue ni de sa religion ni du cours des fleuves ni de la direction des chaînes de montagnes. Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de coeur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation. Tant que cette conscience morale prouve sa force par les sacrifices qu’exige l’abdication de l’individu au profit d’une communauté, elle est légitime, elle a le droit d’exister».
C’est quoi cette «conscience morale» qui qualifie la nation marocaine ? Beaucoup semblent, ces derniers temps, s’interroger à ce sujet
Sur le plan juridique, au sens anglo-saxon, le Maroc est une nation, c’est-à-dire un État indépendant qui frappe la monnaie. Il est doté d’institutions spécifiques. Il a son propre siège aux Nations Unies…. Mais qu’en est-il sociologiquement de la question, au sens français du mot?
Dans l’acception sociologique, une nation existe dès lors que des êtres humains jugent en former une. Ils souscrivent à une adhésion à des traits communs, historiques, culturels, ethniques, linguistiques ou religieux.
La mosaïque des différences, culturelle et folklorique, se solidifie et s’exacerbe par des valeurs chauvines destinées à réaffirmer l’idée de nation. Ce sont tous les symboles et emblèmes à ressort patriotiques et politiques dont se dote toute Etat-Nation : drapeau, hymne, personnification, slogans… Quels sont les traits communs et profonds des Marocains ? Qu’est-ce qui fonde l’esprit de la marocanité? Quel est le secret de cette émotion muette qui fait vibrer au plus profond de soi aussi bien le Tangérois que le Casablancais en passant par le Soussi ? Pourquoi telle blague peut-elle soutirer le rire aux éclats de chacun de nous? Comment tel chant nous soulève-t-il jusqu’à la frénésie alors que l’autre nous plonge dans la même morosité. Voilà des questions qui, en ce cinquantenaire de l’indépendance, seraient prétextes à de beaux débats.

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