Chroniques

Point de vue : 12 septembre, fin de l’impunité ?

© D.R

C’est ce 12 septembre qu’entre en vigueur la loi sur les violences faites aux femmes dans notre pays.

Adoptée par le Parlement, cette loi punit (amendes et peines de prison) toute personne coupable de violence, de harcèlement sexuel, de diffamation, d’injures sur une femme.

Que prévoit donc cette loi ? Les harceleurs sexuels dans les lieux publics que ce soit par des propos ou des comportements à connotation sexuelle ou par des actes à caractère sexuel seront punis de peines allant de 1 à 6 mois de prison et d’amendes allant jusqu’à 10.000 dirhams. La diffusion de fausses images, de rumeurs mensongères, de diffamations et de calomnies visant à nuire à la vie privée, à l’honneur ou à la réputation d’une femme sera punie, quant à elle, de 1 à 3 ans de prison et d’amende de 1.000 à 20.000 dirhams.

Les personnes condamnées pour harcèlement, agression, exploitation sexuelle ou violence contre une femme se verront interdire d’approcher du lieu de résidence de la victime ou de la contacter pour une période de cinq ans.

A noter que les époux violents sont soumis aux mêmes règles, prévues dans cette loi.

La loi donne par ailleurs une définition du harcèlement. Est qualifié de harcèlement tout agissement, paroles, gestes à caractères sexuels ou à fin sexuelle, messages écrits, et utilisation d’enregistrement ou d’images à caractère sexuel.

La peine est doublée s’il s’agit d’un collègue de travail.

Le mariage contraint est lui aussi punissable. En effet, une personne qui oblige une fille à se marier sous la menace ou en usant de la force est désormais passible d’une peine de prison de six mois et d’une amende de 10.000 à 30.000 dirhams.

Une loi donc, un cadre, enfin ! Pour autant, connaissant notre société, cela suffira-t-il à endiguer cette vague grossissante de violence, de viol, de harcèlement dont la femme marocaine est la victime ?

La 1ère condition pour qu’elle ait un effet est qu’elle soit appliquée avec rigueur et avec équité ( ?!) – sans exceptions, sans passe-droits, sans clémence téléguidée. L’autre condition est que l’éducation accompagne cette loi : à l’école et dans la famille, les deux ayant un rôle complémentaire à jouer. L’autre condition, pour moi, est de pratiquer dès le jeune âge une réelle mixité: apprenons aux jeunes Marocain(e)s à vivre ensemble, dans le respect, dans la complicité, dans la proximité, cessons de faire des unes des proies potentielles, cessons de faire des autres des prédateurs en puissance. Tant que nous inculquerons ou laisserons la rue inculquer ces jeux de rôle, les filles vivront toujours comme des cibles, devant perpétuellement être sur leurs gardes, et les garçons comme des chasseurs dont la virilité se doit de se manifester ainsi.

Pour une grande partie c’est nous-mêmes qui, en perpétuant ces stéréotypes, fabriquons les harceleurs.

Il est visible tant sur les réseaux sociaux que sur le terrain que toute femme victime de violence ou de harcèlement devient très vite la coupable – et non pas la victime – tant le pauvre homme est soumis à ses pulsions qui ne peuvent qu’avoir été attisées par la femme, érigée en symbole de la tentation. Enfin ne nous y trompons pas, rien de durable ne pourra être construit tant que l’éducation sexuelle ne (re)trouvera pas sa place : qu’attendre d’autre qu’un comportement basé sur la violence de la part d’une trop grande partie de la gent masculine tant que le jeune, l’adolescent, n’aura pour images de l’amour et du rapport sexuel que celles dont il s’abreuve sur les sites porno.

Certes au moins, dorénavant existe une loi, mais le côté répressif  ne résoudra pas tout, agissons sur les causes !

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