Chroniques

Point de vue : Que vivent les festivals !

© D.R

Depuis quelque temps fleurissent les appels au boycott du Festival Mawazine !!!!????

Selon la logique (mais y en a-t-il une?) viendront les appels au boycott  du Festival Gnawas, du Festival des Musiques Sacrées… quoi d’autre ?

J’ai exprimé mon point de vue sur les appels au boycott concernant les sociétés que l’on sait : expliquant que si l’on ne savait pas d’où ils venaient ces appels étaient tombés en terreau fertile. Les disparités sociales, le mal-être, les injustices ont trouvé là un moyen de s’extérioriser, hélas on mesure l’ampleur des dégâts aujourd’hui…

À présent donc c’est la culture qu’il faudrait boycotter, bien sûr certains s’empressent d’affirmer qu’un festival ce n’est pas «la culture», peut-être mais c’est DE la culture, et la culture n’est pas un luxe, la culture n’est pas superflue, la culture ne saurait être réservée à ceux qui ont la possibilité d’aller s’en abreuver dans des salles payantes ou à l’étranger.

La culture est vitale, elle est le sel et le pain de nos esprits, de nos âmes, notre jeunesse en est avide, la culture fait briller les yeux et les cœurs, elle fait briller la renommée d’un pays à l’international et disons-le haut et fort notre jeunesse «s’éclate» dans ces festivals, elle y vibre, elle y danse, elle y chante, elle y vit. Les appels à leur boycott ne viendraient-ils pas de censeurs, camouflés dans leurs barbes qui veulent ici surfer sur l’air du temps pour «prendre leur revanche», revanche sur quoi et sur qui d’ailleurs ? Oui un festival coûte de l’argent, mais pourquoi cacher l’autre moitié de phrase: un festival rapporte aussi de l’argent, je vais rester très basique : combien d’hôtels, combien de moyens de transports, combien de restaurants, combien d’artistes, combien de sociétés de sonorisation, d’éclairage, de communication, combien de «petits boulots» y puisent des recettes non négligeables… et donc combien de nos familles ???!!!

Il faut absolument cesser de faire croire que la culture «ne rapporte» rien, elle est un apport inestimable sur le plan du vivre-ensemble, sur nos mentalités, sur notre psychologie, sur notre société… mais disons-le aussi clairement elle est une vraie et importante source d’apports financiers !

L’équation : «On organise Mawazine, alors que nombre des nôtres vivent dans la pauvreté» est une imposture pour ceux qui tirent les ficelles, bien évidemment elle résonne tout autrement dans les oreilles des nôtres qui vivent dans la précarité…

Ce populisme fait une seule victime: nos concitoyens qui se font berner et qui deviennent otage de manipulateurs…

Prenons garde : sans un sursaut d’ampleur nous nous préparons des jours douloureux, comme toujours les femmes, les jeunes, la culture en seront les premières victimes. La vidéo du tabassage de la jeune femme à Safi, parce qu’assise dans une voiture avec un ami, doit être le signal d’alarme, il est déjà bien tard. Alors oui luttons et agissons contre la pauvreté, contre l’exclusion, contre la corruption, oui pour des écoles dignes de ce nom, des hôpitaux où l’on nous soigne et ne nous tue pas, oui il est vrai que les disparités sociales menacent notre vivre-ensemble, que les injustices attisent rancœurs et rancunes, oui il est temps – plus que temps – que politiques, élus, partis en prennent enfin la mesure -et les mesures- mais de grâce ne sacrifions pas la culture, elle est ce qui nous maintient encore dans un restant d’Humanité. À ceux qui disent qu’un festival n’est pas la culture, je dirais qu’il est indispensable que les grands festivals annuels s’attellent à ce qu’effectivement leur édition annuelle se décline en politique de culture de proximité : qu’ils créent des studios pour notre jeunesse, qu’ils dotent maisons de jeunes et centres culturels d’instruments, qu’ils offrent des formations, qu’ils créent des écoles, des conservatoires…il y a tant à faire ! Mais les boycotter reviendrait à nous priver de cet apport d’oxygène dont nous avons tant besoin, de cette fenêtre sur le monde, de cet enrichissement par l’ouverture, de cette contribution à notre identité, de cet indispensable moyen d’expression vitale pour notre jeunesse en particulier et nous tous en général… Boycottez les festivals, éteignez la culture, rendez muette la musique et vous ferez de nos jeunes des êtres décérébrés et dépourvus de sensibilité ! Que certains obscurantistes ne pensent pas remplir ainsi les mosquées ce sont les prisons qu’ils rempliront, que d’autres ne pensent pas lutter ainsi contre la pauvreté ils ne feront qu’y ajouter la pauvreté intellectuelle…

Arrêtons d’insulter notre intelligence et que vivent les festivals !

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