Chroniques

Un vendredi par moi

L’islamisme est-il une forme de nazisme?
Des auteurs ne sont pas loin de le penser. Boualem Sansal, écrivain algérien, auteur d’un récent ouvrage sur le drame de son pays, «Le village allemand ou le journal des frères Schiller»*, n’y va pas avec le dos de la cuillère. Il a «de plus en plus le sentiment d’une similitude entre le nazisme et l’ordre [il devrait parler du désordre] qui prévaut en Algérie et dans beaucoup de pays musulmans et arabes.»  L’excès appelle l’excès et l’abus de violence qui oppose pouvoir et islamistes explique en partie l’outrance de l’auteur meurtri. Le Nouvel Observateur du 3 janvier qui lui sert le couvert à cette occasion ne s’y est pas trompé en voulant voir insidieusement dans son ouvrage la proposition d’une «nouvelle vision des rapports entre le «croissant et la croix gammée.»». L’auteur algérien ne dénie pas l’amalgame et la remise à jour par là d’un ouvrage** de Roger Faligot et Rémi Kauffer, datant de 1990, qui prétendait dévoiler les secrets de l’alliance entre l’Islam, et non pas l’islamisme, et le nazisme d’Hitler, donne un aperçu éloquent sur l’abjecte tendance à réduire par «mégarde» un milliard de Musulmans à de petits nazillons. De l’islamisme à l’Islam, il n’y a qu’un glissement étymologique pour produire une avalanche sémantique. On aura beau hurler que la violence qu’étale atrocement une forme de l’islamisme n’a rien à voir avec la quasi-totalité des Musulmans, il y aura toujours des «spécialistes du monde musulman» pour ramener éternellement le débat au «choc des civilisations». Sans avoir vraiment tort. Au train où vont les choses, il faudra bien se rendre à l’évidence : il y a bien une guerre entre deux façons de vivre et de voir le monde, l’une rudimentaire et blessée, l’autre savante et omnipuissante, mais l’agresseur n’est pas toujours celui que l’on croit. Il n’est pas question d’absoudre l’islamisme de ses tendances totalitaires, ni la plupart des régimes arabes et musulmans de leur incurie servie par leur forte propension à l’autoritarisme. Mais prétendre qu’il y a superposition entre le croissant et la croix gammée équivaudrait à dire que toutes les croix de l’Occident chrétien sont gammées. Les plus fougueux ajouteront qu’après tout, le nazisme est né en terre chrétienne. Avant que la mauvaise conscience occidentale ne redécouvre sa judéo-chrétienté, l’église a bien souvent fermé indulgemment les yeux sur ses crimes. La guerre germanique, contre la France et l’Angleterre notamment, n’a probablement pas laissé insensibles les mouvements nationalistes des pays arabes et musulmans, voire de l’Afrique subsaharienne. Deux facteurs majeurs expliquent et justifient cette «sympathie» : l’atrocité des crimes nazis n’est apparue au grand jour qu’après la fin de la guerre tandis que les adversaires de l’Allemagne n’étaient autres que ceux-là mêmes qui maintenaient les peuples de ces pays sous un joug colonial des plus oppresseurs, pillant leurs richesses, exploitant leurs femmes et hommes, humiliant leurs ressortissants. Pour ceux-ci, d’avoir contribué par leur sang à la défaite de l’Allemagne, ne leur a pas servi apparemment à grand-chose.

Le Nouvel Observateur, du moment qu’on y est, a fait sensation en publiant une couv’ racoleuse de Simone de Beauvoir nue. Le Monde du 12 – 13 janvier fait état de l’émoi suscité chez les féministes par cette utilisation de l’image de la célèbre compagne de Jean-Paul Sartre et néanmoins philosophe de renom, à l’occasion du centenaire de sa naissance. Je découvre au détour d’une phrase que auteur a désormais un féminin, auteure. Les rondeurs de Simone, surtout retouchées par les esthéticiens de l’hebdomadaire, c’est, certes, du beau voir, mais je comprends que Le Monde hésite à utiliser auteuse pour ce nu notoire.

* Gallimard
* Albin Michel

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