Culture

A la une: La littérature de caniveau fait recette

© D.R

Bonne nouvelle pour les papivores : la nouvelle rentrée littéraire se présente sous le signe du caniveau ! Michel Houellebecq, considéré comme le pape de cette littérature ordurière, en avait déjà donné le ton. Bien avant même la sortie de son nouveau roman, le 31 août, « La Possibilité d’une île » (490 pages), paru chez l’éditeur Fayard, ce messie de ce l’on présente comme « nouveau genre littéraire», connu sous le nom anglo-saxon « white trash » (raclure blanche), était sur toutes les lèvres. Photos de couverture du roman, traduit déjà en plusieurs langues, dont l’anglais « Possibility of an Island », celles de son auteur et force explications sur sa « littérature » avaient fait le tour du monde. Les grands journaux de la planète avaient fait leurs manchettes, ou leurs gros titres, sur ce roman et son auteur auto-désigné « prophète amateur ». Les télévisions les plus influentes avaient également passé en boucle les images de cet auteur.
Quelques exemplaires de ce roman distribués par l’éditeur au compte-gouttes, à charge pour les « journalistes amis », -et pour entretenir le suspense-, de ne pas en parler dans leurs publications et autres journaux télévisés. Certains journaux avaient par ailleurs ouvert leurs colonnes à des « plumes libres » pour défendre l’auteur. D’autres, qui n’avaient pas trouvé grâce aux yeux de l’éditeur, avaient tiré à boulets rouges sur cet auteur «trash ». Cette campagne rappelle celle de l’an dernier, – un véritable clash médiatique-, suscitée par la parution du roman « Plateforme » dans lequel Houellebecq avait pondu cette prévision scandaleuse : « l’avenir de l’Humanité sera la prostitution », sans oublier que Houelbecq y a donné la pleine mesure de son islamophobie, de sa misogynie, c’est-à-dire de son mépris des femmes, en les ramenant pêle-mêle au statut de «strip-teaseuses »… Ce roman, fruit d’un séjour « très peu catholique » dans les pubs de la Thaïlande,-« paradis du tourisme sexuel »-, pas plus que le présent « Possibilité d’une île », -produit d’une équipée très érotique en Espagne et en Irlande du Nord-, ne devaient pas laisser indifférent. Houellebecq semblait avoir trouvé le filon, après le très peu d’intérêt avec lequel ses premiers livres avaient été accueillis : « Particules élémentaires » et « Extension du domaine de la lutte ». Animé, paraît-il, d’un sentiment de revanche, il fait alors de la haine de son époque son kérosène. Autant que ses «frères d’armes » nihilistes : Dantec, Soral, j’en passe et des meilleurs. Que faut-il voir dans cette montée de la littérature « trash » ? Rien qu’un effet de mode, pour reprendre un terme très cher à cette belle époque-marketing. Houellebecq, comme ses nombreux clones, en est bel et bien le produit. Si certains se plaisent à saluer son style, -Houellebecq est présenté comme l’un des plus grands stylistes de la littérature française contemporaine-, faut-il pour autant le considérer comme un grand écrivain ? Suffit-il de maîtriser les techniques d’écriture pour se voir parachuter à ce niveau ? Or, justement, qu’ont apporté ces nouveaux messies au patrimoine littéraire de l’Humanité ? Qu’ont-ils ajouté à l’immense et impressionnant héritage littéraire légué par Flaubert, Hugo, Proust, Arthur Rimbaud, René Char, Steinbek, Cervantes, Dostoievski, Herman Hesse, Ionesco, Sophocle, Imroo al-Qaïss, Omar El Khayyam, James Joyce, Najib Mahfoud, Ismaël Kadaré, Kateb Yassin, Wole Soyinka, Mahmoud Darwich, Assia Djebbar, Mohamed Zef-Zaf… La comparaison, ici, n’est pas raison. Ces écrivains, entre plusieurs autres, ne durent pas leur célébrité à l’unique rhétorique littéraire ; si, là justement, ils avaient fait leurs preuves, ils n’ont pas fait du « caniveau » leur pain béni, loin de là.
Ces écrivains savaient que la littérature était d’abord, -et doit le rester-, une question de valeurs. Des valeurs humaines, alors trop humaines, pour emprunter une expression-culte au grand philosophe allemand Frederich Nietzsche. Ou encore cette autre formule consacrée de l’auteur du célèbre roman « L’Idiot », Dostoievski : « Il n’y a que le beau qui peut sauver le monde». Mais, hélas, cela n’est pas entendue de la même oreille. On a de la peine à voir que des «fouille-poubelle» soient bombardés «écrivains », que le noble métier d’écrire soit réduit à une question de « strip-tease sentimental » et que le lecteur ne soit plus considéré que comme un « voyeur », avec ce que cela suppose en termes de pathologie. Tout comme le métier de strip-teaseuses, pour être écrivain, il faut « se dénuder », c’est le moyen le plus sûr pour appâter le commun des «lecteurs-voyeurs». Le reste, c’est-à-dire l’essentiel, ne serait alors plus que de la « mauvaise littérature ». C’est, du moins, ce que semblent nous dire nombre de (grands) éditeurs. La logique minable du marketing l’a, hélas, mille fois hélas, emporté. Qui a dit que la culture était une marchandise ?

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