Culture

Le métier ne nourrit pas les jeunes créateurs

Comment vit un jeune créateur dans notre pays ? Est-ce facile ? Comment arrive-t-il à montrer ses oeuvres ou l’étendue de ce qu’il sait faire? La question est vaste et chaque mode d’expression artistique comprend des spécificités qui le distinguent des autres. Les difficultés rencontrées par les jeunes musiciens ne sont pas celles auxquelles sont confrontés les plasticiens ou les comédiens. Mais difficulté il y a, et cette difficulté peut être si harassante qu’elle décourage parfois ceux de qui l’on est fondé d’attendre le meilleur. Deux domaines reflètent la très dure entrée en la matière qui attend les jeunes artistes: l’art contemporain et le cinéma. En ce qui concerne le premier mode d’expression, la porte est d’emblée fermée : il n’existe pas de marché de l’art contemporain au Maroc.
Il n’existe pas de galeries spécialisées dans la promotion des jeunes plasticiens. Le jeune artiste Younès Rahmoun dit: «je vis des bourses que les pays étrangers m’accordent et des expositions hors de nos frontières. Je vis péniblement de mon art, mais grâce aux subventions d’autres pays». Ce jeune artiste vit et travaille pourtant au Maroc. Son oeuvre qu’il expose ailleurs est réalisée chez nous. Il n’est pas le seul.
Safaa Erruas dont les oeuvres ont été montrées à la dernière biennale de Dakar abonde dans le même sens. «Le vrai problème, c’est que ce sont les étrangers qui viennent nous chercher».
Elle impute ce désintérêt au manque d’une véritable politique culturelle dans notre pays. Elle ajoute : « Je ne vis pas de mon art. Je gagne très peu d’argent. J’ai encore de l’espoir parce que je suis jeune, mais je me vois mal, au bout de 20 ans, dans la même situation».
Il ne s’agit pas de dire que ces jeunes artistes réclament de l’assistanat. Leur art est le seul capable de les imposer. Mais ils ont besoin d’encouragement et de structures professionnelles de nature à faciliter leur introduction dans le monde de l’art. Quoi que l’on dise, cette responsabilité incombe à l’Etat et aux institutions. Un pays comme la France qui s’investit dans la promotion des jeunes créateurs peut servir d’exemple. L’Etat, par le biais des Directions Régionales des Affaires culturelles (DRAC), aide à la réalisation de la première exposition. Cette aide est versée aux galeries qui font à un jeune artiste sa toute première exposition. C’est un encouragement qui a porté ses fruits. L’Etat a créé également certaines procédures qui poussent à la création, comme la commande publique à de jeunes créateurs et son corollaire le 1% artistique. Le 1% artistique réserve, à l’occasion de la construction ou de l’extension des bâtiments financés par les collectivités territoriales, une somme (soit 1% du coût des travaux) pour la commande à des artistes vivants d’une ou de plusieurs oeuvres d’art qui seront intégrées au bâtiment. Les artistes, y compris les jeunes, soumettent leurs projets à un comité de pilotage qui sélectionne celui qui convient le mieux. C’est une excellente manière de montrer aux jeunes créateurs que la voie est ouverte à leurs idées et de les convaincre de leur utilité dans la société. L’Etat attribue également des bourses aux élèves des Ecoles des Beaux-Arts. Au Maroc, des gestes d’encouragement, ne serait-ce qu’en ouvrant des galeries aux jeunes artistes seraient plus que salutaires. Mais pour cela, il faut que les personnes qui sélectionnent ces artistes soient rompues à la chose artistique… En ce qui concerne le cinéma, la situation n’est guère brillante.
La Commission du Fonds d’aide a accordé des subventions aux jeunes cinéastes, lors de sa dernière réunion. C’est une action qui mérite d’être saluée. Mais les débuts des jeunes comédiens sont très difficiles en raison de l’obscurité qui accompagne les recrutements.
Le jeune acteur Mohamed Marouazi ne cache pas sa colère du fait qu’il «manque une vraie tradition de casting et d’audition au Maroc. Le choix de l’acteur doit répondre à des critères de sélection justifiés, et non pas être une affaire de téléphone arabe». Au demeurant, les jeunes acteurs ne vivent pas mieux que les jeunes plasticiens. Marouazi dit qu’il est «très difficile de gagner sa vie en tant qu’acteur. Un acteur doit très bien s’habiller et vivre convenablement pour exercer son art. Je suis obligé de faire autre chose pour vivre. C’est une perte de temps considérable pour mon art». «Ici, l’acteur prend le bus pour se rendre d’un endroit à un autre. Comment voudriez-vous que les gens qui le voient dans ce bus aient de l’estime pour lui ?» s’exclame, pour sa part, le jeune acteur Abdellah Didane. Cette estime vient aussi du statut que l’artiste n’a pas encore dans notre pays.

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