Culture

Maria Naciri : «Je n’ai pas voulu troquer mon micro contre une bague»

© D.R

ALM : À quand remonte votre première révélation ?
Maria Naciri : J’ai été l’une des premières révélations de l’émission «Musica» sur la chaîne RTM, il y a vingt ans. C’était la première émission télévisée consacrée aux artistes d’expression française et anglaise. Et j’ai remporté le premier prix, c’est ainsi que la voie artistique s’est offerte à moi comme une évidence. C’était mon épanouissement personnel et c’est devenu en fin de compte mon métier. Alors quand on a le privilège de vivre de sa passion, les considérations du star-système m’importent vraiment peu. Je «suis une star» dans le regard de mes parents qui m’ont toujours encouragée et me font confiance et cela me suffit. La célébrité ne veut pas dire le talent automatiquement.

Après plus de 20 ans, ne pensez-vous pas faire sortir votre propre album?
Eh oui ! Il y a toujours dans cette question une pointe d’agacement, comme si je dormais sur mes lauriers et que je ne manifeste aucune ambition de sortir de l’ombre de la voix d’une vedette. Et que je me cantonne dans mon trip d’interprète !
Et pourtant, interpréter est un exercice de style. Un vrai métier et un renouvellement sans cesse de répertoires pour ne pas lasser, arriver à être toujours au top vocal et mettre l’accent sur le répertoire qui conviendra à un concert, une soirée caritative ou une soirée à thème. Ceci d’une part et puis on a toujours le même souci. Je n’ai pas de producteur donc pas les moyens d’investir dans une création taillée à mon tempérament et ma couleur vocale. Je n’ai pas encore fait la rencontre musicale qui aura un aboutissement. J’ai passé plein de castings à l’étranger. On m’a proposé des titres, mais rien de percutant qui me corresponde vraiment. Alors au lieu de faire un bide, je préfère maintenir ma notoriété.

Vous avez tous les atouts d’une star de cinéma. Le 7ème art ne vous tente pas ?
J’ai eu une première expérience dans un film de Said Naciri où je n’ai pas eu un rôle de composition. Car j’étais dans mon propre rôle de chanteuse pendant deux minutes. Je ne serais pas contre une expérience toute autre mais je n’ai aucune prétention car on ne s’improvise pas actrice ou comédienne. C’est un talent à la base et même si je suis scénique, je ne sais pas quelles seraient mes capacités. Donc, appel aux réalisateurs qui pourraient voir en moi un de leurs personnages !

Quels sont les obstacles que vous avez rencontrés durant votre parcours?
Vous imaginez bien que quand j’ai démarré, il y a vingt ans, le regard sur le choix d’être artiste et dire que je suis chanteuse professionnelle n’était pas du tout celui d’aujourd’hui. Il y avait d’une part le mépris, la médisance et l’amalgame, j’ai donc véhiculé volontairement l’image d’inabordable pour me faire respecter dans le métier. Mon image, je l’ai construite en me disciplinant. Je disparaissais dès le micro rendu.

Etes-vous satisfaite de votre carrière ?
Je suis pleinement satisfaite de mon parcours, car je pense avoir assez bien orienté mes choix. J’ai ciblé mon auditoire et ma façon de me produire. Je suis devenue, au fil des événements, et selon la plupart des agences qui me font confiance et me mettent en avant de leurs projets et concepts de soirées, une référence, presque une garantie de sérieux et de fiabilité de prestations. J’ai réalisé mon rêve d’enfant, j’ai mon épanouissement de femme et j’ai, grâce à mes participations à des actions collectives d’artistes, une implication citoyenne engagée. J’ai chanté pour des causes, pour réunir des fonds pour aider des associations.

Quelle est la différence entre vous et Elissa?
(Rires). Je dois, en premier lieu, me sentir flattée que vous me comparez avec une star libanaise, mais je suis dans un autre registre musical. Je n’ai pas le même coaching, les mêmes moyens de production et si je peux me permettre le même «formatage» ! Je suis nettement plus humble. J’ai à mon actif l’immense chance d’avoir eu des succès dans des centaines de scènes diverses en tant que chanteuse marocaine interprète de jazz, soul, disco, rock, gospels… Et c’est pour cela que je fais des tournées à travers tout le Royaume et à l’étranger pour animer des soirées événementielles de sociétés nationales ou internationales. Je mène une vie riche en émotions et de challenges. Je vais librement où ma voix m’emporte.

Comment occupez-vous votre temps libre ?
Je ne suis pas une grande dormeuse donc mes journées commencent tôt !! Entre mes divers rendez-vous pour négocier mes contrats, je fais régulièrement trois heures de marche pour m’oxygéner, vider l’esprit, maintenir la forme physique car la vie de noctambule implique une certaine discipline. Ensuite, c’est toujours une quête artistique dans d’autres expressions. J’aime chiner chez les antiquaires, à la recherche de l’objet rare et original. J’ai mes périodes de dévoreuse de livres, découvrir des peintres. J’aime aussi aller au théâtre quand je peux !!!

Quelle place occupe l’homme dans votre vie?
Je vous répondrais en chanson à la «vaya con dios» «what’s woman without a man, what’s a man without a woman» … pas grand-chose ! Car il y a une complémentarité, une complicité, une alchimie dans les divers rapports que j’ai avec la gent masculine. Je ne suis qu’une grande enfant qui a toujours besoin d’amour, de tendresse de son père Si l’Haj Mohamed Naciri et de son frère Aziz, de leur présence, leurs conseils ainsi que de l’écoute de mes vrais amis !!!

Pourquoi vous avez choisi  de rester célibataire ?
Parce que ma définition du mariage ne correspond pas à deux solitudes qui s’accouplent pour former un malentendu. Je n’ai jamais eu une âme de Barbie qui attendait le prince charmant ou autre. Je suis une femme qui n’a pas voulu troquer son micro contre une bague, car j’ai mis des années à me construire et je n’ai pas accepté qu’on mette en balance une vie maritale et mon métier et ma passion. Il n’y a pas d’incompatibilité. Il y a des concessions à faire pour qu’un homme accepte que son épouse ait une vie de noctambule, des voyages mais tout est une question d’entente et de respect. Disons que je n’ai pas encore trouvé, comme le dit Coelho dans «L’alchimiste», «ma légende personnelle» il ne sera jamais tard, je suis une optimiste je crois au destin et j’aimerais tout simplement être l’Homme de ma vie «L’évidence» telle qu’elle est chantée par Grand Corps Malade.

Regrettez-vous quelque chose dans votre vie?
Je fais comme tous les quadras normaux parfois ce que j’appelle des arrêts sur image où je me repositionne, m’analyse sur tous les terrains, familial, professionnel, maladresses volontaires ou involontaires, quelle est ma valeur ajoutée? Et, sans auto flagellation, j’essaie d’avancer en canalisant mon énergie sur des choses plus essentielles, des challenges professionnels qui me grandissent et me réconfortent aussi sur mon choix de métier car tout peut être corrigé, amélioré avec le temps et l’intelligence de faire la part des choses sauf ma plus grande lacune et mon seul regret de femme, c’est d’avoir fait le deuil de la maternité.

Etes-vous féministe?
Je suis fière d’être une femme marocaine libre. Je ne suis pas que pour les droits de la femme, mais pour les droits tout court et le respect des obligations aussi de tous les citoyens! Je militerais toujours pour ce premier droit qui est essentiel, c’est d’abord et avant tout le droit à l’éducation. L’analphabétisme est la première source d’injustice, car pour se défendre, revendiquer, il faut connaître et pour connaître il faut savoir lire et comparer.

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