Culture

Sanaa El Aji : «Mon célibat est un choix assumé»

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ALM : Comment évaluez -vous votre parcours journalistique?
Sanaa El Aji : Je n’ai jamais rêvé être, un jour, journaliste. A la base, j’ai une formation en marketing et communication. Et comme j’avais un penchant pour l’écriture, je recevais, de temps à autre, des propositions pour publier des chroniques dans la presse. Il s’agissait plus d’une fonction temporaire que d’un engagement journalistique profond. L’expérience Nichane a été pour moi un déclic. J’ai commencé par la chronique de Batoul puis j’ai enchaîné avec le dossier sur les blagues . Suite au procès qui a été déclenché autour de cette matière, j’ai refusé de quitter le journalisme. C’était, en quelque sorte, ma manière de militer. C’est ainsi que j’ai intégré le domaine de la presse.
 
Votre premier exercice était assez chaud. Comment avez-vous réagi face à la condamnation ?
J’ai eu un grand sentiment d’injustice parce que j’estimais que personne n’avait évalué mon apptitude intellectuelle. Tous les regards ont été portés sur deux ou trois blagues. Or, je ne suis pas responsable de ce produit culturel. Au-delà du procès et de la condamnation, j’estime que c’est un dossier bien élaboré dont je suis particulièrement fière.
 
À travers vos écrits, vous avez brisé les tabous. Quelles sont les tares que vous n’avez pas pointées du doigt?
J’ai parlé dans mes publications des tabous qui me dérangeaient à savoir le rapport parents-enfants, l’hypocrisie dans le rapport à la religion, le rapport au corps, les relations hommes-femmes…, etc. Toutefois, le «populisme» est aussi un tabou à briser. On a toujours tendance à critiquer les hauts responsables tout en compatissant avec le peuple. Au contraire, le peuple n’est pas forcément victime. Il faut qu’il assume sa part de responsabilité et sort de sa passivité.
 
Vous êtes aussi romancière. D’où est née cette passion ?
Depuis que j’étais jeune, j’aimais lire. J’ai eu la chance d’être encadrée par des professeurs qui ont encouragé mon talent. Au lycée, j’ai remporté le premier prix de la nouvelle. En 2003, j’ai publié mon premier ouvrage «Majnounat Youssef». C’est une histoire d’amour entre un homme marié et une fille plus jeune que lui. A travers le fil conducteur, je parle de la relation homme-femme, le rapport au corps, la sexualité féminine hors mariage (mon sujet de thèse) ainsi que l’institution du mariage qui est mon sujet de prédilection. Depuis, j’ai arrêté partiellement, mon activité littéraire. Je travaille maintenant sur deux projets, des recueils de poèmes et de nouvelles.
 
Batoul Fdoulia et Majnounat Youssef vous ressemblent-elles ?
Batoul a un peu de mon caractère. Les lecteurs pensent qu’il s’agit de moi. A chaque événement par lequel passe le personnage, ils m’appellent pour me féliciter ou me soutenir. (Rires). Certainement quand on écrit, on se retrouve quelque part dans nos personnages.
 
On vous sent très féministe dans votre discours…
 Avec tout le respect que je dois au militantisme des féministes, je refuse qu’on me qualifie ainsi. Car, je n’aime pas me placer entant que victime pour défendre la femme. C’est plus simple de se confondre dans la communauté et de faire comme les autres, alors que beaucoup de femmes ont la possibilité de changer leurs situations. La responsabilité de chacune d’entre nous est d’arracher ses droits, d’assumer ses choix et de ne pas choisir la facilité pour fuir le regard de l’autre.
 
Comment vous vivez le rapport homme-femme au quotidien ?
Je le vis sereinement. Je suis rationnelle dans ma relation avec le sexe opposé. Je ne vois pas en lui l’autre partie qui me privera de ma liberté ni le prince charmant qui m’offrira le bonheur. Je suis une femme très indépendante et autonome. Je peux vivre seule sans me léser. Mon célibat est un choix assumé jusqu’au bout sans pour autant porter atteinte à l’institution du mariage. Je recommande la complicité et le partage au sein du couple. Quand ces deux éléments sont unis dans une relation, les deux partenaires peuvent enfin bâtir leur chemin ensemble.
 
N’avez-vous pas souffert du regard de l’autre?
Pouvoir assumer sa différence n’est pas chose facile. Je viens d’un milieu très modeste. Mes parents sont des gens simples et analphabètes. Et pourtant, j’habite seule dès mon jeune âge. J’aurais pu renoncer au début, car ce n’est pas facile de gérer, seule, son quotidien. Mais quand on est déterminé, on arrive. Et c’est peut-être cela qui permet à la société d’évoluer.
 
En parlant de responsabilité, pourquoi vous vous cachez derrière vos écrits au lieu d’intégrer le paysage audiovisuel ?
Je suis consciente que la télévision a plus d’impact que l’écrit. Je suis sur quelques projets actuellement, j’espère que cela va aboutir. Par ailleurs, j’ai eu quelques passages dans le paysage audiovisuel. J’ai fait de l’animation radio. De même, j’ai participé à des émissions économiques sur la deuxième chaîne. Comme, j’ai joué quelques rôles dans des productions cinématographiques et télévisuelles en l’occurrence Tayf Nizar, Tighaline, Tamazouk, Mi Taja et Oulad Nass.

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