Culture

Tayeb Laâlej : «Il faut éduquer le goût du public»

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ALM : Quelles ont été selon vous, les années de gloire du théâtre marocain ?
Tayeb Laâlej : Avec toute modestie, je dirais que notre époque était la meilleure. A notre début pendant les années 60, on travaillait jour et nuit, sans ennui. On se donnait à fond et on avait du respect pour le spectateur. On visait à donner de l’amour au public. Cet amour avait une spécificité, il se caractérisait par la peur. On avait tellement peur du public que lorsqu’on montait sur scène, nous avions le trac. Mais c’est cette même peur qui nous poussait à livrer le meilleur de nous-même aux spectateurs. En fait, on les respectait.
On se mettait constamment à la place du public, on ne se payait pas sa tête. On les faisait rire certes, mais nous n’étions pas la risée du spectateur, notre but était plutôt de les distraire et on le faisait avec amour. C’est de cette même façon que nous sommes arrivés à présenter des œuvres théâtrales de qualité. On se sacrifiait réellement pour notre public et on en était fiers.

Quelles sont ces genres de sacrifices dont vous parlez ?
Un simple exemple. On faisait des tournées du nord du Maroc, jusqu’en Afrique du Sud. On ne s’arrêtait pas. On travaillait sans relâche. Moi-même je laissais mes enfants alors très jeunes avec mon épouse, et on partait en tournée dans certaines villes éloignées. On dormait dans des semblants d’hôtels, où il y avait strictement rien. On ne mangeait pas, et on dormait mal. Ceci sans parler de notre salaire théâtral, les sommes qu’on recevait étaient très modiques. Mais malgré tout cela, lorsqu’on montait sur scène et que le public applaudissait avec force, on oubliait tout, nos peines, et toute notre souffrance.

Et aujourd’hui, quel est votre bilan du théâtre marocain ?
Il existe de vrais problèmes actuellement. Les goûts se sont dégradés, et on assiste à des productions théâtrales qui font vraiment de la peine, pire elles déçoivent. Il existe des comédiens qui ne sont pas doués et qui ne font preuve d’aucun talent. Ils contribuent à installer une médiocrité. Plusieurs travaux qui existent actuellement dérangent, mais il y a du bon quand même. Dans tout ce  désordre, il y a certains talents qui méritent d’être encouragés.

A quoi est due cette médiocrité qui s’est élargie ces dernières années ?
Je pense que le goût du public s’est dégradé, puisque à un certain moment il n’y avait que la médiocrité qui régnait, et le public s’est habitué à ce genre de production. Ils applaudissait même les comédiens qui n’avaient aucun talent. La médiocrité était devenue la règle.

Qu’est-ce qu’il faudrait faire alors pour pallier à ce phénomène ?
Ce sont toujours les doués et les bons qui sont marginalisés, mais finalement c’est les talentueux qui feront l’histoire. Il y a même un proverbe en arabe qui dit : « ne sert que le vrai et le dur, et le vide est emporté par le vent». Mais pour répondre à la question, je dirais que pour que le spectateur puisse distinguer la bonne production de la mauvaise, il faut éduquer le public. C’est pour cela, que le rôle du théâtre scolaire et universitaire et très important.

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