Culture

Une vie de retraité

© D.R

Certains rêvent de partir en retraite anticipée car ils sont à bout de leur rendement ou préfèrent déclarer forfait pour de multiples raisons. D’autres séniors souffrent en silence leur âge de retraite. Ils n’arrivent pas à joindre les deux bouts d’un quotidien pressant qui les accule aux abîmes des rectitudes de la vie. Une offense à la fierté d’un être qui a tant donné pour vivre dignement sa retraite. Des espérances qui dépendent surtout du régime de sécurité sociale auquel le salarié est soumis. Et puisque toutes les personnes âgées ne sont pas logées à la même enseigne, et que tout le monde ne bénéficie pas d’allocations de vieillesse, car soit il a exercé un métier libéral ou il a travaillé chez un patron qui n’était pas en règle avec les régimes de retraite, des milliers de femmes et d’hommes ayant bouclé leurs sixièmes décennies continuent à défier le joug du besoin. Ils continuent à travailler jusqu’à la fin de leurs jours. C’est le cas de H. Amina qui, malgré ses 66 ans, continue à vendre le « Baghrir » pour répondre à ses besoins. Une offense à l’équité de la vie dira-t-on, mais Amina prend les choses avec beaucoup de philosophie et n’espère qu’une chose: «Que sa santé ne la trahisse pas avant de quitter ce monde». Des cas comme Amina peuplent nos villes avec des fois des situations dramatiques. Ils ne peuvent, malheureusement, aspirer à aucune pension ou aide si ce n’est la solidarité familiale. En somme, un vrai besoin de protection sociale. Ceci dit, les personnes âgées qui bénéficient de pension de retraite représentent deux catégories. Ceux qui se la coulent douce et ceux qui l’ingurgitent amère. Ces derniers sont obligés de faire un petit job qui leur permettra de compléter leur maigre pension. La dernière catégorie est en régression depuis les dernières augmentations de salaire. Surtout depuis 2002 avec les nettes augmentations qui ont concerné les retraités de la fonction publique. De fait, il faut noter avec satisfaction que le régime de retraite a nettement évolué ces dernières années. Incomparable avec les pensions mensuelles qui ne dépassaient guère les 460 DH. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et le régime de retraite a nettement évolué dans l’intérêt de ses bénéficiaires. «Il y a des retraités qui touchent la totalité de leurs salaires de fonction. C’est une très bonne chose et cela nous permet de mener un bon train de vie. Alhamdou lillah», explique Mohammed Zerboub, un fonctionnaire à la retraite depuis déjà quelques années. Et d’ajouter : «ma journée est des plus paisibles. Après le petit déjeuner que je prends tôt car je suis matinal, je fais certaines courses puis je me dirige au café pour rencontrer d’autres retraités. On parle de tout : des événements de la veille aux tracs des neveux et des enfants. L’après-midi c’est la même chose. Et même au niveau des dépenses ce n’est pas comme lorsqu’on était jeune. Le peu de chose nous suffit. A cet âge on n’est pas gourmands ou pointilleux sur les détails. Notre espace se limite à trois endroits : maison, mosquée et café. Mais il faut dire que nous assumons de temps à autre des activités bénévoles. Notre grande satisfaction est de se sentir utiles». Position antonymique chez Hamid M’radi, un retraité de 70 ans, qui passe ses journées avec d’autres amis sur les bancs des jardins publics à jouer aux dames ou à discuter de la cherté de la vie. «Avec ma maigre pension qui ne dépasse guère les 1000 DH, je n’ai aucun autre refuge à part le jardin public ou les places qu’on vient d’aménager. Je ne peux payer 15 DH par jour pour deux cafés (matin et soir) pour prétendre à une chaise confortable. Ceci dit, je ne me plains pas. Seulement, j’ai peur de tomber malade et de ne pas pouvoir me soigner». Et d’ajouter avec inquiétude : «Je connais des amis qui sont malades et que leurs femmes sont aussi malades. Ils souffrent le martyre. En somme, une vie qui n’est pas écrite à l’eau de rose. Et je pense que la société et les responsables à tous les niveaux doivent accorder plus d’intérêt à cette tranche de la société. D’autant plus que le nombre des départs à la retraite commence à poser problème». De son côté, Yahia Mahmadi, vice-président de l’Association des retraités des enseignants, (plusieurs associations ont été constituées pour défendre les droits des retraités), explique à ALM que son association a pour but de soutenir les différentes actions menées par les retraités de l’enseignement, soit pour la régularisation des pensions ou leur mise à jour. «Avec ce volet revendicatif, nous organisons plusieurs activités à vocation illustrative. C’est le cas de la journée d’explication sur le régime de la retraite que nous avons tenue ou des voyages organisés à deux reprises vers la ville de Smara. On a aussi programmé deux visites aux lieux saints de l’islam». Et de conclure: «on veut se sentir utiles pour ne pas être exclus de la société et pour démontrer qu’on peut encore produire». Selon la Caisse interprofessionnelle marocaine des retraites (CIMR), 79% des salariés du privé ne disposent pas de couverture retraite. D’autant plus que seulement 15% des salariés du privé couverts par la CNSS ont une retraite complémentaire. Il est à rappeler en parallèle que le nombre de salariés déclarés à la Caisse nationale de sécurité sociale avoisinerait les 2,23 millions de personnes. Un chiffre qui relance le débat sur l’engagement des uns et des autres pour faire bénéficier l’ensemble des salariés de leurs pensions de retraite. Constat accentué par les actifs bénéficiant d’une couverture retraite et qui ne dépasse pas les 25% pour une dizaine de millions de travailleurs. Toujours selon la même source, sur 120.000 entreprises affiliées à la CNSS, seules 5.000 entreprises adhèrent à la CIMR. Un 4% qui en dit beaucoup et qui explique pourquoi les personnes comme M.M’radi aspirent à de meilleurs jours. Pour rattraper le manque en ressources et en prestations, la CIMR mène des campagnes de sensibilisation auprès des entreprises et de leurs salariés pour les sensibiliser à l’intérêt de la retraite complémentaire. C’est le cas des caravanes qu’elle organise du 2 novembre jusqu’au 21 décembre et qui concernera 13 villes marocaines. Une manifestation qui s’inscrit en cohérence avec la vocation d’œuvrer au renforcement de la responsabilité sociale de l’entreprise, vis-à-vis de ses salariés. C’est aussi pour atténuer les conséquences des changements profonds que connaît la société marocaine avec la fonctionnarisation, la montée en puissance de la cellule familiale mononucléaire et le relâchement de la solidarité familiale.

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