Culture

Youssef Madad : «Derb Sultan recèle une parcelle de notre histoire nationale»

© D.R


ALM : Que représente pour vous le quartier Derb Sultan? 
Youssef Madad : Je reste redevable à ce quartier parce qu’il est, en bonne partie, dans le façonnement des grands traits de ma personne. Il régnait, dans ce quartier, un environnement sociétal exemplaire de solidarité, de tolérance et de rayonnement, et tout cela dans une simplicité absolue.
 
Que vous a-t-il apporté ?
D’abord, les valeurs sociales essentielles. On arrivait à joindre la simplicité dans toute sa splendeur (humilité, dignité et grandeur de l’âme), à l’esprit de la débrouillardise. On se débrouillait pour vivre bien intensément tout en ayant le respect à l’égard de tous. Et s’il y a une valeur à mettre en relief, c’est la tolérance. On cohabitait à la perfection avec les soulards, les homosexuels, les serveuses de bar…

Quelles sont les figures de ce quartier que vous avez côtoyées?
J’ assistais aux matches amicaux de grandes figures du foot marocain au stade «Chili», tels que Dolmi, Petit Omar, Feu Gabbar… Ceci sans parler d’Ahmed Alghoul et de la Jablia (grande trafiquante du kif) et plusieurs amis intimes que j’ai retrouvés par la suite. Je garde toujours le souvenir des films italiens des dimanches matin au cinéma Al Kawakib, à travers lesquels nous avions une grande fenêtre sur le monde et son histoire à l’époque, sans oublier les films comiques dont nous faisait bénéficier une grande marque d’huile dans le cadre de sa campagne publicitaire de l’époque et qui se projetaient en plein air…  

Comment percevez-vous aujourd’hui Derb Sultan ?
Cela me fait trop mal de constater qu’il s’écroule, malgré toutes les résistances, sous le poids de la marginalisation. J’en profite pour lancer un appel à la réhabilitation de la mémoire de ce quartier et de tout l’apport à la richesse du patrimoine national. Je rappelle que la constitution du premier syndicat marocain (UMT) eut lieu au boulevard El Fida, sans parler de la place de Sraghna et des maisons de jeunesse de Bouchentouf et de Sidi Maârouf dans le rayonnement culturel de toute une partie de la génération des années 70.

Est-ce que vous gardez des liens avec ce quartier?
Je suis né dans une maison à Derb El Foukara, où habite jusqu’à aujourd’hui ma sœur adoptive. Mon frère aîné habite une maison qui est mitoyenne de celle où j’ai grandi à Bouchentouf. C’est pour vous dire les liens que je garde avec ce quartier. Il m’arrive d’y aller des fois et je ne vous cache pas l’amertume que je ressent à constater l’ampleur de la déchéance de ce quartier, autrefois rayonnant.

Pourquoi sentez-vous cette nécessité de réhabiliter ce quartier ?
Ce n’est nullement pour des raisons nostalgiques, mais parce que, tout simplement, il se trouve que ce quartier recèle, une bonne partie de notre histoire nationale qui peut constituer une raison valable pour investir dans un projet de réhabilitation de mémoire, mais aussi de valorisation de potentiel.

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