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Éditorial : Argent spécial

Pour la première fois, l’argentier du Royaume communique sur les comptes spéciaux du Trésor (CST) qui représentent près de 14% du budget de l’État. Ce qui est énorme. À l’occasion de la présentation du budget 2005 devant les députés, Fathallah Oualalou a levé un coin de voile sur le montant de cette manne et les départements ministériels bénéficiaires. Démarche louable qui s’inscrit dans une optique de transparence des fonds publics.
Visant officiellement à permettre une optimale “ mise en oeuvre des orientations du gouvernement et (…) à assurer une meilleure allocation des ressources budgétaires affectées auxdits comptes et la rationalisation des dépenses programmées dans ce cadre“, les CST n’en sont pas moins enveloppés d’un halo de mystère . Malgré son épaisseur, le document dédié à ces comptes est écrit dans un jargon comptable abscons dont la lecture n’aide en rien à la compréhension du texte et surtout des chiffres.
Les chiffres ! Justement, l’essentiel, noyé dans des généralités et des lieux communs, reste escamoté, à savoir l’usage fait de ces fonds exceptionnels et les projets qu’ils sont supposés avoir financés dans différents secteurs, sociaux, économiques, sportifs, culturels et autres. De tout cela, on ne sait rien du tout. De ce côté-ci, c’est le silence intégral. Ce qui réduit à néant la volonté de transparence de celui qui tient les cordons de la bourse du pays. Si les CST sont considérés comme un instrument de recherche de la “performance“ budgétaire, ceci ne doit pas être synonyme d’opacité quant à la manière dont ils sont dépensés.
Il n’est pas normal que cela échappe au contrôle de l’appareil législatif qui reste tenu dans le brouillard total. Plutôt que de favoriser la culture de transparence, cette situation est propre à cultiver le culte du secret, voire de la suspicion. En effet, l’idée générale est que la manne des CST sert à financer, selon le mode et le fonctionnement des caisses noires, des objectifs inavoués qui n’ont rien à voir avec les intitulés officiels. Résultat : on ne sait pas si l’argent des comptes en question est utilisé à bon escient ou non. Seul moyen de rétablir la confiance, faire accéder le Parlement aux livres de ces comptes de telle sorte que les députés puissent disposer d’un bilan annuel des CST à l’occasion de la discussion du budget de la nation.
Au Parlement de jouer son rôle de contrôle au sens plus large du terme du travail du gouvernement s’il ne veut pas être seulement réduit à ce qu’il a toujours été, une Chambre d’enregistrement de la majorité. Car jusqu’ici, le Parlement avec ses deux Chambres a du mal à faire office de contre-pouvoir à l’appareil exécutif. La dernière augmentation du traitement des députés à hauteur de 6.000 Dhs décidée par le cabinet Jettou ne doit pas se traduire par une baisse déjà chronique de l’action parlementaire. Il ne faut pas confondre comptes spéciaux ou très spéciaux et comptes personnels…

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