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Éditorial : La pêche de papa

La pêcherie du poulpe a repris samedi 15 mai après un repos biologique instauré en septembre dernier. Prise par le ministère de tutelle sur la base d’un rapport alarmant de l’INRH (institut national de la recherche halieutique) qui a tiré la sonnette d’alarme sur la dégradation de la ressource céphalopodière, cette suspension de l’effort de pêche, qui n’arrange pas les affaires des armateurs, a été notamment mal vécue par les marins-pêcheurs qui sont les grands perdants puisqu’elle réduit leur temps de travail à 5 mois sur l’année sans possibilité d’aucune compensation financière.
Pour désamorcer la crise et la colère des opérateurs, le ministère a concocté sous la bannière de la primature une stratégie qui a été approuvée en mars dernier par les trois segments du secteur ( pêche hauturière, côtière et artisanale). Ce plan, censé organiser l’activité du poulpe, répartissait les prises comme suit : 12.600 tonnes pour la hauturière, 22.000 tonnes pour la côtière et 5200 pour l’artisanale. Or, sur le terrain, ces accords ont été violés dès le premier jour de la reprise de l’activité par les deux derniers segments dans la zone sud . Résultat : les barques et bateaux qui ont repris la mer dépassent de loin le nombre autorisé. Au lieu de 100 dans la côtière et 2500 dans l’artisanale, on s’est retrouvé avec presque le double des unités de pêche. Tout le monde est sorti en même temps. La ruée sur le poulpe. Tout se passe comme si le jeûne marin forcé n’avait fait qu’aiguiser les appétits dans des proportions confinant à la voracité.
La marine royale est intervenue pour imposer l’ordre mais elle n’a réussi à arraisonner que quelques barques non réglementaires. C’est la confusion en haute mer . Les armateurs des deux catégories en question ont bravé l’autorité de l’État. Résultat : surexploitation du poulpe au-delà des quotas autorisés. Quand les accords de l’administration sont violés, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond.
Ce coup de canif à une décision gouvernementale est une dérive inquiétante. Il souligne la difficulté qu’ont les pouvoirs publics marocains à organiser véritablement un secteur stratégique toujours livré à l’improvisation et à la voracité. Ce n’est pas de l’économie, c’est du pompage du fond marin. Entre un ministre qui n’a que sa bonne foi à vendre et un gouvernement dépassé par les événements, le secteur miné par l’informel et le laxisme donne de plus en plus l’image d’un bateau ivre.
Ce qu’on observe à loisir depuis des années, c’est que la fermeté des pouvoirs publics est constamment prise en défaut dès qu’il s’agit des provinces du sud. Il faut bien que cela change. Les opérateurs de la pêche de cette partie du Maroc, souvent des notabilités locales respectables, ne sont pas au-dessus des lois allant jusqu’à se donner le droit de faire ce qu’ils veulent. Ils ont obligation d’adhérer comme un seul homme à une stratégie globale de développement par une démarche saine de modernisation et d’industrialisation de l’activité des produits de la mer en créant de la richesse et de la valeur ajoutée. Le poulpe ou le pélagique est une ressource nationale qu’il faut sauvegarder pour ne pas compromettre l’avenir.

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