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La vente pyramidale tisse sa toile

© D.R

Ailleurs, elle est interdite. Chez nous, la vente pyramidale, également appelée vente en boule-de-neige, fait des ravages. Dans tous les sens de l’expression. Plusieurs sociétés ont investi ce terrain choisissant des noms affriolants, attirants et donnant l’illusion d’être des multinationales venues investir au Maroc et créer de nombreux emplois alors que seul l’appât du gain facile les attire. Revelance, Hemisfere ou encore Surlune, qui proposent un soidisant système de franchise. Et notre pays leur ouvre grand ses bras. Chômage et pauvreté aidant. Les victimes de cette vente, qui croyaient détenir une occasion en or de jeter leurs difficultés économiques aux oubliettes, sont très nombreuses. Mais comment ont-ils fait pour y arriver ? L’approche est toute simple et se passe à travers une connaissance, un parent ou tout simplement une personne rencontrée au hasard des réceptions et autres rencontres mondaines.
Cette personne explique en des termes très alléchants les mécanismes de ce commerce et surtout les bénéfices qui peuvent en découler, financièrement bien sûr. La victime se trouve ainsi conditionnée et prête à se lancer dans cette «fantastique» aventure. La prochaine étape est une réunion avec des responsables, des hauts gradés de la pyramide, qui, à l’aide de démonstrations on ne peut plus persuasives, installent le tant recherché sentiment de confiance chez les nouveaux venus. Ces présentations se déroulent au domicile des nouvelles cibles mais aussi dans un bureau se trouvant généralement dans un immeuble haut de gamme, ou dans un palace 5 étoiles. Des réunions qui se tiennent essentiellement en fin de journée. Et l’on commence à louer les avantages de la société en question. «On nous a expliqué qu’il s’agissait d’une multinationale avec plusieurs filiales qui se trouvent dans plusieurs pays, et qui a débuté au Maroc en l’an 2000 en créant son premier département consacré aux produits de nettoyage.
On nous a précisé que cette société est à la recherche de personnes de qualité pour établir son réseau marocain. Des personnes qui pourront accéder à des postes-clés, directeur régional ou technicien de vente par exemple, car ils sont encore vacants», témoigne une victime qui s’est laissée duper par une société espagnole de vente pyramidale. Vient par la suite la présentation des produits à vendre. Ces derniers n’ont en général aucune valeur commerciale. Ce sont en effet souvent des combines, des systèmes de ristourne illusoires, des traitements-miracle très chers et peu efficaces, des produits de nettoyage aux mille vertus, sans efficacité aucune ou encore des cosmétiques qui vous rendent une jeunesse ardemment espérée, mais jamais obtenue. Les personnes recrutées sont souvent obligées d’investir, selon les termes des initiateurs, dans de grandes quantités de ces produits sans qu’il leur soit réellement possible de les revendre. Leur investissement procure cependant des revenus importants à l’organisateur qui les a recrutées. Trois positions dans la pyramide s’offrent alors aux intéressés. La première est celle de détaillants, avec quelque 20.000 dirhams de produits. La seconde est celle des grossistes avec une trentaine de milliers de dirhams mais surtout 5% de gain sur le chiffre d’affaires de la première catégorie, sous sa coupole évidemment.
La troisième catégorie est celle des gérants qui ont sous leur tutelle tout un porte feuille de «franchisés». Ils perçoivent au passage 10% sur le chiffre d’affaires réalisé par tous leurs «filleules grossistes». «Le système de la société marche, mais seulement pour une poignée de personnes sans scrupule, grâce à des centaines d’autres qui perdent leur argent», estime une autre victime. Ce système se base donc sur la confiance. «Tout ou presque se joue sur la crédibilité de la personne qui vous a invité. La confiance installée, vous lui faites confiance et vous êtes partant pour adhérer à la société, sinon vous allez hésiter, c’est pourquoi la société enseigne essentiellement à ses adhérents la manière avec laquelle ils doivent choisir leur invité». Mais vient un moment où tout ce schéma est cassé. Les produits s’entassent sans pour autant s’écouler et les problèmes surgissent de partout jusqu’à saturation. Commercialement non viable car présupposant un apport sans fin de nouveaux participants prêts à entrer dans le système et à s’enrichir en recrutant à leur tour de nouveaux participants, la vente pyramidale ne profite qu’aux premiers venus. Comme le nombre de personnes à pouvoir être recrutées n’est pas infini, les derniers arrivés ont arithmétiquement de moins en moins de chances de s’enrichir. Ce type de système a par conséquent une espérance de vie limitée et les derniers à y participer n’ont pratiquement aucune chance de récupérer leurs frais d’entrée et encore moins de chance de tirer profit du système. C’est pour cela que les lois sur la protection des consommateurs sont unanimes.
Toutes l’interdisent. Des systèmes trompeurs de même type sont décrits dans diverses législations à travers le monde sous le nom de « chaînes de lettres », «organisations boule de neige», «chaînes de vente», «ventes sur recommandation» ou «loteries d’investissement». En Europe et en Amérique du Nord, les personnes qui s’adonnent à ce commerce sont passibles d’amendes et/ou d’emprisonnement. Mais dans notre pays, un vide juridique persiste en la matière. Un projet de loi interdisant ces pratiques, au nom de la protection des droits du consommateur, a pourtant été élaboré. Sauf qu’il se trouve toujours sur les bureaux des fonctionnaires du Secrétariat général du Gouvernement.

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