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Quand Nadia Yassine se dévoile

© D.R

Nadia Yassine, la fille du dirigeant et fondateur du mouvement Al Adl Wal Ihssane, Abdessalam Yassine, a jeté un pavé dans la mare politique à cause de ses déclarations pour le moins provocatrices dans un entretien accordé à l’hebdomadaire, «Al Ousbouiya Al Jadida» et publié dans le numéro du vendredi dernier.
En vrac, voilà ce qu’elle a déclaré : "La monarchie n’est pas faite pour le Maroc", "les indicateurs montrent que le régime s’écroulera bientôt", "la Constitution est bonne pour la poubelle de l’histoire", "le PJD a été affreusement instrumentalisé par le Makhzen", "est-il nécessaire de s’accrocher à cette monarchie jusqu’à la fin des temps ?", "allons-nous mourir si nous restons sans Roi ? je ne le pense pas" …
Sur ordre du procureur du Roi auprès du Tribunal de Première instance de Rabat, la police judiciaire a convoqué Nadia Yassine, vendredi après-midi, pour tirer au clair cette affaire. L’intéressée n’a absolument pas nié ses déclarations. Elle persiste et signe. Que veut-elle au juste ? Certains estiment que cette sortie médiatique de Nadia Yassine est un moyen pour la Jamaâ de rappeler à l’Etat l’importance d’Al Adl Wal Ihssane. D’autres y voient une conséquence normale du vent de liberté qui souffle sur le pays depuis plusieurs années et que certains exploitent au nom de la démocratie à des fins très peu claires.
Contactée par ALM, Nadia Yassine a refusé de revenir sur le contenu de l’interview incriminée. Un contenu qu’elle revendique amplement. "Je suis pratiquement certaine que je serais poursuivie en justice à cause de cette interview et des idées qu’elle contient", a affirmé Nadia Yassine. Et d’ajouter : "Dans ce cas, j’aurais l’occasion de m’expliquer. En attendant, je préfère n’ajouter aucun autre commentaire". Toutefois, Nadia Yassine conclut :"Je suis totalement pour la liberté d’expression, surtout quand les idées développées relèvent du domaine intellectuel". En somme, Nadia Yassine estime que ses propos relèvent d’un registre purement académique. D’ailleurs, dans l’interview accordée à «Al Ousbouiya Al Jadida», elle rappelle à chaque reprise que ces propos s’inscrivent dans un cadre strictement universitaire (Nadia Yassine était l’invitée, il y a quelques semaines, d’une conférence organisée par l’Université de Bercley en Californie) et qu’il n’est pas question de faire évoluer la réalité marocaine de manière violente. Sur la question relative au régime politique au Maroc, Nadia Yassine a souligné que si elle avait "à choisir entre une autocratie et une république", elle choisirait "cette dernière", tout en affirmant que ses opinions n’engagent que sa personne et ne reflètent donc nullement l’opinion d’Al Adl Wal Ihssane. Toujours est-il que l’affaire Nadia Yassine ne fait que commencer et ses conséquences risquent inéluctablement d’éclabousser la Jamaâ. Même si plusieurs responsables de cette dernière ne cachent pas, en privé, leur gêne vis-à-vis des déclarations intempestives de la fille du leader Abdessalam Yassine. Pour leur part, nos confrères d’«Al Ousbouiya Al Jadida» ont, eux aussi, été convoqués par la police judiciaire de Rabat, le samedi matin, dans le cadre de la même enquête qui a conduit Nadia Yassine vers les locaux de la PJ. Abdelaziz Gougas, directeur de la publication et les deux journalistes ayant réalisé l’interview, Mustapha Haïrane et Adil Najdi, ont été entendus pendant quatre heures environ. "On nous a posé un certain nombre de questions relatives au choix du titre à la Une, aux conditions dans lesquelles l’interview a été effectuée", a déclaré à ALM Abdelaziz Gougas. "Les éléments de la police judiciaire ont également voulu savoir si nous étions d’accord avec les idées développées par Nadia Yassine", poursuit-il. Et d’ajouter : "Nous sommes des journalistes, nous ne publions pas uniquement les opinions avec lesquelles nous sommes d’accord. Nadia Yassine n’est pas une femme anonyme, elle est la fille du leader du mouvement Al Adl Wal Ihssane, et ses propos ont déjà été tenus au sein de l’Université américaine de Berkley".
Abdelaziz Gougas a également insisté sur le fait que son journal "ne veut en aucun cas doper ses ventes sur le compte de l’ordre public". Comment l’Etat va-t-il se comporter vis-à-vis de cette nouvelle dérive ? C’est la question que se pose bon nombre d’observateurs. L’offense à la monarchie, et parfois à la personne même du Souverain, à l’intégrité territoriale, doit-elle passer comme une lettre à la poste ? Si la justice a fermé les yeux sur un nombre incalculable d’atteintes directes aux fondements et aux institutions de l’Etat, qu’elle sera son attitude envers la fille de Abdessalam Yassine ? Si Nadia Yassine est jugée puis condamnée pour atteinte à l’institution monarchique, quelle sera la réaction des militants d’Al Adl Wal Ihssane, considérés par certains comme les plus nombreux de toutes les organisations politiques du Maroc ? Affaire à suivre…

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