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Sidi Moumen : La misère n’a pas bougé

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Le décor est presque le même, malgré une nette effervescence de la construction immobilière. Mais juste en face des grands chantiers des promoteurs, les immenses bidonvilles de Rhamna, Tomas et Zaraba, ainsi que d’autres plus petits, sont toujours aussi imposants avec leurs aspects misérabilistes et une population dense et extrêmement pauvre.
L’accès à ces agglomérations se fait à travers des routes et des rues dont l’état est lamentable. Ce ne sont pas des nids de poules mais de vrais pièges à éléphants qui parsèment les artères menant au fond de Sidi Moumen, et qui sont utilisées par les moyens de transport où s’entremêlent bus, voitures, motocycles, taxis collectifs, carrosses et autres attelages primitifs.
Les élus se démènent comme ils peuvent avec les moyens de bord , car ces bidonvilles continuent de souffrir affreusement de manques d’infrastructures, de surpeuplement et d’une incroyable propagation d’habitat insalubre ainsi qu’un taux élevé d’ignorance, d’analphabétisme et de délinquance . Les habitants qui se sont habitués à la présence des journalistes affirment avoir l’espoir dans un avenir meilleur. En fait, la commune de sidi Moumen, bien avant qu’elle ne soit transformée en arrondissement sous la nouvelle législation, avait entamé certains chantiers bien avant les évènements du 16 mai. Premier objectif: le désenclavement du secteur en s’occupant des artères et des chaussées. En somme, comme l’a déclaré le secrétaire général de l’arrondissement de Sidi Moumen, Mohamed Oulmaâti, les seules modifications enregistrées se résument à la naissance de plusieurs associations culturelles et sportives ainsi que l’électrification et le raccordement en eau potable des bidonvilles. En somme, ce qu’ils peuvent faire sans l’intervention d’autres acteurs. Et encore, cette électrification (publique) ne couvre que près de 70% des bidonvilles où s’entassent près de 60 000 citoyens. Quant à l’eau potable, c’est le nombre des bornes-fontaines qui s’est élevé à près de 120 unités. Mais c’est l’habitat insalubre qui constitue le coeur de tous les problèmes. Sur ce point, il faut signaler que Sidi Moumen figurait dans le cadre du programme national de la lutte contre l’habitat insalubre élaboré en 2002.
D’après une étude réalisée par les services de l’arrondissement, l’éradication des bidonvilles n’est pas impossible, c’est même à la portée des autorités locales grâce à des conventions établies avec les promoteurs immobiliers. Mais ce processus ne serait pas efficace sans l’implication des établissements bancaires et sans une décentralisation du combat contre le phénomène d’insalubrité.
Il faudrait activer la décision régionale en ce qui concerne l’habitat insalubre, en impliquant le Conseil de la ville, la préfecture et le secteur privé. A cela s’ajoute, et c’est encore plus pénalisant, l’intransigeance des établissements bancaires qui exigent des garanties réelles sous forme d’hypothèque avant de débloquer le moindre centime !
Ce qui revient à dire qu’un marchand ambulant ou un mécanicien, par exemple, même avec une rentabilité fixe qui dépasse les 7000 dirhams par mois, n’est pas crédible auprès des banques. Pourquoi ces dernières ne se baseraient-elles pas sur des certificats de pratique constante de la profession, délivrés par les autorités locales. D’ailleurs le seul titre foncier de l’habitat convoité représente en soi une garantie.
L’apport de certaines ONG, comme le Rotary club, Lion’s club et autres, demeure limité devant l’ampleur des besoins. L’édification d’un centre d’accueil des enfants abandonnés, ou un centre de formation professionnelle, ou encore l’aménagement de quelques espaces verts sont de bons acquis, mais ce n’est qu’un pas dans la longue piste de problèmes qui rongent la zone de Sidi Moumen. En conclusion, à part les écoles (il y en a assez), les problèmes de cette zone demeurent toujours l’habitat insalubre, l’absence d’infrastructures, des hôpitaux et des postes de police. Il est vrai que l’on s’attendait à beaucoup plus de changement dans cette partie marginalisée, mais visiblement, toutes les conditions qui ont fait de Sidi Moumen un vivier propice au recrutement de jeunes fanatiques sont toujours présentes.
Toute tentative de la seule bonne volonté et les bonnes intentions se brise sous le poids des humiliations quotidiennes. Il n’y a aucune couleur vive, tout est fade. A croire que la tristesse et la misère ont recouvert ces baraques de leur linceul.

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