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Ehoud Olmert va à Washington

© D.R

Depuis sa réélection, George W.Bush ne voulait s’occuper que de l’Irak, un problème qu’il n’entendait pas voir se transformer, une fois de plus, en un échec pour sa famille. D’où son choix initial de laisser à Condoleezza Rice le soin de s’occuper du conflit du Proche-Orient et du conflit israélo-palestinien. Celui-ci est loin d’être, pour George W.Bush, une préoccupation essentielle de son deuxième mandat. Les faits ont modifié cette répartition des tâches. D’une part, en Palestine, le Hamas a gagné les élections législatives, affaiblissant terriblement le brave Mahmoud Abbas (Abou Mazen). D’autre part, un allié naturel, le pauvre Ariel Saron, est tombé dans un profond coma depuis le 5 janvier 2006.
Son remplaçant, Ehoud Olmert, est totalement inconnu des Américains et de l’équipe de George W. Bush, y compris de Condoleezza Rice. Certes, il a accepté, sur la demande express, dit-on, de la Secrétaire d’Etat américaine, de négocier avec les Palestiniens les frontières définitives d’Israël sur la base d’un retrait d’une partie importante de la Cisjordanie (rive occidentale du Jourdain). C’est du moins ce qu’il a annoncé, en ajoutant que, si les discussions à ce sujet avec Mahmoud Abbas échouaient, il se résoudrait à une « fixation unilatérale » des frontières avant la fin de sa législature, c’est-à-dire 2010. Ehoud Olmert a fait de cet engagement un «véritable sujet de référendum», en développant ce thème lors de la campagne en vue des élections législatives israéliennes, du 28 mars dernier.
Aujourd’hui, un nouvel élément entre en ligne de jeu. Une véritable guerre civile s’est ouverte entre une milice créée par le gouvernement du Hamas, sur décision de son chef, Ismaïl Hanieh, et les forces de l’ordre dépendant du Président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Il s’agit d’une confrontation armée entre le Hamas et le Fatah. En Israël même, Ehoud Olmert, contraint de former une coalition gouvernementale avec un parti travailliste qui dispose de 19 députés, n’est pas libre de sa politique intérieure et extérieure, Le nouveau dirigeant travailliste Amir Peretz, qui a hérité du ministère de la Défense, ne rate pas une occasion de «faire entendre sa différence ». Il prend des positions différentes de celles du chef du gouvernement tant sur le plan social, à l’occasion du vote du budget de l’Etat pour l’année 2007, qu’en matière de politique étrangère. Il souhaite la reprise au plus vite, des négociations avec Mahmoud Abbas ou rappelle son opposition à toute «décision unilatérale» quant à l’avenir des territoires palestiniens.
Le président américain est confronté à d’autres problèmes, en particulier à ceux posés par le régime iranien dont le nouveau chef renoue avec un extrémisme qu’on croyait définitivement enterré. Le nouvel homme fort de Téhéran entend devenir le chef de la mouvance islamiste en soutenant le Hamas en Palestine, quitte à soustraire celui-ci à l’influence de la Syrie. Et, surtout, il affirme sa volonté de doter l’Iran de l’arme nucléaire, en dépit de l’opposition de la communauté internationale, notamment de l’Europe, des USA, voire du Conseil de sécurité des Nations unies. Ce nouveau sujet de préoccupation parvient même à reléguer au second plan, la situation en Irak. Alors même que les revendications iraniennes sont probablement, une «véritable réponse» de Téhéran à l’occupation de l’Irak et à la guerre menée par la Coalition anglo-saxonne contre les Chiites irakiens, frères des Chiites iraniens.
La complexité de la situation est telle que le Président George W. Bush n’a pu remettre à plus tard une première discussion directe avec le nouveau chef du gouvernement israélien, celui qui a succédé à son «compagnon» de longue date, Ariel Sharon. Certes, Ehoud Olmert a répondu favorablement aux pressions de Condoleezza Rice qui recommandait au chef du gouvernement israélien d’adopter un « profil bas» dans ses déclarations relatives à son plan de repli de Cisjordanie. A l’origine, Ehoud Olmert ne cachait pas, on l’a dit, que, faute d’avoir un interlocuteur palestinien prêt à mener une véritable négociation, il pourrait prendre des décisions «unilatérales». Il a révisé ce jugement, allant jusqu’à annoncer: «Il faudra attendre trois ou peut-être dix mois, avant de décréter cette absence de partenaire».
L’unilatéralisme, cette politique que Ehoud Olmert a héritée du Likoud, son ancien parti devenu aujourd’hui, sous la houlette de Benyamin Netanyahou et de Sylvan Shalom une formation d’extrême droite, pose problème au Premier ministre. Il est conscient qu’en la matière, les Etats-Unis doivent tenir compte de l’opposition des Européens, des Russes et des pays arabes modérés à toute mesure unilatérale, notamment en matière de fixation des frontières. C’est la raison pour laquelle le Président George Bush a demandé formellement aux responsables israéliens de faire «profit bas» sur cette question. Ceux-ci ont d’ailleurs pu entendre, la semaine dernière, la mise en garde du ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, venu ouvrir la «saison culturelle française» en Israël. «L’Europe ne reconnaîtra pas la fixation unilatérale des frontières».
Dans ces conditions, les discussions entre Ehoud Olmert et George Bush porteront essentiellement sur le dossier considéré de part et d’autre comme le plus important et le plus urgent : la menace nucléaire iranienne. Le Premier ministre israélien expliquera, selon la presse, qu’Israël ne mène pas la campagne internationale contre l’armement atomique de Téhéran. Il attend, en réalité, des Etats-Unis et de la communauté internationale que ceux-ci fassent tout pour prévenir cette menace qui ne concerne pas uniquement le petit territoire israélien. Les nouveaux responsables israéliens auront-ils le même pouvoir qu’Ariel Sharon de pousser les Américains et les Européens à agir ?… Ehoud Olmert et Amir Peretz sont-ils capables de faire prendre conscience aux Américains de la gravité de la menace iranienne, sans pour autant paraître à les pousser à attaquer Téhéran ? Il est évident que les Israéliens ne sont pas en mesure de brandir un risque d’action unilatérale contre les Iraniens…
Une dernière divergence semble apparaître, entre Américains et Israéliens, à la veille du voyage d’Ehoud Olmert à Washington. Les Américains ont déclaré vouloir promouvoir un nouveau traité de non-prolifération nucléalre qui ne se contenterait plus de «geler», comme précédemment mais d’interdire totalement la production de matière fissile (plutonium et uranium enrichis). Ce qui revient à interdire aux Israéliens de continuer à en produire. D’où leur intervention pour convaincre les Etats-Unis de renoncer à cette initiative. Certes, les Américains essaient de tranquilliser les Israéliens en leur affirmant – curieusement – que leur proposition a très peu de chances d’être adoptée. D’autant qu’ils refusent toujours d’envisager toute transmission de «technologie nucléaire civile». Celle, observent les Israéliens que les Américains ont fournie, récemment, à l’Inde, un pays qui n’a pas, lui non plus, signé le traité de non-prolifération…
Pour en revenir au programme du voyage d’Ehoud Olmert à Washington, le problème du nucléaire iranien devra être abordé à plusieurs niveaux, d’autant qu’Israël n’a jamais accepté de signer le traité de non-prolifération nucléaire. Mais il est vraisemblable qu’Américains et Israéliens se déclareront, surtout, partisans d’une reprise des négociations avec Abou Mazen afin d’éviter une éventuelle décision unilatérale. Celle-ci est d’ailleurs rejetée par le ministre de la Défense, Amir Peretz, numéro deux de la coalition gouvernementale. Rejetant l’unilatéralisme, le leader travailliste exige de véritables négociations avec les Palestiniens, dont il entend, auparavant, améliorer la situation économique en ouvrant un passage – celui de Karni – aux exportations entre Gaza et Israël. A ses yeux, il s’agit d’un véritable tournant stratégique, pour prévenir une «catastrophe humanitaire» qui représente, dit Amir Peretz, un danger pour la sécurité d’Israël». C’est la raison pour laquelle il veut changer la politique sécuritaire et faire preuve de plus d’humanité dans les relations d’Israël avec les Palestiniens.

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