Société

Hébergements clandestins

A Ifrane, au début de chaque été, la scène est presque aussi rituelle que la cohue des soldes : une foule de petits enfants se pressent aux abords des parkings, des cafés et des magasins de commerces. Ils attendent leur tour pour dénicher l’oiseau rare qui va accepter de leur louer une chambre ou un appartement. Ces apprentis agents immobiliers touchent une commission de 10 à 20 dirhams la course. Innocemment, les chérubins d’Ifrane contribuent ainsi à soulager la souffrance des parents dont la majorité vivent dans le dénuement et la misère. Mais, au fil des années, l’hébergement clandestin commence à dériver et prend une trajectoire dangereuse. En témoigne la situation actuelle. Des jeunes plus âgés, aveuglés sans doute par le chômage, misent aujourd’hui sur une clientèle riche portée notamment sur la prostitution. Ils proposent des villas dont le prix de location varie entre 500 à 2000 dh la nuit. Aux quartiers Atlas I et II (ironiquement appelés quartier des voleurs) ou à Hay Riad et un peu partout … des résidences secondaires appartemant souvent à de hauts fonctionnaires sont devenues célèbres pour «le confort, la convivialité et surtout la sécurité du coin». Si pour une majorité, l’hébergement chez l’habitant des touristes est une suite et une réponse logique à la profonde crise qui frappe la ville ; nombreux sont ceux qui ne se cachent plus pour s’indigner. «Les autorités doivent agir», s’insurge un enseignant de la ville.
Dans chaque coin et recoin, des jeunes hommes, n’ont plus froid aux yeux en effet pour proposer aux touristes «un package de proximité propre à Ifrane»: des filles et un appartement. La fameuse interpellation «wach tkri» (littéralement : désirez-vous louer) qui agace chaque tout visiteur sonne comme une invitation au vice. Aujourd’hui et face à cette situation, le proxénétisme le dispute au l’harcèlement. Au détriment de la réputation et de la bonne image d’Ifrane. Certes, il ne faudrait pas généraliser. De nombreuses familles qui louent leurs maisons pendant les vacances, donnent la preuve, avec leurs sérénité et dignité, que l’hébergement clandestin pourraient contribuer au développement du tourisme de la ville. En effet, si on se limite à la situation actuelle relative aux infrastructures hôtelières, l’engouement pour cette formule de séjour est amplement justifié. La capacité d’accueil et la cherté des hôtels et résidences classés sont en deçà des attentes des touristes. D’autant plus que les touristes nationaux occupent la première place des visiteurs d’Ifrane, environ 34.378 touristes pour 2001 (75%) rien que pour les établissements hôteliers classés.
Pour beaucoup, c’est là où le bât blesse. Faute de précautions de sécurité et d’hygiène, l’hébergement clandestin constitue en effet un danger permanent pour le touriste. Les exemples ne manquent pas d’ailleurs : des Libyens, un Emirati, des Marocains et Marocaines ont trouvé la mort ces derniers années dans des résidences clandestines par asphyxie pour leur majorité. Des accidents moins graves sont légion. Un mal nécessaire.
En juin 1995, le ministre du Tourisme n’a pas manqué, dans une lettre adressée au gouverneur de la province d’Ifrane, d’attirer l’attention sur les «risques de tous genres que les hébergements clandestins présentent». Comme quoi, la politique tracée jusqu’à présent pour interdire ce type d’hébergement est à redéfinir. Puisque inefficace. Des voix s’élèvent d’ailleurs pour encourager cette formule dans le sens qui favorisera la relance du tourisme à Ifrane. Et non dans la voie qui profitera à la mafia du tourisme sexuel.

• Mohamed Ezzine
Correspondance régionale

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