Chroniques

Le recrutement dans les postes sensibles: Quels impacts pour les Etats ?

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Chez certains Etats, une véritable prise de conscience s’est amorcée pour intégrer la personnalité de l’individu au cœur du processus de fiabilisation des recrutements, particulièrement dans l’accès aux postes de haut rang dans la fonction publique.

L’on ne naît pas diplomate, magistrat, policier ou militaire, on le devient. Au fait, chaque individu naiît avec un potentiel et chacun est créatif d’une manière ou d’une autre. On peut ne pas aimer un métier, mais bien gérer sa carrière. Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas important d’exercer un emploi qui nous plaît.
Il est vrai que ceux qui travaillent avec enthousiasme fournissent le plus souvent de bien meilleurs résultats sur tous les plans que ceux qui se retrouvent en train de pratiquer une fonction ou une activité par pur engouement financier ou par simple attrait de l’exercice du pouvoir.

La personnalité de l’individu au cœur du processus de recrutement
Il y a toujours un risque dans les recrutements se rapportant, particulièrement, à certains secteurs stratégiques (sécurité, défense, diplomatie) en termes d’impacts à court ou moyen terme, liés à un état de crise ou de détresse (troubles de santé mentale ou de comportement, problèmes ou conflits familiaux, …) de la personne en poste. Car l’histoire nous l’a trop bien démontré : combien de diplomates de haut rang, de militaires hauts gradés ou d’officiers de renseignement ont été reconnus coupables (faits de trahison) d’avoir divulgué ou livré, sciemment ou involontairement, des informations confidentielles et des secrets d’Etat à une puissance étrangère. Derrière cette malhonnêteté – volontaire ou inconsciente – et en l’absence de tout sens des responsabilités se cachaient pas mal de raisons : à titre de simple illustration, les grands buveurs sont souvent sujets à des humeurs dépressives et le danger qu’ils soient manipulés est réel. Dans beaucoup de cas, ces cadres supérieurs ne s’en aperçoivent pas : on leur soutire gentiment des informations confidentielles, on peut même les pousser à commettre des actes délictuels ou à exécuter certaines actions, sans pour autant qu’ils ne prennent conscience d’avoir trahi les siens. Dans pareille situation, les intérêts suprêmes du pays seront menacés. Ce qui est finalement la conséquence de l’embauche, de la promotion ou de la nomination de mauvaises personnes. C’est d’ailleurs pour cela que chez certains Etats, une véritable prise de conscience s’est amorcée pour intégrer la personnalité de l’individu au cœur du processus de fiabilisation des recrutements, particulièrement dans l’accès aux postes de haut rang dans la fonction publique. Malheureusement, cette initiative s’arrête souvent à l’étape d’enrôlement ou de nomination, alors que cela devrait se faire de manière continue.
N’oublions pas qu’un changement de personnalité et/ou de comportement important et brutal peut avoir lieu à tout moment. D’ailleurs, l’examen de personnalité, bien qu’inclus dans le cadre des enquêtes de sécurité préalables aux nominations à certains postes de confiance (hautes fonctions de l’Etat), ne fait pas l’objet de vérifications périodiques pour s’assurer que ces grands commis de l’Etat satisfont, tout au long de l’exercice de leurs hautes fonctions, aux exigences de bonne santé mentale, de moralité et d’honorabilité. Prenons l’exemple des coups d’Etat militaires que l’Afrique subit ces dernières années et qui nous permettent d’en tirer des leçons très intéressantes. Les exécutants et les instigateurs de ces putschs étaient très proches des chefs d’Etat destitués. Je ne parle pas de bonne ou mauvaise intention des auteurs de ces coups d’Etat : Ont-ils réellement la volonté de restaurer l’ordre constitutionnel dans leurs pays ou non ? Ont-ils été instrumentalisés, d’une manière ou d’une autre, pour le compte de puissances étrangères ? Ce sont là quelques questions sur lesquelles les analystes les plus chevronnés ne trouveront pas réponse de sitôt, du moment qu’ils ne disposent pas de toutes les pièces du puzzle africain, en vue de parvenir à des conclusions justes et certaines.

Pour placer les bonnes personnes, il faut sortir du favoritisme
Beaucoup de pays ont élaboré un ensemble de règles pour la nomination aux postes supérieurs dans la haute fonction publique. D’autres ont créé un corps de fonctionnaires particulier pour ces emplois supérieurs. Bien que plusieurs pays n’y croient pas vraiment, la réussite dans certaines fonctions sensibles se prépare dès l’enfance. En effet, on retrouve dans plusieurs sociétés le cas typique de familles qui influencent l’orientation de leurs enfants dès les bancs de l’école et les motivent pour poursuivre leurs études secondaires et supérieures dans telle spécialité ou sous- spécialité. Parfois même les parents y vont bien au-delà, en imposant une carrière toute tracée à leurs enfants. D’après Isabelle Méténier, psychologue et auteure du livre «Histoire personnelle, destinée professionnelle» : «L’influence de nos géniteurs est plus souvent inconsciente. Elle se loge dans notre cerveau depuis notre plus jeune âge et à notre insu ». Cela peut être une bonne chose, mais pas toujours. Le seul avantage est que l’enfant grandit dans un environnement familial dans lequel il a la possibilité d’apprendre énormément sur un métier déterminé, que ce soit en termes de comportements à adopter ou de règles à respecter. Jusque-là, nous pouvons nous retrouver dans un contexte idéal puisque la jeune recrue connaîtrait bien l’institution dans laquelle elle pourrait être appelée, un jour, à occuper de hautes fonctions, comme il se peut qu’elle ne soit pas du tout séduite par un métier qui lui a été peut-être imposé, alors qu’en réalité, sa passion est tout autre. Finalement, le recrutement dans les postes sensibles – et particulièrement aux hautes fonctions s’y rapportant – devrait être très bien appréhendé dans sa globalité par les Etats pour éviter tout effet de surprise.

 

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